LVIII. La fuite continue

1.5K 170 5
                                    

"- Il sont là !!!"

les ennuis continuent apparemment...

Paul et moi échangeons un regard alors que des pas se font entendre, arrivant dans notre direction.

Bon, je prends les choses en main.

Je regarde la forêt. Il parait que seul les gardiens connaissent l'existence du Cor Saltum.

J'attrape le poignet du jeune homme et l'entraine dans une course folle en direction de la sombre forêt.

Pas une seule fois je ne me retourne sur nos poursuivants, mon seul but étant de parcourir la distance qui nous sépare de la forêt.

Une fois dans celle-ci nous les sèmerons plus facilement.

Il ne faut surtout pas regarder en arrière.

Si je me retourne, ils me reconnaîtront et j'aurais des nouvelles de mon oncle.

Super réputation dans tout le château.

Vous imaginez ?

"LA FILLE QUI A CAMBRIOLÉ LA CUISINE AVEC SON COMPLICE NE LAISSANT QUE DE LA MOUSSE DERRIÈRE EUX, N'EST AUTRE QUE LA NIÈCE DU COMTE DIMENA"

on a vu mieux.

L'heure n'est pas à penser au pire, contentons-nous de courir.

Le bruit de nos souffles haletants se mêlent à celui de nos pieds battant le sol à vive allure.
Ma gorge me brûle et mes muscles contractés commencent à me faire souffrir. Je n'ai pas couru depuis longtemps, et Paul à l'air de ne pas être dans un meilleur état.

Mais nous ne baissons pas le rythme car la forêt n'est plus qu'a quelques mètres et nos poursuivants commencent à se rapprocher dangereusement.

Enfin nous passons la limite de la forêt. Je pousse un soupire intérieur, heureuse d'avoir enfin atteint le cocon rassurant des arbres.

N'ayant toujours pas lâché la main de Paul, je slalome entre les grands troncs, le jeune homme sur mes talons.

Je n'entends plus les pas derrière nous, ce qui ne me rassure au contraire, pas du tout.

Je continue sans m'arrêter, suivant comme seul guide le grand arbre dépassant largement les autres.

J'entends un cris de douleurs.

Je n'ai pas le temps de me retourner pour voir que Paul, qui s'est pris le pied dans une racine, s'écroule sur moi. Ainsi je suis emmener dans sa chute et mon corps rencontre bientôt le sol froid de la forêt.

Nous sommes tombés juste à côté d'un buisson, face contre terre. Le torse de Paul bloque mon dos, m'empêchant tout mouvement.

Je tente de protester pour qu'il bouge, mais alors que j'expire de l'air pour commencer ma phrase, il me stoppe dans mon élan en mettant sa main devant ma bouche.

L'incompréhension commence à me gagner.

Paul rapproche sa bouche de mon oreille pour me murmurer quelques mots, sa respiration chaude et encore haletante fait frissonner mon cou.

Point de vue de Paul.

La main brûlante de Nyla serre la mienne alors que je tente de suivre le rythme effréné de notre course à travers les arbres.

Mes muscles me font souffrir le martyre et ma respiration accelérée se transforme en buée devant mon visage. mais malgré cela, je ne quitte pas des yeux la chevelure brune qui voltige devant moi au rythme de nos pas.

Mais alors que je suis concentré sur ma course, mon pied se prend dans une racine, m'arrachant un cri de douleur. Je perds l'équilibre. Mon corps s'étale de tout son long sur celui de Nyla.

Il me faut quelques secondes pour reprendre mes esprits, sentant l'impatience de Nyla sous moi.

Alors que m'apprête à me relever j'entends des voix et replaque mon corps contre le sien.

Elle ne semble pas avoir repéré les autres personnes et s'apprête à protester.

Sans réfléchir, je la stoppe dans son élan en plaquant ma main sur sa bouche, alors qu'elle sursaute d'incompréhension.

J'approche mes lèvres de son oreille et murmure le plus doucement possible, presque dans un souffle.

"- Ne bouge surtout pas. Nous ne sommes pas seuls..."

Heureusement la chance est avec nous, car un haut buisson duveteux nous séparent des personnes que je n'arrive pas à distinguer à cause de la pénombre.

"- où sont ces deux voleurs ? Demande une voix frustrée.

- ils ne doivent pas être très loin... On aurait du prendre les chiens ça aurait été beaucoup plus simple !

- Le temps nous a pris de court. Grommèle le premier."

Je me rends compte que le temps peut être autant un allié, qu'un véritable ennemi...
Je me reconcentre sur leur discussion, Nyla en dessous de moi c'est arrêté de bouger. Elle retient sa respiration avec le visage collé au sol, tout comme moi, elle ne perd pas un mot de la conversation des deux hommes.

"- bon nous reviendrons les chercher plus tard, ça ne sert à rien dans la nuit noire.

- je suis épuisé je n'ai qu'une envie c'est d'un bon lit moelleux...

- allez rentrons."

Nous écoutons le bruit des pas qui s'éloignent et poussons un soupire commun de soulagement. Nous restons par sûreté encore quelques minutes sans bouger un seul muscle.

Nous nous relevons dans un profond silence, tout en discrétion, reprenant notre marche. Mais cette fois-ci à pas de loup, sans un mot, nous n'echangeons que des regards dans une discussion muette.

Comme toujours Nyla ouvre la marche, avançant d'un pas assuré en balançant discrètement les épaules.

La grande clairière du Cor Saltum finit par apparaître devant nous, le grand arbre toujours aussi majestueux sous l'éclat de la lune.

Je murmure à voix basse, presque pour moi-même.

"- Cet endroit me rappelle des souvenirs pas si lointain..."

Elle pose la main sur un tonneau de bière vide, ses yeux regardant distraitement l'arbre en face de nous.

"- Moi aussi, tu n'imagines pas. Murmure-t-elle à son tour. "

Elle marche vers l'arbre et commence à escalader aisément le tronc, avant de se poser sur une grosse branche accueillante, plutôt haute.

Je la rejoins, et grimpe sur l'énorme chêne avec moins de facilité, sortant à peine de ma période de sommeil.

Je me choisis une branche plutôt près de celle de la jeune maître du temps, collant mon dos contre le tronc, mes jambes se balançant dans le vide de chaque côté.

Nous regardons le ciel étoilé au dessus de nous, contemplant ce spectacle dans un profond silence, juste perturbé par le bruissement des feuilles.

Nyla trouble ce silence de sa voix douce et calme.

"- j'ai bien peur que l'on doivent passer la nuit ici.

- Qu'importe. De toute façon entre une chambre d'hôpital et un arbre offrant une vue magnifique, le choix ne se pose pas.

- vu sous cette angle. Admet-elle avec douceur. "

Soudain elle tourne la tête vers moi avec un sourire malicieux.

"- Je n'imagine pas la tête de la cuisine en ce moment... ! "

Nous partageons un rire commun dans la nuit noire, nous rappelant de notre dernière visite des cuisines... Plutôt mousseuse.

Les Maîtres Du TempsWhere stories live. Discover now