~ Chapitre 68

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/ je vous invite à lire le chapitre avec la chanson posée ci-dessus ;) /

À peine levée, j'ai les yeux bouffis et la gorge sèche. Aujourd'hui, je pars du campus. J'étais censée m'en aller dans une semaine, mais mes parents se sont trompés de billet. Enfin bref, je pars trois fois plus tôt et rien que de penser à cette idée, j'ai envie de chialer. J'ai préparé tous mes bagages hier soir, et Ethan m'a particulièrement évitée, moi, Hadrien et tous mes amis durant ces derniers jours. Personne n'est inconnu à notre rupture, et quand je sors, j'ai le droit à quelques regards doux de compréhension. J'ai trouvé ça gentil au début, mais en fait ils ne savent rien. Ils ne savent pas comment je souffre, comment j'ai essayé de sourire cette semaine et faire comme si la douleur s'était atténuée. Mais quand je me retrouve avec mes meilleurs amis, je m'autorise enfin à dire vraiment ce que je ressens, et généralement je finis en sanglots, lorsque j'explique qu'aujourd'hui je l'ai vu parler avec une jolie fille ou rire avec une meuf de la troupe de théâtre. Ça m'épuise, et puis certains jours je me dis que ça tombe à pic que je parte. Mais juste après je repense à tous les fous rires que j'ai piqué en classe alors que je devais être silencieuse, à mes baignades avec Élisa dans le lac, et ces nuits passées à la belle étoile avec Sam et Brooklyn. Et toutes mes peines s'effacent, temporairement. Je me dis que l'année prochaine ce ne sera pas pareil, mais je pourrais inventer de nouvelles conneries à faire, et puis j'aurai grandi et trouvé encore de nouveaux amis. Peut-être que mon amour pour Ethan aura disparu, peut-être que j'irai mieux.

Je reçois un message d'Hadrien, qui me dit de me préparer rapidement car un taxi arrive dans 30 minutes. Je ferme mon téléphone en silence, interdite, et enfile un énorme sweat et un legging. J'attache mes cheveux, et glisse mes grosses lunettes sur mon nez. Je m'installe  en tailleurs par terre et caresse longuement Hurricane qui paraît aussi triste que moi. Il sent le départ qui approche. Je touche doucement son museau, je remonte mon doigt jusqu'en haut de sa tête et ressens une profonde nostalgie. Un vide qui va rester pas mal de temps, alors autant devenir amis. Je me lève et observe ma chambre rangée, nettoyée de tous mes posters et de mes peintures. J'analyse l'endroit où j'avais posé mon hamac au début de l'année, et le meuble qui me permettait de monter à la fenêtre du toit.

Je prends mon coussin, fixe les lieux une dernière fois, et appelle mon chien pour qu'on quitte la chambre. C'est une sensation si étrange qui règne dans mon cœur, lourd comme un piano.

En descendant les escaliers, je croise Ethan. Il me regarde avec tristesse. Il sait que je m'en vais. Son visage a prit quelques cernes ces jours-ci, mais il ne perd rien de son charme. Je me rappelle avoir prit honteusement la feuille des paroles de notre chanson dans mon sac. Histoire de le sentir encore avec moi, même à Paris.

« - Je vais t'accompagner jusqu'au taxi. », me propose t'il en tentant de sourire.

Je hoche la tête lentement, interdite, et vais en bas pour rassembler mes valises. Je sors de la maison, accompagnée d'Ethan qui reste à côté de moi, silencieux. Le trajet est long dans ce blanc impeccable, qui veut en réalité tout dire. Plus d'une fois, je sens sa main chaude frôler la mienne, comme s'il souhaitait la tenir. Et à chaque fois, tout s'emballe dans mon cœur, dans mon corps. Je ferme les yeux et les rouvre avec une grande inspiration, plus forte que la seconde précédente.

À l'accueil se trouvent tous nos amis. Hadrien est aussi présent, car il part évidemment avec moi. Il paraît tout aussi désespéré que moi, peut-être même plus. C'est la dernière fois qu'il vient dans cet endroit, ou du moins pour étudier. Je n'imagine même pas ce qu'il doit ressentir. Mon frère a les larmes aux yeux, et remercie tous les surveillants qui sont présents.

« - Vous allez me manquer, crâne d'oe... Monsieur. », je l'entends dire tandis que je ris doucement.

J'ai à peine le temps de faire un geste que Brooklyn fonce sur moi et me prends dans ses bras. C'est une étreinte si attachante, une étreinte que je ne veux jamais oublier. Elle représente tout l'amour que je lui porte, alors que je la serre à m'en faire mal aux mains.

« - On est obligées de se faire des Skype tous le jours. », me murmure t'elle à l'oreille.

« - Sinon, fessée. », j'arrive à bredouiller alors que j'entremêle rire et larmes qui coulent toutes seules.

« - Ça se fait des câlins sans moi ? », arrive Sam en tendant les bras.

« - Viens là. »

Il nous fait une énorme embrassade et se tourne vers moi :

« - Merci pour cette année fantastique. Ça a été la meilleure de toute ma vie. »

« - Et ce n'est certainement pas la dernière ! À l'année prochaine, mes partners in crime. »

« - À l'année prochaine, bouffonne. », sourit Brooklyn.

Je me tourne ensuite vers Oli et Élisa, qui ont tous deux les larmes aux yeux. Ils s'en vont demain, je crois que mon départ les projette déjà.

« - Vous allez me manquer, vous. »

« - Toi aussi, gamine. », rigole Oli avec une petite voix. « - T'es incroyable. Tu viendras visiter mon appart, hein ? »

« - Évidemment. On se refera pleins de soirées, et puis, j'ai hâte de te revoir pleurer devant Orgueils et Préjugés. », j'ajoute en lui donnant un petit coup de poing dans l'épaule.

« - Quand j'irai mal, je penserai à toi en étant bourrée et ça ira mieux. », intervient Élisa en me prenant immédiatement dans ses bras.

« - Ce n'est point le devoir d'une marraine, enfin. »

« - Bas les couilles, ma Roro. »

« - Ah, je crois qu'il y a un certain jeune homme derrière toi. », dit Oli avec une voix de premier de la classe, le doigt levé.

Surprise, je découvre Natoo.

« - Salut ? », dit-il d'un air un peu gêné.

« - Coucou, toi. »

« - À l'année prochaine. Je sais que tout s'est pas passé comme prévu cette année, mais j'ai été heureux de te connaître. »

« - Moi aussi. », dis-je les larmes aux yeux.

Je lui tends la main en un énorme sourire, les lèvres serrées, et il la prend sans hésiter.

« - Romane, on doit y aller ! »

« - J'arrive ! », je m'exclame en faisant un dernier tour devant l'infirmière qui se tient derrière. « - Merci d'avoir soigné tous mes bleus quand je rentrais de la boxe, madame ! »

Je souris une dernière fois et monte en coiffant dans le taxi. Je vérifie toutes mes affaires, le fait que Hurricane soit bien présent... Tout a l'air bon. Alors que la voiture démarre, je jette un dernier coup d'œil à travers la vitre à toutes les personnes rassemblées rien que pour nous. Le taxi avance lentement puis prend de la vitesse. La seule chose qui me choque le plus, là, juste sous mes yeux, c'est la silhouette d'Ethan, debout, les bras ballants, devant le portail en nous regardant nous éloigner. Je ne lui ai même pas dit au revoir. Ni que je l'aimais pour une dernière fois. Je crois bien que je ne le reverrai plus jamais.

****

Dans l'avion, j'installe ma petite couette sur moi, et place mon oreiller derrière ma tête. Hadrien est à côté de moi, et paraît réellement pensif. J'enlève mes écouteurs, et me tourne vers lui.

« - Pas trop dur ? »

« - Si. Plus que ce que je pensais. »

« - Et Brooklyn ? Vous allez faire comment ? »

« - On va se rendre visite chacun dès qu'on peut. », sourit-il rien qu'en pensant à sa petite amie.

« - Tu l'aimes ? », je demande d'une voix remplie de douceur.

« - Ouais, je pense bien que je suis tombé dans le piège. Et toi, Ethan ? Tu vas mieux ? »

« - Bof. Cette sensation dans mon ventre, en permanence, ça va s'en aller ? »

« - Ça va prendre du temps, mais oui. Le premier amour, c'est toujours bouleversant, sœurette. », dit-il en mettant un bras derrière ses épaules pour caler sa tête contre la mienne. « - Mais je suis là pour toi. Je t'aime. »

Before.Where stories live. Discover now