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Chapitre 12 : Secrets de loup

J'ai mal. Grands dieux que j'ai mal. J'ai l'impression que Cyrus s'amuse à me déchirer l'épaule, encore et encore, même après que nous ayons fui la forêt.

Où est-ce que je suis, au juste ?

Je regarde autour de moi. Je réalise que je porte une chemise à carreaux rouges, une jupe à moitié déchirée, des converses... Berk. Je déteste cette tenue. Mais c'est la préférée de Thomas.

Oh non... ça y est, je reconnais l'endroit. Cette plage près du Disney World, à Orlando. Le bruit de la mer, les mouettes, le soleil qui brûle ma peau...

Si je ne me trompe pas, alors...

« Ethel !

-Thomas ! »

Tout se déroule comme un film à la bobine bien huilée. Comme à chaque fois que je revis cette scène, Thomas arrive derrière moi. Je me retourne, et je tombe une nouvelle fois amoureuse de son sourire ravageur, de ses cheveux bruns qui volètent dans le vent marin, à ses yeux d'un brun profond.

Comme d'habitude, je me sens courir vers lui, docile, gênée par la jupe qui décidément ne me va pas du tout. Mais lui croise les bras, au lieu de me les ouvrir.

« Non, Ethel. J'ai quelque chose à te dire... »

Le vent souffle dans ma jupe hideuse. Je connais les moindres détails de cette scène : la joggeuse qui passe dans le fond, le vieux qui promène son chien. Comme d'habitude, je n'entends pas ce que Thomas raconte : le choc de ce qu'il m'annonce m'empêche d'entendre, à chaque fois.

En revanche, je me souviens très bien de ce que je lui réponds.

« Une autre... fille ?

-Tu n'es plus aussi disponible qu'avant, Ethel. Et surtout, tu persistes à vouloir t'accrocher à tes anciens principes, comme ta famille qui t'empêche de déployer tes ailes. Combien de fois t'ai-je dit de te débarrasser de cette bague en argent ?

-Elle... Elle me protège... je bégaye, connaissant la moindre de mes paroles comme le texte d'une pièce de théâtre. Et puis... j'ai changé ! J'ai sacrifié des choses pour toi ! Je...

-Tu ne m'as pas assez écouté. » répond Thomas.

Une mouette vole au-dessus de nos têtes comme un rapace. Le battement de ses ailes m'est si familier... Comme d'habitude, je lève la tête pour la regarder et retenir mes larmes. Quand je la baisse à nouveau, je sursaute violemment. Thomas n'est plus Thomas. Il est devenu Ryan.

« Moi, je savais ce qui était bon pour toi... »

Il s'avance d'un pas vers moi, me prends les mains. Ses paumes masculines sont devenues les mains fines et ridées de Grand-Mère.

« ...mais tu ne m'as pas écouté. Cela m'a fait réaliser que nous ne pouvons plus avancer ensemble... »

Le ciel s'assombrit, et tout à coup, Thomas est à nouveau devant moi, tenant mes mains dans les siennes. Mais subitement, ses yeux deviennent ambrés, et un sourire orné de crocs ourle ses lèvres. Je sens ses griffes s'enfoncer dans ma peau, sans que je ne puisse rien y faire. Le vent souffle dans ses cheveux bruns, qui deviennent subitement blond vénitien. Cyrus.

« ...et j'ai réalisé que tu étais condamnée à être seule. Je suis désolé. »

Sa voix grave résonne dans mes oreilles alors que je le toise avec horreur. Je vois sa main griffue se lever haut dans le ciel, son ombre me faisant sentir minuscule. Et tout à coup, ces griffes semblables à une faux s'abattent sur mon épaule. La dernière image que je vois est le sourire attristé de Mahu, après avoir perdu sa mère.