XI - Chapitre XLV

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Comme le duc l'avait dit, quelques jours plus tard, ils éteint en route pour Versailles.
Ils étaient installés tous les trois - Hélène, Philippe et Guillaume - dans la calèche la plus luxueuse dans laquelle la jeune femme était montée dans sa vie. Elle était grande et confortable. Mais la route n'en était pas moins longue pour autant. A cheval cela aurait été plus rapide, mais Philippe ne voulait pas imposer de nouveau de monter à sa femme, et elle en était soulagée.

Depuis la dernière tentative découragée d'avoir une inutilité avec son épouse, Philippe n'avait rien de tenté de nouveau. Les prostituées que son frère avait ramenées ne l'avait pas soulagé, bien au contraire, il n'avait donc revu aucune femme depuis, mais ne voulait pas pour autant brusquer Hélène. Il aurait aimé qu'elle fasse le premier pas, cela n'était pas arrivé. Mais il avait néanmoins décidé d'être patient. Il espérait que la découverte de la cour lui fasse plaisir et surtout oublier le grave incident de la forêt.
Hélène avait été rassurée de ne pas voir son mari venir intensivement dans sa chambre et dans son lit et elle aussi, espérait que Versailles serait une bouffée d'oxygène. Néanmoins, elle était triste que Margot ne soit pas venue. Elle avait essayé d'en parler à Philippe, mais on n'invitait pas qui on voulait dans le palais de sa majesté, et Margot n'avait en rien été conviée.
En revanche, elle était heureuse que Guillaume soit là. Elle savait qu'elle ne devrait pas ressentir ce sentiment mais elle était soulagée de la savoir près d'elle, comme un bouclier qui pouvait la protéger de ce qui l'attendait. Car après tout, il l'avait sauvée d'Arthur lors de leur rencontre, puis de bien pire lors de la nuit sombre et glaciale dans les bois. Il était une figure rassurante et amicale pour cette jeune femme naïve et effrayée.

Le voyage se partageait entre les silences et sommeils, les discutions de politiques entre les deux hommes et les arrêts dans la campagne. Hélène s'ennuyait mortellement et avait l'impression que cela ne finirait jamais. Elle regardait défiler le paysage, faisait des siestes, écoutait les propos de ses deux compagnons sans y comprendre grand chose, et regardait encore les paysages.
Elle était assise à côté de Philippe et Guillaume était en face d'eux deux. Bien que la calèche fut grande, ils n'en restaient pas moins à l'étroit, si bien que leurs jambes de touchaient. Hélène essayait de ne pas y prêter garde.

A un moment, Philippe s'endormît. Hélène le devina en entendant le sifflement léger de ses narines et sa respiration ralentie. Elle avait son menton dans sa main et son coude posé contre la fenêtre à regarder défiler les arbres.

-Vous voulez faire une partie?

Elle tourna son visage vers Guillaume et regarda sa main qui tenait un paquet de cartes.
Elle hésita, pesa le pour être le contre. Mais après tout, que faisait-elle de mal? Et son mari était juste à côté d'elle. Elle s'ennuyait à mourir, tout était bon pour faire passer le temps plus vite.
Elle hocha la tête.

Ils jouèrent à la bataille - car c'était le seul jeu en commun qu'ils connaissaient - en utilisant le long tissu de la robe d'Hélène en guise de table pour poser les cartes.
Elle gagna la première partie, lui la seconde.

-La belle? proposa-t-il.

Elle acquiesça.
Elle n'osait pas vraiment parler, comme si elle ne devait pas réveiller Philippe. Elle ne comprenait même pas pourquoi elle prenait de telles précautions. Elle ne faisait rien de mal! Elle se le répétait sans cesse.

Guillaume mélangeait le paquet lorsqu'il dit:

-Je suis heureux de faire le voyage avec vous.
-...Oui. C'est normal, Philippe est votre...

Il la coupa:

-Par « vous », je n'entendais pas vraiment « vous deux ».

Hélène devint blême comme un linge et regarda son mari, fébrile.

-Il dort. Croyez-moi, j'ai passé suffisamment de temps avec lui pour savoir lorsqu'il est dans les bras de Morphée.

Hélène prit les cartes qu'il lui tendit, sans le regarder dans les yeux, les pommettes rosies. Elle murmura:

-Vous ne devriez pas dire de telles choses.
-Vous avez raison. Pardonnez-moi.

Ils se mirent à jouer, en silence.

Et finalement, Hélène dit dans un souffle, en déposant un as de coeur qui lui fit remporter la main:

-Moi aussi je suis heureuse que vous soyez là...

Épées et BaisersWhere stories live. Discover now