Episode 6 - Chapitre 15 : Linée et Téa ; L'espoir avait un terme

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Du point de vue de Linée.

Revenons un peu en arrière. Le procès s'était achevé par les propositions de jugement de la seigneuresse. Chaque proposition était fondée sur le même modèle mais avec un niveau différent de gravité. Elles étaient au nombre de cinq.

La première consistait en une peine de prison pour Téa, un acquittement pour Linée et l'équipage de Körl, et en une restitution du bateau de l'équipage d'Aben à ses propriétaires initiaux.

La deuxième était en tout point semblable à la première, à l'exception qu'elle proposait une peine de travaux forcés pour Téa.

La troisième était égale aux deux premières, mais condamnait cette fois Téa à être pendue.

La quatrième, c'était la condamnation à mort pour Téa et la peine de prison pour Körl et Linée, ainsi que la confiscation du bateau de l'équipage d'Aben par la seigneurie de Nelenvaï.

Enfin, la dernière était pareille à la précédente, à ceci près que Körl et Linée étaient soumis à une peine de travaux forcés.


Au moment où Linée, Hedvin et Téa entendirent ce jugement, ils restèrent abasourdis. Pour la majorité des propositions, Téa devait être condamnée à mort. Linée tenta de la rassurer, prétendant que, peut-être, les grands marchands allaient choisir la première ou la deuxième option, qu'après tout cela semblait le plus raisonnable. Et ces mots furent les avants dernières paroles qu'elles échangèrent.

On les sépara. Téa fut reconduite au cachot. Linée et Körl, également concernés par le rendu du jugement, furent quant à eux retenus dans une pièce annexe. Hedvin accompagna Linée.

Le conseil des grands marchands, censé décider de leur sort, se fit à huis clos, dans l'après-midi. Hedvin n'avait pas le droit d'y assister. D'ailleurs il ne savait même pas où il avait lieu. Ce fait leur apparaissait à présent dans toute son aberration. Les grands marchands ne bénéficieraient que d'un compte rendu écrit, ils n'avaient pas siégé au procès, on ne pourrait pas argumenter devant eux ni répondre à leurs interrogations, et pourtant, le pouvoir de décider de la vie ou de la mort de Téa leur était donné.


Assis sur un banc, Hedvin et Linée attendirent. La proximité de Körl et Veb leur était désagréable. Une atmosphère pénible, silencieuse, régnait dans la pièce exiguë, où les accusés coudoyaient leurs surveillants. Ils tentèrent de se renseigner sur le déroulement des discussions auprès des gardes, mais ces derniers n'en savaient pas plus qu'eux.


Le temps parut bientôt si long qu'Hedvin hasarda des démarches auprès des connaissances qu'il avait sur le galion, mais personne ne put l'aider. Il hésita à se rendre au château de l'île de Naï – une grande bâtisse en bois connue des habitants de l'île – mais la goutte le faisait trop souffrir pour qu'il y marchât sans assistance.


Le jugement devait être rendu. Seulement, les heures défilaient, et on ne leur annonçait rien.

Enfin, le garde Phelom apparut dans l'embrasure de la porte, la mine grave. L'un de ses collègues s'écarta pour le laisser passer.

- Avez-vous des nouvelles ? s'empressa Hedvin.

Phelom semblait contrit. Il se rangea sur le côté, pendant qu'un autre personnage entrait dans la pièce. C'était le greffier du procès, succédé d'un groupe de gardes. L'homme, tout de noir vêtu, avait l'air sévère. Il tenait un feuillet. Par réflexe, Linée se leva, suivie d'Hedvin, Veb et Körl.

Le Pêcheur et le MeunierWhere stories live. Discover now