Chapitre 44

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[NdA : y a 52 chapitres *pose ça là et disparaît dans un nuage de fumée*]


De l'autre côté de la faille, comme l'avait perçu Isine plus tôt, les débats s'étaient rapidement envenimés.

— Nous n'allons quand même pas accepter les conditions de cette garce ! criait Tchaek en postillonnant de fureur.

Stovy fit claquer sa langue, l'air réprobateur.

— Tais-toi donc. Mia a raison : nous devons y réfléchir avant de prendre une décision.

— Personne ne tolérera ce traître ! Elle veut nous diviser, Stovy, nous détruire !

— Tchaek n'a pas complètement tort, intervint Mia d'une voix calme. Dzangher à notre tête créerait un schisme qu'il nous serait difficile d'enrayer.

— Évidemment ! cracha le guerrier.

Mais Stovy ne lui accordait plus aucune attention.

— Tu envisages d'accepter, Mia ?

Cette dernière se tourna lentement vers lui, parfaitement maîtresse d'elle-même.

— Pourquoi, toi non ?

Le vieil homme et Mia s'affrontèrent du regard, puis Stovy finit par acquiescer gravement de la tête.

Tchaek faillit s'étrangler de rage, mais le vieil homme ne quittait pas sa chef des yeux.

— Explique-moi ton raisonnement.

— Cette garce, comme vous l'appelez, n'a pas tort quand elle présente le rapport de force entre nos deux pays, commença Mia. Elle est prête à aller jusqu'à la guerre : nous nous en doutions, nous en avons maintenant la confirmation. Si nous refusons ses conditions, elle enverra ses troupes.

— Comme tu l'as dit, nous avions envisagé cette possibilité, rappela doucement Stovy. Et nous avions trouvé une réponse.

— Le peuple se soulèvera, le coupa Tchaek. Ils ne pourront pas nous vaincre.

Mia tiqua.

— Peut-être, articula-t-elle, mais peut-être pas. Et peut-être devrais-tu, Tchaek, la fermer et mobiliser ce qui te sert de cervelle. Le peuple se soulèvera, c'est vrai. Mais que vaudront des milliers, même des centaines de milliers de paysans affamés et morts de froid contre des légions de soldats entraînés ? Que ferons-nous face à ses chevaux de guerre ? Face à ses magiciens ? Tu veux voir notre pays agoniser dans la boue, Tchaek ? C'est ce que tu es en train de proposer ?

Il s'était ratatiné sur lui-même à chacun de ses mots, toute velléité de résistance envolée.

— Ce n'est pas ce que je voulais dire...

— Je me fiche bien de ce que tu voulais dire ! Je t'ai amené ici parce que je pensais que tu saurais contrôler ta colère. Mais elle te consume, Tchaek, et tu es incapable de voir les enjeux. Tu penses que je ne suis pas en colère, moi ?

Sa main se détendit et saisit la nuque du pauvre homme. Elle l'attira à elle et se pencha tout contre son oreille.

— Crois-tu que j'aurais pu accomplir tout ceci sans cette même rage qui brûle en moi ? Elle me consume, Tchaek. Elle pourrait me dévorer mais, contrairement à toi, je sais la contrôler. Je la concentre, pour l'utiliser contre mes ennemis. Les ennemis de notre peuple. Comprends-tu ?

— Oui...

— Non, tu ne comprends pas. Tu as juste peur.

Elle le lâcha et il s'écarta aussitôt de quelques pas, frissonnant.

Un jeu de rois et de pions 1 - Nous qui sommes des ombresWhere stories live. Discover now