XIII - Chapitre LIV

7.1K 619 27
                                    


Hélène tournait en rond. Elle n'avait pas dormi de la nuit, et le jour s'était maintenant levé. Pourtant, Philippe n'était toujours pas revenu. Il lui avait dit de l'attendre, et elle avait obéi: elle n'était pas sortie de la chambre. Mais les heures continuaient de défiler et elle ne savait toujours pas ce qui se passait en dehors de cette pièce. L'angoisse montait un peu plus en elle à chaque seconde. L'aube était chaude, mais il était encore tôt. Pourtant, la jeune femme ne pouvait plus rester ainsi dans l'ignorance. Il fallait qu'elle agisse et qu'elle sache. Peu importe s'il ne lui pardonnait pas d'être sortie avant son retour.
Vêtue de la même robe que la veille au soir, elle quitta la chambre et parcouru les longs couloirs interminables de Versailles. Elle essayait de se souvenir où aller dans ce labyrinthe sans fin. Elle demanda plusieurs fois son chemin à des serviteurs avant de trouver les grandes salles qu'elle avait visité durant la soirée.
Cette fois-ci, elles étaient presque vides. Il était encore tôt, les fêtards de la veille dormaient encore profondément.
Hélène trottinait désespérément dans le palais, à la recherche de son mari, Guillaume, ou peut être de l'homme de la veille. Mais elle ne les voyait nulle part.

-Hélène! Enfin je vous trouve!

La jeune femme fit volte face et tomba nez à nez avec Grace, essoufflée, la main sur la poitrine.

-Madame de Colmette, que se passe-t-il?!
-« Grace », je vous l'ai déjà dit... (elle reprenait difficilement son souffle et Hélène pensa au corset qui devait enserrer son corps tout autant que le sien) C'est Guillaume.
-Que lui arrive-t-il?!

La jeune femme était désespérée et suppliante de connaître la vérité mais les paroles sortaient trop lentement de la bouche de la femme dont le cœur palpitait.

-Il va bien, mais il m'a envoyé vous chercher. Vous n'étiez pas dans votre chambre quand j'y suis allée et je vous cherchais partout!

Hélène se maudit alors de ne pas avoir obéit encore un peu. Elle aurait du rester là-bas sans prendre l'initiative de chercher par elle même dans un labyrinthe abominable

-Oh mais je vous en prie dites-moi! Qu'arrive-t-il?
-Votre mari, il s'apprête à commettre l'irréparable. Il va se battre en duel avec le frère de l'homme qu'il a battu hier.

L'horreur s'empara d'Hélène:

-L'homme est mort?!
-Non, mais il s'en est fallut de peu. Cependant ce qu'il lui a fait a bafoué l'honneur de sa famille. Son frère a demandé réparation à l'aube.
-Mais le Roi a interdit les duels!
-Cela ne change rien. Votre époux ne m'apprécie pas mais je sais que l'honneur est primordial pour lui. Il n'aurait pas laissé son nom être traîné dans la boue en refusant de se battre. Guillaume est son témoin. Il a essayé de l'en dissuader mais cela n'a servi à rien et le duc a refusé de vous faire prévenir. Guillaume a eu le temps de me parler, il espère que vous pourrez le résonner.
-Où sont-ils?!
-A l'Ouest des Jardins, à l'orée de la forêt. Un cheval vous attend près des portes, allez-y, vite!

Sans réfléchir davantage, Hélène se précipita dans le couloir que lui indiqua d'un geste de la main Grace. Elle courait à perdre haleine, oubliant son corset, sa robe et les convenances. Elle sortit par une petite porte et en effet, un cheval l'attendait. Le serviteur qui tenait la bride l'aida à monter, et aussitôt, elle partit au galop.
La terreur de monter à cheval après ce qui s'était passé ne lui traversa même pas l'esprit. Elle fonçait à toute allure vers l'endroit indiqué par Grace.
Elle ne voulait pas que Philippe se fasse tuer. Elle ne voulait pas non plus qu'il tue un autre homme et finisse en prison pour un duel interdit. Elle aurait ainsi été débarrassée de lui mais que serait-elle devenue alors? Sans enfant, tout reviendrait à Arthur. Retourner chez ses parents était hors de question.
Tout en galopant, elle se convainquait qu'elle faisait ça pour elle, par égoïsme, qu'elle se moquait bien du sort de son mari. Mais en réalité, ce sort lui importait. Et elle galopait pour que celui-ci ne devienne pas funeste, parce que sans le savoir, une infime partie d'elle commençait à tenir à Philippe.

Épées et BaisersWhere stories live. Discover now