Chapitre 33 : Futurs Primes

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« Bien, Ethel ! » applaudit ma mère.

Je pousse un souffle avant de m'étirer. Je secoue la tête comme pour m'ébrouer en regardant le mannequin de paille, en forme de chien, tomber sur le sol forestier factice de la salle d'entraînement, sous la force de mon lancer de couteau. La cible était en mouvement grâce à un système électronique, pourtant la lame lui a atterri en plein dans son flanc. De quoi percer le cœur, ou du moins un poumon, à une vraie bête de chair et de sang.

« C'est ton quatrième mannequin, tu veux peut-être faire une pause, ou... commence ma mère.

-Youri ! j'appelle. On travaille le corps à corps ! »

Je n'adresse même pas un regard à ma mère, mais je sais déjà qu'elle sourit de toutes ses dents. Je me dirige vers le grand brun qui affiche une expression étonnée.

« Encore ? Tu vas finir par te claquer un muscle... Et comme Ryan t'imite, depuis ce matin, il y a de fortes chances pour que ça lui arrive aussi.

-Tant mieux. C'est précisément ce que je lui souhaite de lui arriver. Comme ça... »

Je lève les yeux vers Youri, sur l'air de la confidence. Le brun lève un sourcil, amusé.

« ...L'ordre aura enfin un chasseur Prime compétent à sa tête, si tu vois ce que je veux dire.

-Si tu le prends comme ça... Fais attention, malgré tout. Le Prime n'est désigné que ce soir, d'après la décision de l'ordre. 

-En attendant, ne me ménage pas. »

Youri se met en position de combat, enfilant les mêmes griffes de métal que mon premier jour parmi les chasseurs. Mes muscles hurlent au scandale face à cet effort supplémentaire, mais je m'en moque. Je pousse un long souffle avant de lever mon pied vers son visage, prête au combat, bague en argent au poing.

Le combat est tout ce qu'il me reste.

Trois jours ont passé et je ne suis pas revenue à la résistance. Comment aurais-je pu ? On m'aurait tuée. Mais pire que d'être tuée, j'aurais dû affronter le regard plein de mépris de Tobias. Cela fait trois jours que je ne l'ai pas vu, et trois jours que je le vois partout, des images de ma mère de différents loups identifiés dans la région aux loups factices ramenés par les renforts mobilisés par Mr. Jones pour mon entraînement.

Cela fait trois jours que je suis revenue d'Eola Park en larmes, à l'incompréhension générale. Mon père, compréhensif, a affirmé que mes larmes étaient à mettre sur le compte de l'émotion de ma première « véritable chasse au loup-garou », selon ses mots, bien que ni Ryan ni moi n'en ayons abattu un seul. Si seulement c'était le cas...

Inutile de dire que ni moi, ni Ryan ne sommes pas revenus à la résistance. Impossible. Ils m'auraient fait payer le prix de ma trahison, moi encore plus que Ryan, pour leur avoir caché mon appartenance à une famille de chasseurs, et pour avoir rejoint les rangs ennemis en cachette. J'aurais presque pu accepter mon sort, si il n'y avait pas Tobias à la résistance, prêt à m'accueillir avec le même regard méprisant que celui qu'il m'a lancé à Eola Park.

Je m'attendais presque à voir Alma ou Riley venir me chercher pour me faire répondre de mes actes. Mais rien. Pourtant, connaissant la droiture de Mahu, elle a dû me dénoncer à coup sûr.

Youri manque de m'attraper et ses griffes de métal ratent de près ma marque. Chez les chasseurs, tout le monde pense qu'il s'agit d'un tatouage, un tatouage récent de surcroît. Cela expliquerait pourquoi est-ce que je frémis à chaque fois qu'on la touche – mais en réalité, c'est surtout parce qu'elle est affreusement sensible. Rien que la bretelle de mon débardeur m'inflige un pincement permanent à cause de son contact avec la marque me liant à Tobias.

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