14] Cercueil

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-Durant l'une de nos précédentes séances je vous avais demandé à quel âge avait débuté votre vie sexuelle, et vous m'aviez répondue « jeune ». Comment cela s'est-il avéré possible dans ce village où la notion même de sexualité était proscrite?

Eve continue de frotter ses mains on une contre l'autre, les doigts crispés et le regard perdu dans le vague.

-Qui vous a dit que c'est moi qui ait voulu débuter quoi que ce soit?...

Une ombre passe sur de Barbara, ce que je manque pas de remarquer Eve. Elle poursuit:

-À huit ans j'étais déterminée à connaître ce secret que les grandes personnes voulaient nous cacher avec tant d'ardeur. Alors avec une de mes cousines qui avait mon âge et qui était aussi curieuse que moi nous avons profité d'un repas de famille chez elle pour aller dans sa chambre et nous déshabiller. On voulait juste savoir, regarder, comprendre pourquoi c'était aussi tabou alors qu'après tout... il n'y avait vraiment pas de quoi en faire tout un cirque. C'était innocent de notre part. Mais... nous avons été surprises par nos parents.
-Et que s'est-il passé?
-Nous avons eu le droit à une correction mémorable. Nous avons du rester à genoux, les mains sur la tête, répétant à voix haute la même prière en boucle pour supplier dieu de nous pardonner.
-Combien de temps?
-Jusqu'à s'effondrer. Marie, ma cousine, a tenu sept heures. Moi douze. C'est incroyable la résistance d'un enfant vous savez, je ne sais pas si un adulte aurait tenu aussi longtemps... Après ça nous avons été séparées et j'ai été enfermée dans le Cercueil du Péché pendant vingt-quatre heures, sans boire ni manger évidemment.
-Le Cercueil du Péché? Qu'est ce que c'était?
-Oh... Une sorte de boîte toute en longueur tel un cercueil dans le quel il m'était impossible de bouger, ou même de m'assoir. Je devais rester debout, dans le noir complet, jusqu'à ce qu'on m'en sorte. Je ne compte plus le nombre d'heures que j'ai passé dans cette boîte à la moindre de mes bêtises enfantines. Il m'arrivait même, si on m'y enfermait trop longtemps, que je m'urine dessus. Car après tout, je n'étais qu'une petite fille...

Le visage de Barbara est livide malgré sa volonté de rester professionnelle. Eve quant à elle a le visage dur, fermé, et la voix directe. Elle parle rapidement et d'une manière détachée, car après tout elle sait parfaitement que ce qui est fait est fait et que personne ne pourra changer ce qu'elle a subit.

Le cercueil, elle n'en est jamais vraiment sorti...

EveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant