22. Des souvenirs de Londres (3/4)

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Tiphaine baissa la garde et fit un pas vers nous. Nous passions nos repas ensemble, avec Miss Brown et essayions de nous entraider pour parler un peu. Elle riait puis nous resservait toujours ses mash potatoes et son poulet avant de nous fourrer des biscuits secs dans les mains. Miss Brown nous faisait rire car elle poussait des petits cris de souris dès que son matou se collait sur ses jambes.

Les journées étaient denses, alors nous tombions vite de sommeil et regagnions notre petite chambre. La lessive des draps s'imprégna dans mon pyjama, une odeur que je ne retrouverais jamais mais qui sentit encore quelques jours après notre retour à la maison et me rendait nostalgique.

Un soir, nous avions éteint la lumière mais continuions de parler un peu. La visite au musée de madame Tussauds nous avait plu, surtout la salle des horreurs au sous-sol. Nous parlions donc mort et croyance et notre supposée ennemie montra une facette de sa personnalité plus sensible.

Proche de la confidence, Laura se permit de lui dire :

– Des fois, Tiphaine, tu passes pour une connasse, mais en fait, t'es sympa quand on creuse plus loin.

– Ta gueule !

Mais son ton nous montrait quand même qu'elle avait été touchée.

– Non, mais des fois, t'es dure avec les autres. Surtout ces derniers temps, même quand tu t'énerves après les profs.

– En ce moment, je suis sur les nerfs.

Ce fut moi, qui plongée dans le noir, osa lui demander :

– Qu'est-ce que tu as ?

– C'est à cause de Dimitri.

Je regrettai d'avoir posé la question, et ma jalousie prit le dessus, je n'eus plus envie de l'écouter. Jusqu'à ce que j'entende :

– Il a cassé avec moi.

Non seulement c'était terminé, bien qu'aucun signe de rapprochement réel n'ait été remarqué depuis décembre entre eux. Mais en plus, c'était lui qui avait pris l'initiative.

– Mince, dit Laura avec une compassion feinte, depuis quand ?

– Le mois dernier. Sans vraiment d'explication.

Merde, j'aurais aimé le savoir plus tôt. Le champ était à nouveau libre alors ! Un mois c'était énorme dans une vie de collégien, le temps de « décence » pour changer de partenaire était largement dépassé.

– Ah les mecs... dit Laura.

– Et vous, alors ? Pas de gars en vue ?

– Morte de rire ! se moqua Laura. T'as vu à quoi ressemblent les gugus de notre classe ! On dirait que leur cerveau s'est atrophié !

– Dimitri est différent, lui.

J'étais d'accord.

– Si tu le dis... mais non merci, les gars à la poubelle ! claironna Laura.

Tiphaine n'était pas pleinement convaincue.

– Mouai, et toi, Amanda ?

– Euh...

Je savais que Laura avait posé sa tête sur ses yeux, genre : merde, Amanda, fais comme moi ! Mens.

– Cette réponse détaillée est un oui ? ironisa Tiphaine. Oui, il y a un gars qui t'intéresse ! C'est qui ?

Le pouvoir de l'obscurité...

– Oui, c'est vrai, il y a un gars. Mais tu ne le connais pas, il n'est pas au collège.

– Ah. Bon et alors, qu'est-ce que tu attends ?

Finalement, peut-être pourrais-je avoir quelques conseils de Tiphaine. Non pas que je la considérais au même titre que Laura, bien sûr que non. Mais contrairement à elle, Tiphaine avait déjà connu une relation avec un mec... qui plus est celui qui m'intéressait depuis l'année précédente. Une éternité pour nous, petits collégiens.

– Je n'ose pas lui dire. Qu'est-ce que tu ferais ?

– Les gars sont pires que nous. Encore plus empruntés. Moi je te dis, 90% de chances pour que le gars te dise oui. D'une, tu auras pris les devants, de deux, t'es potable, de trois : les hormones commencent à les démanger, et de quatre : ils veulent avoir une nana pour épater la galerie, même s'ils sont gays.

Bon, j'aurais mieux fait de m'abstenir, ça ne m'aidait pas plus que ça, je n'attendais pas sa vision des mecs, un peu réductrice, mais plutôt un conseil miracle. Enfin, la fatigue gagna son combat et je m'endormis le cœur léger, impatiente d'être au lendemain.

Les derniers jours du voyage, je tentais de me retrouver près de Dimitri. Je voulais capter son regard. Le plan « CHO GREV » était relancé. Ce n'était pas si simple entre le rythme des visites et le nombre d'élèves.

Pour mon plus grand bonheur, nous fûmes enfin dans le même groupe pour la visite au Muséum d'Histoires Naturelles. Je fis tout pour être dans son champ de vision, détournai le regard vers les vitrines dès que le sien se levait vers moi. J'essayai de l'écouter lorsqu'il parlait avec ses amis, j'aimais son assurance et son esprit positif.

Je remarquai qu'il avait encore grandi, il faisait plus vieux. D'autres filles de la classe minaudaient sur son passage ou venaient même plaisanter avec lui. Ce qu'elles pouvaient m'énerver. Le musée proposa un quizz à remplir à la fin de la visite. Nous étions par groupe de cinq et Laura et moi nous retrouvâmes avec Dimitri, Yohann et je-ne-sais-plus-qui. Chacun des groupes avaient trente minutes. Laura, Dimitri et Yohann étaient beaucoup plus actifs que moi et l'autre. Je n'osai pas trop parler, une vraie nouille. Mais je profitai de cette proximité pour l'admirer. Notre petit groupe fut dissous dès la fin de la visite.

La cerise sur la pièce montée (édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant