57 - 11 août 2018

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Stiles trouva Dean dans le garage, assis dans les escaliers surplombant toutes les voitures de collection des hommes de lettres. Il semblait perdu dans ses pensées, la tête appuyée contre le mur qui le soutenait, les yeux rivés sur un point fixe à l'horizon. Lorsque l'adolescent vint s'asseoir à ses côtés, il ne tarda cependant pas à comprendre que ce point que le chasseur fixait, c'était en fait deux magnifiques motos qui trônaient dans un coin du garage.

Ces motos, l'aîné Winchester lui avait promis qu'il lui apprendrait à les conduire et qu'ils pourraient tous deux aller se faire pousser par le vent sur le dos de ces superbes montures. Lorsque Stiles tourna de nouveau la tête vers Dean, il remarqua néanmoins une forme de déception dans ses grands yeux verts, comme s'il réalisait que le départ de Stiles était arrivé bien plus tôt qu'ils l'avaient tous deux prévu et qu'ils n'auraient bientôt plus l'occasion de faire tout ce qu'ils avaient planifié ensemble.

-Alors, t'as préparé tes bagages ? demanda le chasseur d'un ton qui parut amer aux oreilles de Stiles. T'es prêt à retourner à Beacon Hills ?

-Pas tout à fait, répliqua vaguement le garçon.

Dean se tourna vers lui pour la première fois depuis l'entrée de l'adolescent dans le garage et riva ses yeux dans ses prunelles ambrées, lui intimant ainsi silencieusement de s'expliquer au plus vite.

-Je viens d'annoncer à Scott que je ne retournerais pas avec eux à Beacon Hills, continua Stiles. Y a plus rien qui me retient là-bas à l'exception d'une panoplie de mauvais souvenirs et, à vrai dire, je n'avais pas l'intention d'y retourner à la minute où tu m'as sorti d'Eichen House après notre première rencontre. Ma place n'est plus à Beacon Hills depuis longtemps maintenant. Elle est avec Sam, elle est avec toi.

Dean soupira, comme déchiré par un combat intérieur. Il se passa négligemment une main sur le visage, comme s'il eut entretenu le vain espoir que cela puisse éclaircir ses idées, avant de se tourner de nouveau vers son fils. Une certaine tristesse illuminait toujours ses iris, mais son regard était fixe et déterminé.

-Je...Tu sais que c'est tout ce que je veux depuis qu'on se connait, que j'ai jamais rien voulu d'autre que reprendre le temps qu'on n'a pas pu passer ensemble pendant dix-neuf ans, mais...mais si tu restes avec moi aujourd'hui, tu vivrais la vie que Claudia et moi nous étions promis de ne jamais te donner. Va vivre ta vie d'adolescent, Stiles. Va reprendre l'année que tu as perdu à Eichen House en t'amusant avec tes copains, et puis retourne à l'école, fonde une famille avec Lydia, vis la vie que ta mère et moi n'avons jamais eu la chance de connaître ensemble. On n'aurait pas à couper définitivement les ponts, tu sais, mais tu serais déjà moins en danger en étant le plus loin possible de Sam et de moi.

-Tu crois vraiment que le surnaturel va me laisser tranquille si je m'éloigne de toi ? Je te ferais dire que cette malédiction qui pèse sur vos épaules, à Sam et toi, eh bien j'en ai hérité aussi ! Je ne pourrais pas vivre cette petite vie normale que tu me vantes tant même si je le voulais, mais justement je me mentirais à moi-même en prétendant que c'est ce que je veux. C'était peut-être ce que voulait Stiles Stilinski, mais je suis plus ce petit garçon effrayé qui recule face au danger, maintenant. Je suis un Winchester, et je suis prêt à embrasser ma destinée avec ton aide et celle de Sam. Vous êtes ma famille, et on n'abandonne pas sa famille.

Dean baissa les yeux, incapable de supporter davantage le regard de son fils, et il se passa de nouveau une main dans les cheveux pour reprendre ses esprits. Il semblait chercher un second argument pour réfuter les propos du garçon, mais ne trouva finalement rien d'autre à faire à part passer son bras autour des épaules de son fils pour le serrer contre lui.

-Comment ont réagi tes amis ?

-Je m'attendais pas à ce qu'ils comprennent ma décision, mais ils ont respecté mon choix en autant que je tienne ma promesse d'aller leur rendre visite dès que j'en ai l'occasion. Et puis, de toute manière, avec Lydia qui va bientôt devoir retourner au MIT, je serai beaucoup plus proche du Massachusetts si je m'établis ici.

-Avoue-le, au fond tout ça c'est pour la fille, rit doucement Dean pour taquiner Stiles.

Le garçon se joignit au rire du chasseur, puis tous deux se muèrent dans un silence confortable qui dura quelques minutes. Ils pouvaient encore entendre en sourdine la clameur du reste de la bande, qui se trouvait toujours dans la salle de séjour, mais à cet instant, rien d'autre n'avait d'importance pour le père et le fils. Chacun espérait même secrètement de ne jamais avoir à retourner parmi leurs congénères pour retrouver leurs rôles et leurs responsabilités.

-Alors qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? demanda finalement Dean d'une manière presque enfantine.

-Qu'est-ce que tu dirais de m'apprendre comment conduire cette moto comme tu me l'avais promis ? proposa Stiles en pointant les montures antiques d'un coup de menton, un sourire espiègle au coin des lèvres.

Pour toute réponse, l'aîné Winchester se releva et dévala les quelques marches menant aux véhicules de collection, aussitôt suivi par l'adolescent. Dean ouvrit une armoire accrochée au mur le plus proche, qui cachait toutes les clefs des engins ainsi que quelques casques de moto. Il retira l'un d'entre eux de son crochet et le lança à Stiles, qui l'attrapa en plein vol, puis fit de même avec un trousseau de clefs.

-C'est laquelle, celle-là ? demanda le garçon en jetant un coup d'œil à toutes les motos derrière eux.

-C'est celle-là, lui répondit Dean en pointant la plus belle, la plus splendide, la plus éblouissante d'entre elles. Elle te plaît ?

-T'es sérieux ? J'ai jamais rien vu d'aussi magnifique !

-Alors qu'est-ce que t'attends ? Monte dessus !

Dean se choisit un casque et un trousseau avant d'aller rejoindre son fils pour lui montrer comment conduire le véhicule et manipuler le levier d'embrayage, le levier de vitesse, l'accélérateur et le frein. Pour se familiariser avec les commandes, l'adolescent fit plusieurs allers-retours dans le garage en étant supervisé par Dean, jusqu'à ce que le chasseur convienne qu'il était temps d'aller tester son nouveau savoir-faire sur la route.

-T'en fais pas, y a aucun signe de vie autour du Bunker à des kilomètres à la ronde, alors tout ce que tu risquerais de frapper pendant notre balade, c'est une vache égarée.

Finalement, Stiles contrôla assez facilement la moto, et au bout de quelques minutes à peine de promenade, ce fut comme s'il avait toujours su comment conduire une telle monture. Le sourire aux lèvres, le garçon laissa le vent fouetter son visage et chatouiller sa peau tandis qu'il roulait côte à côte avec Dean. Il se sentait plus libre qu'il ne l'avait jamais été et il s'éprit rapidement d'une telle sensation. Le monde surnaturel n'existait plus, tout comme Beacon Hills, Eichen House, Hopkins et l'armée des morts. Tout ce qui existait à ses yeux à cet instant, c'était la constatation qu'il était bel et bien vivant et qu'il était libre de tout fardeau. Avant même de savoir ce qu'il faisait, Stiles réalisait qu'il criait de joie, clamant son affranchissement à tout ce qui avait pu le faire souffrir par le passé. Il se sentait bien. Il était heureux.

Dean ne manqua pas d'entendre les acclamations de son fils et il ne put s'empêcher de faire le rapprochement entre ce cri de joie et celui qu'il avait poussé lorsqu'il était enfin parvenu à s'évader d'Eichen House à peine quelques semaines plus tôt et, une fois de plus, le chasseur sentit une bouffée d'amour envahir chaque parcelle de son corps. Plus rien ne lui importerait plus que Stiles, dorénavant, et l'aîné Winchester se jura de veiller à son bonheur et à sa sécurité jusqu'à son dernier souffle. Juste avant de se joindre à son fils dans sa démonstration de joie et de s'époumoner à son tour, Dean se demanda vaguement si c'était ça l'instinct paternel. Dans tous les cas, le chasseur pouvait certifier n'avoir jamais été aussi heureux qu'en cet instant.


Instinct PaternelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant