épisode cinquante-deux

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OCTAVIA

Rosalya m'aide à me ventiler avec un livre alors que j'essaie de faire redescendre mon rythme cardiaque. Je ne pensais vraiment pas me laisser happer ainsi par le texte, j'avais prévu de reproduire la scène du film qui a bercé mon enfance mais le résultat a été tout autre. Mais à l'instant où j'ai commencé ma tirade, les mots se sont infiltrés en moi comme une intraveineuse et j'étais en accord total avec la scène. C'est comme si mon corps répondait à un appel invisible que même mon cerveau ne pouvait empêcher. C'était... Démentiel.

Je ne me suis jamais senti à ma place, nulle part. J'ai toujours eu l'impression que je devais contrôler mes faits et gestes, mes paroles, mes mimiques, absolument tout. Mais à l'instant où j'ai commencé à réciter ce texte, je me suis sentie libérée de ce poids, c'est comme si j'étais...

Moi.

Et c'était une sensation incroyable.

Cela fait quelques minutes que je me suis isolée avec les filles dans les vestiaires en attendant le résultat final mais je suis assez confiante. Je n'ai pas vu les autres auditions, mais d'après les retours qui m'ont été fait ces dernières minutes, je me suis pas mal débrouillée.

Des bruits de pas retentissent et Nathaniel, Castiel et Lysandre apparaissent sur le pas de la porte.

– Tiens ! s'exclame le blaireau.

Il me lance un objet que je rattrape in extremis et découvre une clef usb. Je le questionne du regard et il s'explique :

– Pour citer quelqu'un, t'as trop de talent pour tout foutre en l'air.

Je penche la tête, toujours dans l'incompréhension la plus totale.

– C'est pour ton dossier pour la fac, m'explique Rosalya. Quand on a fait notre répétition commune mercredi, on s'est dit que garder une trace de cette audition pourrait être pas mal. Tu avais vraiment l'intonation parfaite, mais ce que tu nous a fait là c'était... Incroyable.

– On sait que tu sais pas vraiment quoi faire après le BAC alors on s'est dit qu'on pouvait te donner un petit coup de main, continue Lysandre.

– Euh... je commence, complètement sans voix. Vous croyez vraiment que...

– Ça me fait mal de le reconnaître, me coupe Castiel. Mais j'en ai encore des frissons, c'est rare d'avoir un tel talent dans un milieu artistique, ce serait du gâchis de l'ignorer.

– Les gars ! nous coupe Peggy. Faut y aller !

Mes amis s'avancent vers la porte, mais je suis incapable de bouger, jouant avec la clef USB. Je n'arrive pas à croire ce qu'il vient de se passer. Je savais que je réussirais cette audition, mais j'étais loin de me douter que mes amis en profiteraient pour me retourner le cerveau.

Nathaniel s'avance et s'accroupie devant moi, il décale une mèche de ma frange tombant devant mes yeux avant de me tendre une pochette marron.

– J'ai pris la liberté de me renseigner sur les possibilités qui s'offrent à toi, commence-t-il. Tu peux te contenter d'un cursus de théâtre à la fac mais... Ils ont raison, tu es brillante, tu as une prestance incroyable et... tu es capable de faire ressentir des choses à un public qui n'y connait rien en matière de théâtre.

Je prends le dossier qu'il me tend, troublée.

– Je t'ai imprimé le dossier de candidature de l'American Academy of Dramatic Arts de New York, avec toutes les infos que j'ai pu trouver qui pourraient t'être utiles. Apparemment c'est là qu'ont étudié Grace Kelly et Sarah Paulson. C'est une piste parmi d'autres mais...

Je ne laisse pas terminer et lui saute dans les bras.

Je ne saurais dire ce que je ressens en ce moment-même. J'ai l'impression d'avoir traversé un portail me menant à une autre dimension, comme dans les films dont n'arrête pas de parler Armin. Tout cela semble si... bizarre. Je n'ai pas les mots pour décrire à quel point ce qu'ils ont fait me touche, l'idée qu'ils puissent croire en moi de cette manière, c'est... cela me touche. J'aperçois enfin une lumière au bout du tunnel, une lumière qui ressemble à de l'espoir. Je ne sais pas si je devrais m'approcher de cette lumière, mais à cet instant, elle est si réconfortante que je n'ai aucune envie de la fuir.

– Je crois que... commence Nate. Enfin ils vont-ils vont nous attendre.

– Oh, oui, bien sûr ! je me reprends en le libérant.

Je lui lance un léger sourire et baisse la tête, gênée par cette étreinte que je lui ai infligée.

– Prête ? demande-t-il en me tendant la main.

J'hoche la tête et je la saisis. Il me tire vers lui pour me remettre sur pieds et m'entraine vers le gymnase, refusant de lâcher ma main.

– Je te trouve bien calme, je commente.

– Je me suis inquiété tout à l'heure, confie Nate. Maintenant que tu es sortie de ce vestiaire, savoir quel rôle je vais avoir est le cadet de mes soucis.

La voix de M. Faraize m'empêche de lui répondre :

– Un peu de silence, je vous prie ! Alors, pour ce projet, les rôles sont attribués à...

***

Posées au Cosy Bear Café, nous faisons notre compte rendu sur la situation avec Ginny.

– Alors, pas trop déçue ? je demande.

– Tu rigoles là ? demande Ginny. Je vais pouvoir passer mon temps en coulisses à me moquer d'Ambre qui sera transformée en plante verte ! C'est le rêve !

J'éclate de rire avant de porter la paille de ma boisson à ma bouche.

– Et toi alors, reprend-t-elle. Qu'est-ce que ça te fais de savoir que tu vas jouer ton film préféré avec ton blondinet ?

– C'est cool ! Je crois...

La répartition des rôles a été pas mal contestée. Lorsqu'Ambre a su qu'elle serait punie pour avoir essayé de saboter mon audition, elle a essayé de convaincre les enseignants de changer d'avis. Mais il semblerait que ses pleurnicheries ne fonctionnent qu'avec papa puisque j'ai été désignée pour jouer Aurore (un comble !) et Nate a obtenu le rôle du prince. Je reconnais que je regrette de ne pas avoir pu assister à son audition, il a vraiment dû bien se débrouiller, surtout en sachant que Lysandre était dans les choix disponibles.

– Tu sais qu'ils ont choisi Nathaniel juste à cause de toi ? lance Ginny.

– Sois pas ridicule voyons !

– C'est la pure vérité ! s'exclame Ginny. J'ai entendu M. Faraize le dire !

Je lève les yeux au ciel avant d'interpeller le serveur pour recommander un mocha caramel.

– Tiens, c'est pas Lysandre et Castiel là-bas ?

– EH LES GARS !

Ginny prend la Nathaniel-pose alors que les garçons nous rejoignent.

– Alors, me lance un Castiel moqueur. Il va falloir que je t'appelle "princesse" maintenant ?

– Et moi il va falloir que je t'appelle "papa" maintenant ?

Ah oui, Castiel a obtenu le rôle de mon père. Ce qui, quand on y réfléchit, est assez logique vu qu'il déteste son gendre, aka. Prince Nathaniel.

Je sens qu'on va bien se marrer !

Je sens qu'on va bien se marrer !

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this is me trying || Amour SucréWhere stories live. Discover now