9. Coquin de Valentin (2/4)

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De l'autre côté de la porte, le serrurier venait d'arriver et commença à jouer avec ses instruments.

– Bien, nous serons bientôt libérés. Désolé de ne pas avoir été un bon partenaire de cellule.

– Les obligations professionnelles, je comprends.

– Ton stage se termine quand Marion ?

Je me tournai vers elle mais elle ne me chercha pas du regard et lui répondit :

– Dans deux semaines, peut-être plus si on fait un avenant.

– Et ça va, ta maître de stage est sympa avec toi ?

Il me lança un clin d'œil pour ponctuer sa question.

– C'est la meilleure.

– Vous êtes de la même famille, non ?

– Du tout.

– Ah, alors c'est sympa Amanda, de vous voir proche de vos stagiaires.

– Faut dire que c'est pas commun cette situation.

Marion se replongea dans sa musique. Au même moment, le propriétaire nous informa :

– Y'en a plus pour longtemps.

Il se confondait encore en excuses auprès de Chloé qui perdait patience. Je m'en allais rejoindre le lavabo dans la pièce voisine et pris un verre en cristal pour me désaltérer. Dimitri me demanda de lui en rapporter un aussi. Je le lui tendis, un peu tremblante, par le haut pour qu'il le saisisse sans avoir à toucher mes doigts.

– Merci.

Son sourire sincère et la douceur de son regard d'acier auraient fait fondre la banquise (sans parler de ses autres attributs physiques déjà précisés). Il sembla lire en moi et, intrigué, me demanda en reposant le verre sur la table :

– Mais, on ne s'est pas déjà vus quelque part ?

Je répondais du tac au tac, sans laisser le temps à mon cerveau de me lancer des signaux d'alerte :

– Non, pas que je sache. Et je suis très physionomiste alors...

La porte s'ouvrit et Chloé sauta dans les bras d'un Dimitri surpris mais rieur. Je pris la poudre d'escampette.





En raccord avec cette aventure rocambolesque, cette soirée au Domaine des Anges fut très étrange.

J'étais contrainte de dormir là, dans un contexte qui ne me plaisait pas, avec des colocs d'étage que je n'avais pas choisi. Ainsi, un sentiment de malaise m'avait assailli. Exactement comme lorsque j'avais dormi la première fois chez Laura.

L'idée de faire ma première soirée pyjama m'enchantait. J'allais enfin faire « comme les grands » et découcher. Mon sac et mon matelas enroulé étaient déjà prêts bien avant que la mère de Laura ne vienne me chercher. J'avais attendu assise dans les escaliers tout en moquette un bon quart d'heure.

A bord de la voiture avec Laura nous étions pires qu'une colonie de puces virevoltantes. En arrivant chez elle, je m'extasiais de tout : la terrasse, le salon, sa chambre... C'était pourtant dans la même veine que la mienne mais j'étais portée par l'euphorie. Pourtant, ce que je n'avais pas anticipé, c'était la présence de ses parents. A table, j'étais plus réservée, je n'avais pas l'habitude de sortir de ma zone de confort et de parler à des inconnus. J'avais imaginé que sa mère et son père seraient comme leur fille, mais ils m'impressionnaient, surtout son père peu loquace.

Ma joie était retombée comme un soufflé. Et lorsque nous sommes montées jouer dans sa chambre, j'ai mis du temps à me décoincer. Laura ne m'avait fait aucune remarque mais elle voyait bien que j'étais différente. J'appréhendais la venue de sa mère ou de son père dans la chambre. Nous pûmes voir un film et je profitai enfin lorsque sa mère nous annonça qu'ils allaient se coucher et nous laissaient tranquilles. Mais ensuite, j'avais passé une nuit horrible, mal installée, angoissée de ne pas être chez moi, redoutant déjà le petit-déjeuner le lendemain matin. Bon, heureusement ça ne s'était passé comme ça que pour la première fois. Je me suis rendu compte ensuite que ses parents étaient normaux, gentils et je me suis décoincée.

Et bien ce sentiment très désagréable, je le ressentais à nouveau ici alors que Dimitri et Chloé dormaient dans la chambre d'à côté. J'avais beau avoir pu enfin retirer mon maquillage et pris une bonne douche, j'avais quand même le cafard. Tenir quatre heures pour un rendez-vous c'était jouable, mais je n'avais pas prévu de devoir faire tout ça sur deux jours consécutifs, nuit incluse.

La cerise sur la pièce montée (édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant