Chapitre 51

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[Avant-dernier chapitre, on y arrive ! Merci à toutes celles et tous ceux qui seront parvenus jusque là !!]

Salut, fit une voix inconnue.

Dzangher cligna plusieurs fois des yeux. Ses larmes avaient séché depuis longtemps, collant ses paupières, et il lui fallut quelques secondes pour que le monde ne retrouve sa netteté.

L'homme qui se tenait devant lui revint instantanément à sa mémoire. C'était celui qui les avait accompagnés lors de la rencontre, dans les montagnes. C'était un halfelin, comme lui, sensiblement du même âge. Ses traits étaient marqués par des rides profondes et une ombre dansait dans ses yeux alors qu'il le dévisageait. Dzangher reconnut sans peine les stigmates des combattants de la guerre des 600.

Comment s'appelait-il, déjà ?

— Salut, fit-il d'une voix rauque.

— Tu te souviens de moi ?

— Tu étais avec... (Il eut un geste vague de la main et son nom lui revint d'un coup.) Jeremy.

Jeremy hocha la tête.

— Lève-toi.

— Qui es-tu au juste ? grinça Dzangher sans bouger d'un poil. L'exécuteur de la reine en personne ?

Le maître espion haussa les épaules.

— Parfois. Mais pas aujourd'hui. Lève-toi. Nous n'avons pas beaucoup de temps.

— Pourquoi faire ? ricana l'ancien général. Je n'ai pas envie d'aller où que ce soit. Va-t'en, laisse-moi tranquille.

Jeremy croisa les bras.

— On m'a pourtant dit que tu voulais voir quelqu'un.

Dzangher sursauta et bondit sur ses pieds. Il arrivait à peine au niveau du menton de Jeremy, mais parvint quand même à le regarder droit dans les yeux. L'autre ne cilla même pas.

— Qui ?

— Je crois que tu le sais, répliqua Jeremy sans que son expression ne varie d'un iota. Suis-moi.

*

**

Les cachots étaient terriblement familiers aux yeux de l'ancien général. Tout le temps que dura la descente, il dut lutter contre des montées de panique et l'envie de s'enfuir le plus loin possible. Retourner là-bas était une torture.

Jeremy l'entraîna sans un mot dans des couloirs à peine éclairés et de toute évidence utilisés seulement de quelques élus, ce qui confirma les soupçons de Dzangher sur le rôle réel de Jeremy. Ils ne croisèrent personne et le maître espion ne s'arrêta ni ne se retourna une seule fois pour s'assurer que son invité le suivait bien.

Celui-ci avait le souffle court à cause de sa blessure, mais il ne faiblissait pas, tendu vers son objectif. L'espoir dévorait ses doutes.

Enfin, au détour d'un énième couloir, Jeremy posa la main sur une paroi en tous points semblable à toutes les autres et se retourna vers lui.

— Silence, maintenant.

Dzangher haussa les sourcils. Il n'avait pas particulièrement eu l'impression d'être bruyant avant cela.

Le maître espion attendit quelques instants, aux aguets. Dzangher devina qu'il écoutait d'une manière ou d'une autre de l'autre côté du mur. Ce qu'il entendit sembla lui convenir puisqu'il joua une symphonie étrange de ses doigts sur la paroi, et celle-ci pivota.

Il se glissa à l'extérieur, faisant signe à Dzangher de le suivre.

Ils se retrouvèrent dans un couloir bien trop familier. Devant eux s'étendaient des dizaines de grilles de fer sales, éclairées ponctuellement par des torches crachant une fumée noire. Les murs luisaient d'humidité et de choses moins avouables. Une odeur de moisi, de corps mal lavés et de déjections flottait dans l'air.

Un jeu de rois et de pions 1 - Nous qui sommes des ombresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant