3 mois sous silence - L'Explosion (Tome 4)

Chapitre 10

Druvath se lève brusquement tout en lâchant sa serviette dans son assiette et se racle la gorge.

- Bien. Je vais aller voir Bregolas, sauf si tu as d'autres révélations de ce genre à nous communiquer ?

- Je vous informerais si quelque chose me vient à l'esprit...

Loup et vampire se jaugent un moment, l'un à cran, et l'autre soudainement agacé avant qu'Arcadus tapote la table du bout des doigts.

- Quant à nous, les jeunes, nous devons rejoindre l'une de nos sentinelles en fin d'après-midi. Alors finit la pause. Je vous veux prêt à partir dans un quart d'heure.

Zéphin fait mine de protester alors que les jumeaux soupirent. Mais Arcadus avait prévu le coup et, tout en observant Druvath s'éloigner d'un pas raide, poursuit de sa voix graveleuse.

- Tous ceux qui ne veulent pas m'obéir sont conviés à se rendre auprès de ma chère sœur pour éplucher les pommes de terre de ce soir. Des volontaires ?

Elin représente la louve indépendante et fière que l'on pourrait s'attendre à voir auprès de ces mâles si autoritaires. Elle passe autant de temps à soigner les loups qu'à les houspiller et la plupart redoutent ses colères, peu fréquentes, mais tout bonnement terrifiantes. Pour l'avoir déjà vu crier après un cuisinier qui avait fauté, je peux comprendre la peur des autres.

C'est pour cette raison que Zéphin referme précipitamment la bouche et que les jumeaux prennent la poudre d'escampette. Arcadus les regarde faire avec un air satisfait puis m'adresse un clin d'œil avant de suivre son fils en sifflotant. Après leur départ, je m'étire et baille un grand coup, me rendant compte que la digestion ramène la fatigue accumulée. Le début de journée n'a pas été de tout repos et mes nuits ne sont clairement pas des plus paisibles.

Vivre sous la menace du diable et de l'un des plus vieux vampires du monde n'aide pas à avoir un sommeil réparateur. Et vu la pression emmagasinée avec la puissance qui m'habite, le stress et mes émotions décuplées, des cernes apparaissent sous mes yeux. C'est ce que remarquent les deux hommes restés à mes côtés. En soupirant, je croise leur regard soucieux et plisse les paupières.

- Quoi ?

- Tu devrais aller te reposer, propose Stevan en plaçant sa main sur la mienne.

Ce n'est que parce que je le sais envahi d'une grande gentillesse et d'une grande prévenance à mon égard que je ne grogne pas et acquiesce en lui offrant un demi-sourire.

- J'aimerais bien, mais je n'ai pas fini mes tâches.

- Tu sais qu'elles ne sont pas obligatoires... soupire Dérius en secouant ses cheveux blancs.

À lui, je lui lance un regard agacé avant de lui répondre.

- Je sais, tu me l'as déjà dit. Mais je ne veux pas être un poids pour la meute. Et je veux me rendre utile.

- Je peux te remplacer si tu veux.

Dérius ne fait même pas ses propres tâches alors j'ai du mal à l'imaginer faire les miennes. Et même si j'apprécie le geste, je ne suis pas sûre que ce soit le bon moment pour montrer l'amitié qu'il a pour moi. Pas à côté de Stevan. Celui-ci fait déjà de gros efforts avec Dimitri, je ne veux pas qu'il se mette à détester l'hybride aussi. Car il s'agit bien de ça : de détester quelqu'un pour m'avoir parlé. Pour m'avoir porté de l'attention.

Malgré son acharnement à me prouver le contraire, notre lien le bouffe et le transforme peu à peu. En ma présence, son tact et sa diplomatie naturelle disparaissent au profit d'une jalousie mal placée et d'une surprotection dont je n'ai pas besoin. Il fait des efforts depuis quelques jours, mais ces efforts sont en train de le tuer petit à petit. Je le sens. Ce n'est qu'une question de temps avant que son self-contrôle ne lui échappe encore.