Chapitre 33

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TW : abus sexuels (mention)

Le départ était prévu dans quatre jours. C'était un Jeremy un peu hagard qui en avait informé Isine le matin même. Il l'avait attendue alors qu'elle se rendait dans l'aile ouest pour retrouver Dzangher et l'emmener à leur entraînement matinal. Le maître espion l'avait conduite dans une chambre inoccupée. Là, il lui avait décrit le déroulement du voyage, lui apprenant qu'elle en ferait partie, ainsi qu'elle l'avait souhaité auprès de Sa Majesté, pour escorter le prisonnier jusqu'au monastère des Gorges Noires.

Elle apprit également qu'il lui faudrait renforcer la sécurité autour de Dzangher jusqu'au départ. Cela ne la surprit guère, compte tenu des questions que ce même maître espion était venu lui poser quelques jours plus tôt.

Elle lui assura qu'elle pouvait le surveiller au moins une nuit, mais qu'un remplaçant serait nécessaire, le temps pour elle de planifier sa mission. Et pour dormir, bien entendu. Jeremy hocha la tête, l'air absent.

La conversation était restée très professionnelle et n'avait pas duré plus d'une dizaine de minutes, mais cela avait suffi à Isine pour constater l'état inhabituel de son chef. Très pâle, les yeux cernés, il semblait accablé par une fatigue intense. À tel point qu'elle ne put s'empêcher de lui poser la question, une inquiétude sincère dans la voix.

Il lui avait répondu d'un ton sec avant de mettre fin à l'entretien et de quitter la pièce d'un pas raide.

Elle l'avait regardé s'éloigner dans le couloir, perplexe et vaguement soucieuse.

Mais elle avait fini par hausser les épaules. Elle avait suffisamment de sujets de préoccupation pour les jours à venir sans ajouter ceux de son supérieur à la liste. Après tout, ce n'était pas ses affaires.

Sortant à son tour de la chambre vide, elle partit au pas de course à la recherche d'un domestique pour communiquer ses premières consignes.

*

**

Quelques heures plus tard, quand elle pénétra dans la chambre, en nage, suivie d'un Dzangher tout aussi épuisé par leurs entraînements de plus en plus intenses, elle constata avec satisfaction qu'un lit de camp avait été ajouté, conformément à son souhait.

Dzangher, quant à lui, ne parut pas satisfait du tout en avisant l'objet.

— Qu'est-ce que c'est que ça ? s'enquit-il en s'approchant de la structure de toile sommaire entre deux tréteaux de bois.

— C'est un lit de camp, et je suis très étonnée que tu ne le reconnaisses pas.

— Je sais ce que c'est, répliqua-t-il avec humeur, mais qu'est-ce qu'il fait là ?

— Tu ne devines pas ? Il est pour moi.

Il se figea dans son inspection et pivota vers elle, une expression mi-angoissée, mi-irritée sur les traits.

— Pour toi ? Mais pourquoi ?

— Parce que, comme tu dois le savoir, le départ approche.

— Qu'est-ce que ça veut dire ?

Ce fut à son tour d'être étonnée par son ton agressif.

— Ça veut dire que le niveau de surveillance augmente, lâcha-t-elle d'un ton sec. Et inutile de me demander pourquoi.

— Je...

Il s'interrompit et son regard tomba une fois de plus sur le lit. Il déglutit et elle vit quelque chose changer sur son visage.

— Tu vas vraiment dormir ici ?

Elle s'appuya au mur et croisa les bras.

— Oui. Pourquoi ? Ça pose un problème ? C'est déjà arrivé, que je sache. Ce n'est pas comme si j'allais te sauter dessus.

Un jeu de rois et de pions 1 - Nous qui sommes des ombresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant