Chapitre 58 - Concrétisation

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Média : Precious – Depeche Mode

Mardi 22 octobre 2019

Aujourd'hui je retourne au travail l'esprit léger, je me sens tellement bien que j'ai l'impression de marcher sur un tapis de plumes, la tête dans les nuages. Ces quelques jours en Angleterre m'auront permis de prendre conscience des réels sentiments qui m'animent. La jalousie de le voir proche d'une autre femme, la peur de le perdre, je réalise à quel point je tiens à lui, même si je n'ose pas encore lui prononcer ces mots qui me brulent les lèvres, je peux m'avouer à moi-même que je l'aime. Cet être qui paraît arrogant, sûr de lui, a su me dévoiler son vrai visage et conquérir mon cœur.

Au-delà de me montrer son attachement par sa tendresse, Robin m'a prouvé hier en rentrant de l'aéroport qu'il me faisait une place chez lui. Lorsqu'il a ouvert son dressing pour y déposer nos valises, j'ai découvert avec émotion qu'il avait libérer de l'espace et avait soigneusement rangé les vêtements que j'avais été contrainte de laisser ici le week-end précédant notre départ.

— J'ai tendance à m'étaler pour ne pas que mes affaires se froissent mais si tu as besoin de plus de place, tu n'hésites pas à me le dire. J'ai pensé que ce serait plus pratique pour toi d'avoir des vêtements ici plutôt que de trimbaler un sac en permanence avec toi, s'était-il tout simplement justifié.

Ce sont ses délicates attentions qui me touchent plus que des mots et me font pousser des ailes. En plus de l'aveu de Chloe sur le fait que Robin n'a pas présenté de femme à son frère depuis Victoria, je me rends vraiment compte du statut spécial que Robin m'attribue dans sa vie. J'ai hâte de voir Nina ce soir pour lui raconter mon séjour et lui faire mes confidences.

J'arrive aux bureaux tout sourire accueillie par celui complice d'Elisabeth.

— Bonjour ma belle, alors ce séjour avec le beau brun ? me taquine-t-elle.

— Enrichissant, lui réponds-je narquoise.

Le téléphone du standard sonne me permettant d'esquiver l'interrogatoire de cette curieuse. Je rejoins vite mon bureau et allume l'ordinateur pour consulter mon agenda afin de planifier mon travail de la journée. Je découvre un rendez-vous à quatorze heures avec une nouvelle cliente pour une montre Within personnalisée. Je suis enjouée d'avance, ce sera ma première création pour le partenariat WithArmanini. Je vais pouvoir mettre à profit le process élaboré avec Mark à Londres.

J'envoie un SMS à Robin pour lui partager mon excitation de cette concrétisation de notre collaboration professionnelle.

De Robin : « J'ai foi en l'union de nos talents. Quoique tu fasses, je suis fier de toi mon Ange »

Forte de ses encouragements, je me plonge dans les créations en attente transmises par mon père en mon absence.

A midi, Antonio et Alessandro étant revenus de leurs rendez-vous extérieurs, nous prenons notre déjeuner ensemble. Depuis ses infarctus mon père a un régime alimentaire assez strict et il doit éviter de manger trop souvent au restaurant. Afin de le soutenir, Alessandro et moi partageons avec lui un plat de légumes mitonnés par ma mère. Nous profitons de ce moment pour faire un rapide débriefing de l'activité et de ma rencontre avec Thomas et Mark au sein de la firme Within. Je vante le bien-fondé de ce déplacement en omettant bien sûr les détails trop personnels de ma relation avec Robin, même s'il faudra bien que j'officialise avec mon père puisque j'ai accepté d'accompagner Robin au Pays de Galles en novembre pour rencontrer ses parents. Mais le moment n'est pas opportun, je lui en parlerai en présence de ma mère et en dehors du cadre professionnel.

Après le déjeuner, je descends à la boutique pour m'installer à mon bureau. Il y a un peu de monde dans le magasin, une vendeuse oriente une femme vers moi, j'en déduis qu'il s'agit de mon rendez-vous alors je me lève pour l'accueillir.

— Bonjour Madame Hamilton. Je suis Annabella, asseyez-vous. Je vous offre quelque chose à boire ?

— Bonjour Annabella. Je veux bien de l'eau, je vous remercie.

J'attrape deux petites bouteilles d'eau dans le mini réfrigérateur et je lui explique le déroulé de l'entretien.

— Vous allez me décrire votre projet et je vais prendre des notes pour vous faire des propositions qui correspondent à votre souhait. C'est pour un homme ou une femme ?

— C'est pour mon compagnon.

— Très bien. Avez-vous une idée précise de ce que vous désirez ?

— Mon ami est un passionné et je souhaiterais une montre qui reflète tous ses hobbys. Il est très sportif mais il affectionne par-dessus tout le golf. Il aime beaucoup la musique également. Il joue du piano et de la guitare.

Je souris en notant les détails fournis par cette femme sur son ami, ses passions me font beaucoup penser à quelqu'un cher à mon cœur.

— Ses couleurs préférées ? l'interrogé-je en me reconcentrant sur ma cliente.

— Le noir et le blanc.

— Il ne nous reste plus qu'à choisir le modèle sur le catalogue et nous aurons terminé pour aujourd'hui, déclaré-je satisfaite.

— C'est celle-ci que je veux, affirme-t-elle sûre d'elle en me désignant une montre ronde en acier et bracelet en cuir noir. J'allais oublier, il faudrait également graver les initiales RV sur le cadran.

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine, mon sourire se fige sur mon visage, un rictus impassible de commercial. Mais à l'intérieur de mon corps, mon sang est en ébullition, j'ai un affreux doute qui m'assaille. Je n'ai pas le temps de poser la question.

— Vous pensez que vous pourrez me présenter des projets rapidement ? L'anniversaire de Robin est le 17 novembre, je voudrais lui offrir quelques jours avant qu'il ne parte en Angleterre.

Elle a prononcé son prénom. Il s'agit donc bien de lui, plus aucun doute ne subsiste. Une douleur foudroyante me transperce la poitrine de part en part. C'est fulgurant mais je dois faire bonne figure devant cette femme blonde qui me fait face avec assurance.

— Je vais faire mon maximum pour vous recontacter avant la fin de la semaine Madame Hamilton, lui réponds-je courtoisement.

— Appelez-moi Amber, m'intime-t-elle en se levant tout sourire. Oh, et pas un mot à Robin si vous le croisez, ni à Natasha et Daniel, c'est une surprise.

Elle me salue et quitte mon bureau avec prestance. J'ai envie de lui crier qu'il était avec moi ce week-end à me faire des promesses d'avenir. Mais je ne veux pas faire un scandale dans la boutique, mon père ne me le pardonnerait pas. Alors je la regarde s'éloigner en détaillant son physique parfait qui ne m'avait absolument pas intéressé à son arrivée. Je retiens les larmes de couler tandis que mon cerveau l'imagine avec Robin. La souffrance est tellement intense que je sens mon estomac se nouer. J'ai réellement mal au cœur. Tandis que je cours aux toilettes pour vomir mon repas, mon téléphone me signale l'arrivée d'un message. Je jette machinalement un coup d'œil à l'écran.

De Robin : « J'espère que ce premier entretien s'est bien passé. Tu me manques déjà mon Ange»

J'ai juste le temps de me pencher sur la cuvette pour déverser le contenu de mon estomac.

Je me sens tellement idiote d'avoir cru à ses belles paroles. Il m'a bien bernée avec la complicité de sa cousine et de Daniel en plus. Ils devaient bien se marrer en me voyant minauder avec lui. Je suis écœurée, il me dégoûte, ils me débectent tous.

 Je suis écœurée, il me dégoûte, ils me débectent tous

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