XX. Le conseil

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J'ouvre les grandes portes en fer, le cœur battant.

Je me retrouve devant ce qui semble être un conseil, de nombreuses personnes sont assises autour d'une grande table, dans une énorme salle ne possédant aucun autre meuble.

Le même gris martial, caractérisant les gardiens, recouvre toute la salle.

Il n'y a presque que des hommes assis là. La seule femme étant Marie-Lise, qui trône calmement à côté de mon oncle, qui lui occupe le siège central.

Un peu comme Arthur avec les chevaliers de la table ronde, en plus moderne. Mais je ne suis pas un chevalier. De toute évidence, je ne cherche pas le Graal.

Je remarque aussi Adrian parmi les personnes présentes. Les autres sont probablement des gardiens, variant de tout âge. Au total une vingtaine de visages me regardent fixement.

Je m'approche de la table et y pose mes poings, toujours debout. Un détail me dérange depuis tout à l'heure.

Je continue de sonder la salle, tout en prenant la parole dans ce profond silence, d'une voix légèrement hésitante.

Nyla - Bonjour mon oncle.

Gilles - Bonjour Nyla, comment te portes-tu depuis ton départ ?

Je vois bien que mon départ l'attriste, mais il respecte mes choix. Il ne m'a jamais obligé à rester, même si la place des maîtres du temps se trouve au château.

Nyla - A merveille. Mais parlons plutôt de ce conseil...

Toutes les personnes présentent écoute silencieusement notre échange, même si j'entends les plus téméraires commenter à voix basse.

Nyla - Pour commencer, où est l'élue ?

Un silence tendu s'installe dans la salle, il semble que je viens de toucher un point sensible.

Gilles - Elle a été enlevé.

Mon sang se glace dans mes veines et la peur parcourt mon échine. Enlevée ?

Nyla - Mais pourquoi ?

Marie-Lise - Nyla, le sang de l'Elue est très précieux. Si quelqu'un verse son sang dans le sablier, il pourrait alors contrôler le passé et donc changer le monde tel qu'il est aujourd'hui.

Mes poings se crispent sur la table.

Tout est de ma faute.

Nyla - Qui l'a enlevée ?

Gilles - Nous ne savons pas.

Nyla - Où se trouve le sablier de Chronos ?

Gilles - En Grèce.

La culpabilité monte en moi, je suis la seule à savoir qu'Alicia n'est sûrement pas l'élue. Je l'ai mise en danger, en danger de mort.

Nyla - Je vais la chercher.

Gilles - Tu es folle ! Je mis oppose formellement.

Je frappe du point sur la table, la rage et la tristesse m'envahissant complètement.

Nyla - Vous ne comprenez pas ! Tout est de ma faute !

Gilles - Mais comment ça ? Qu'est-ce que tu racontes.

Nyla - Vous vous êtes trompés sur toute la ligne, elle n'est pas l'élue ! Je suis bien plus puissante qu'elle. Adrian peut le prouver, je la fige quand j'arrête le temps ! Elle est faible. Du moins, son pouvoir est faible. Par ma faute elle s'est faite enlever. Je ne veux pas avoir le sang d'une innocente sur les mains. Alors encore une fois je le répète, je vais la chercher.

Je regarde Marie-Lise dans les yeux, cherchant du secours, elle m'a appris toutes ces choses, seule elle peut comprendre mon raisonnement.

M.L - Si ce que la petite dit est vrai, alors Alicia n'est pas l'élue, et je ne sais pas ce qui se passera si son sang se retrouve dans le sablier. Peut-être rien, juste se transformer en sable du temps... ou peut-être bien pire, il pourrait casser le sablier !

Tout le monde reste abasourdi par mes révélations et par la déduction de Marie-Lise. Nous nous lançons un regard entendu, partageant le même point de vue.

Mon oncle semble totalement perdu au milieu de ce flux de nouvelles informations.

Gilles - Mais... Mais... Tu n'es pas formée, tu ne peux pas te défendre seule, tu es bien trop précieuse pour la communauté... et puis tu n'as même pas de gardien.

Je me redresse, furieuse. Mais que leur faut-il à la fin ? Le temps presse. Je ne veux pas être l'élue, je ne réponds pas à une grande destinée. Mais de là, à laisser la vie de quelqu'un... Jamais !

Je prends mon courage à deux mains et monte sur une chaise vide, laissant parler mon cœur.

Nyla - J'irais que vous le vouliez ou non. Je ne suis pas une héroïne, je ne suis pas la personne que vous attendez que je sois, je ne serai pas votre élue ! Je ne réponds pas aux prophéties, ni aux quêtes héroïques... Vous voulez que je sois quelqu'un, vous le voulez n'est-ce pas ? Très bien. Je serai quelqu'un. Je m'auto-proclame, comme la fille de Chronos ! Le plus puissant de tous les maîtres du temps.
Cela ne vous suffit pas. Pour celer l'alliance avec la communauté des gardiens, il me faut un protecteur, n'est-ce pas ?

Je saute de ma chaise, tout le monde reste muet devant mon discours. Mes actions sont guidées par la rage qui parcourt tout mon corps comme une puissante vague d'adrénaline. Personne n'ose s'opposer à moi. Je marche d'un pas décidé. J'arrive devant Adrian.

Je prends le risque regretter mes actes toute ma vie, mais tant pis. Je sais ce que je dois faire, au péril de ma liberté qui m'est si chère.

Nyla – Lève-toi.

Il le fait sans discuter et se retrouve face à moi.

Je sors mon petit couteau et m'ouvre d'un coup sec, sans hésiter un seul instant, la paume de la main. Le sange afflue en masse mais je n'y fais pas attention.

Je prends la main d'Adrian que j'entaille à son tour, il ne sourcille même pas devant la douleur, il se contente de me regarder.

Je prends sa main dans la mienne, mélangeant ainsi nos sangs. Je pose un genou à terre et le regarde droit dans les yeux.

Nyla - Moi, Nyla Dimena, Maître du temps, par les pouvoirs que me confère la communauté des gardiens, je te choisis toi, Adrian d'Ambroise, comme gardien. Je te jure fidélité et te confie ma vie.

Adrian soutient mon regard. À son tour, il pose un genou à terre et me lance un regard confiant. Est-ce qu'il va accepter de lier sa vie à la mienne jusqu'à sa mort ?

Je joue un vrai coup de poker, seul l'avenir me dira si tout ceci en vaut la peine.

Adrian - Moi, Adrian d'Ambroise, gardien, te jure loyauté et allégeance, devant la communauté des gardiens. Je promets de te servir toi, Nyla Dimena, puissant maître du temps et fille de Chronos, et de te protéger en dépit de ma propre vie, jusqu'à ce que la mort nous sépare.

Un immense pouvoir imprègne nos deux corps. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, pendant qu'un halo de sable doré nous entoure. Cette vague de pouvoir disparaît peu à peu, entraînant avec elle toutes mes forces et mon énergie.

Je sens mon corps devenir lourd. Ma tête heurte violemment le sol, pendant que mon esprit laisse place à mon inconscience.

Les Maîtres Du TempsWhere stories live. Discover now