Barbara David a beau avoir entendu de nombreux récits durs tout au long de sa carrière de psychologue, l'histoire d'Eve fait clairement partie des plus atroces.
Maltraiter ainsi une enfant et lui laver le cerveau de la sorte est plus que cruel, c'est inhumain.
Barbara se racle la gorge à son tour avant d'encourager la jeune femme à poursuivre:
-Vous avez dit que ce n'est pas vous qui avait voulu « débuté votre vie sexuelle ». Qu'est ce que vous entendiez par là?
Eve se redresse sur le fauteuil, crispée, les muscles tendus et les mains légèrement tremblantes.
-À l'âge de quatorze ans j'ai... j'ai été sexuellement agressée par un garçon du village. Il en avait dix-sept.
La pièce reste silencieuse. Barbara n'ajoute rien, ne pose pas de questions. Eve poursuit alors par elle même.
-Il ne m'a pas violée. Il n'en a pas eu le temps.
-Comment ça pas eu le temps?
-Vous savez j'étais amoureuse de ce garçon. Il était beau, charmant, je m'imaginais déjà l'épouser. Une union bénit par le seigneur qui m'aurait apporté le bonheur que je pensais mériter... Un jour il m'a emmené dans le grange de son père et il a commencé à m'embrasser. C'était la première fois que j'embrassais quiconque. Il m'a allongée dans le foin et en continuant de m'embrasser il a glissé sa main sous mon chemisier.
Elle marque une pause, ferme les yeux une seconde et inspire profondément avant de murmurer de façon presque inaudible, les paupières toujours closes:
-Je déteste le foin. Je hais son odeur, son toucher, le bruit qu'il émet lorsqu'on s'allonge dessus. Ça me donne la nausée. Le foin...
Elle rouvre les yeux, comme revenant à la réalité et reprend alors:
-Au début je me suis laissé faire, mais lorsqu'il a voulu faire la même chose sous la jupe je me suis mise à paniquer. Je savais que c'était mal. Que jamais personne ne devait faire ce genre de choses en dehors du mariage, et même au delà de ça, moi je n'en avais pas envie. Alors je lui ai dit d'arrêter, mais il ne m'a pas écoutée. Il a continué à me toucher, à se faufiler sous les vêtements. J'avais peur, il était plus fort que moi et je n'arrivais pas à l'arrêter. Je me suis même mise à pleurer, à le supplier. Mais il continuait. Et je sais parfaitement qu'il serait allé jusqu'au bout si... si son père n'était pas brusquement arrivé dans la grange à ce moment là.
-Son père vous a sauvée du pire en quelques sortes alors...
Eve fronce une seconde les sourcils avant de se mettre à éclater de rire. Un rire qui glace le sang de Barbara et lui fait aussitôt regretter ses paroles.
-Sauvée du pire?! Sauvée du pire?! Mais ce que vous ne comprenez pas très chère Madame David c'est que ce que je vous ai raconté jusqu'ici n'était en réalité qu'un avant goût de l'Enfer...
