Le Solstice d'été (HB 2)

24

Alessio

  Je tendis la main pour tirer sur la boucle qui serpentait dans sa nuque, et qui était plus longue que les autres. Je parlai avant de réaliser ce que je disais.

─ J'ai essayé de vivre sans toi. Ben putain, la plupart du temps j'étais à la ramasse.

Dani écarquilla les yeux, puis se mordit la lèvre.

─ Tu sais je... je réfléchissais ce matin. Tu m'aimes vraiment, non ? demanda-t-elle, l'air timide tout à coup.

Je me contentai de rire en guise de réponse. Un rire jaune, pas joyeux du tout, plutôt désespéré.

─ Je veux dire, c'est le vrai truc, reprit Dani, prudemment. Depuis toujours. Depuis le temps où je te faisais cours et que tu étais au lycée.

─ Bien entendu, Dani. Tu comprends vraiment pas ce que je ressens pour toi, ou quoi ?

Je vis dans son regard qu'elle avait un peu peur de ce qu'elle s'apprêtait à me dire.

─ Viens ici, alors, fit-elle d'un ton léger. On pourrait heu... être ensemble. Habiter ensemble. Je compte pas rester chez ma mère éternellement, hein.

Mon cœur s'arrêta de battre.

─ Dani, j'ai rien contre Rio... au contraire. Mais je vois pas comment je pourrais vivre ici.

Elle hocha la tête avec empressement, comme si elle regrettait de m'avoir fait une telle proposition. Je posai la main sur son épaule.

─ Non, Dani, je suis pas clair. Ce que je veux dire c'est... maintenant que tu fais une thérapie et qu'on s'est mis d'accord pour se dire les choses, j'aimerais aussi qu'on soit plus proche que toi au Brésil et moi en France. C'est juste que... ben, je dois faire mon Master. J'ai déjà postulé pour plein d'écoles à Paris. Comment je pourrais venir ici ?

─ Oh...

L'expression de Dani se détendit.

─ Bien sûr, oui bah... dans... dans deux ans, alors.

─ Deux ans...! répétai-je, réalisant soudain.

Je poussai un sifflement.

─ Ben, oui, après ton Master, du coup.

─ En admettant que tout aille bien entre nous à ce moment-là, ce que personne ne peut garantir en fait, tu pourrais... attendre deux ans, Dani ? lui demandai-je, incertain.

C'était... un sacré engagement, pour une nana qui avait peur de l'engagement. J'étais sur le cul.

─ Ben pourquoi pas ? J'aurai vingt-neuf ans, toi vingt-quatre. C'est pas si mal, pour emménager ensemble. Mais bon, je dis ça mais en fait y'a tellement de choses qui peuvent se passer, en deux ans... on ne peut évidemment pas faire ça. Je peux pas te demander une chose pareille.

J'en étais sûr qu'elle n'était pas sûre d'elle. Je ne l'en blâmais pas. Je n'étais pas si sûr de moi non plus.

─ De toute façon, tu m'auras certainement oubliée d'ici là...

Cette phrase toute tremblante attira mon attention.

─ Qu'est-ce que tu racontes ? lui lançai-je. Comment je pourrais possiblement t'oublier ?

─ Tu fais tout pour, me rappela-t-elle d'un air douloureux.

─ Oh Dani... je suis incapable de me lasser de toi.