Il est dans les environs de dix-huit heures lorsqu'Eve décide de s'arrêter à une station essence pour faire le plein et surtout aller aux toilettes. Elle avait entendu dire qu'être enceinte comprimait la vessie et donc donnait plus souvent envie d'aller faire pipi, mais elle n'imaginait pas que c'était à ce point, elle qui était pourtant capable de tenir vingt-quatre heures sans uriner.
Elle sort de sa voiture, met de l'essence puis se rend à l'intérieur pour payer et se rendre donc aux sanitaires.
Le ciel est orageux et l'air lourd, ce qui a tendance à déprimer Eve qui n'a jamais aimé cet entre-deux pesant.
Une fois soulagée comme il se doit elle va à la caisse gardée par un homme d'une cinquantaine d'années, à l'embonpoint particulier et au crâne dégarni.
Elle remarque seulement maintenant que la station est vide et qu'elle est en cet instant la seule cliente.
-Il va bientôt pleuvoir...
-J'espère. Que ça pète un bon coup pour en finir enfin!
-Alors du coup 63,97€ pour l'essence, et il vous faut autre chose?
Elle n'a pas faim et ne comptait rien acheter mais elle doit bien avouer que ce paquet de petits chocolats lui fait de l'œil et que ses hormones maternelles ne font qu'accentuer sa gourmandise.
-Oui, ça.
Il scanne le code barre.
-67,47€ s'il vous plaît.
Eve prend sa carte, tape son code et pendant qu'il sort son ticket de caisse son téléphone se met à vibrer dans son sac. Elle le cherche et voir le nom de Barbara apparaitre à l'écran.
-Tenez.
Il lui tend le ticket et le paquet de chocolat qu'Eve prend d'une main tout en décrochant de l'autre.
-Merci, au revoir... allô?
-Allô Eve, c'est moi, tu vas bien? Comment ça se passe? Tu es où là?
La jeune femme marche dans les rayons pour aller à la sortie tandis qu'un autre client entre et se met à regarder les magazines, la tête enfoncée dans ses épaules, le corps emmitouflé dans un long manteau noir.
-Oui je vais bien, je te raconterai, je suis à une station essence là, je repars. J'arrive à Paris dans une heure environ, s'il se met à pleuvoir pendant que je suis sur la route sans doute un peu plus...
Sans faire exprès elle se cogne à lui et en fait tomber son paquet de chocolat. Elle s'excuse aussitôt en se penchant pour ramasser malgré son ventre rond qui l'handicape.
-Hein?
-Non non rien ce n'est pas à toi que je disais pardon...
L'homme en question ne se retourne pas vers elle et ne dit pas le moindre mot.
Eve prend le paquet sur le sol et sent alors un liquide tiède sur ses doigts. Elle retourne le paquet et découvre avec horreur des traces de sang sur sa main. Elle voit alors sur le sol une petite flaque formée par des gouttes venant de la manche gauche du manteau.
Elle se relève lentement, hypnotisée par cette flaque rouge puis relève les yeux vers l'extérieur et ne s'aperçoit que maintenant qu'à part sa propre voiture et celle du gérant de la station il n'y a aucun autre véhicule garé sur le parking.
-Eve?
-Je te rappelle.
Et elle raccroche avant de remettre le téléphone dans son sac, réalisant qu'elle n'a toujours pas vu le visage de l'homme.
-Monsieur... vous allez bien?
Elle pose son main sur son épaule, mais avant même de pouvoir regarder son visage il se glisse dans son dos et place l'intérieur de son coude gauche contre sa gorge et sa main droite plaquer contre sa joue pour la maintenir en place.
Eve pousse un hurlement et lâche de nouveau le paquet de chocolat qui explose cette fois au sol se faisant répandre les petites billes marrons.
L'homme derrière le comptoir se tourne alors vers eux et son visage devient aussi livide qu'un linge.
-M...monsieur calmez vous... qu'est ce que vous faites?!
-Fermez là! Tous les deux! Il suffit que je tourne sa tête d'un coup sec et ses cervicales se briseront, entraînant sa mort instantanée.
