Chapitre 20.2

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Trente minutes plus tard, je me retrouvais en position allongée sur la table métallique que Doc avait eu la délicate attention de recouvrir d'un fin matelas. Elle n'en était pas moins inconfortable. Je crois que même avec le meilleur matelas du monde, la sensation d'étouffement que je ressentais n'aurait pas disparu. C'était plus fort que moi, je me sentais prise au piège dès que je trouvais sur ces engins-là.

J'attrapais nerveusement la main de mon homme, la serrant avec une énergie désespérée.

— Cette fois-ci c'est la bonne, lui dis-je en essayant de lutter contre le tremblement dans ma voix.

— Je reste auprès de toi.

Je hochais la tête avec vigueur. Il avait plutôt intérêt. La crise de panique n'était pas loin. J'évitais soigneusement tout contact visuel avec les instruments et produits médicaux. Je savais pertinemment ce que Doc utiliserait pour faire arriver le remède dans mes veines. Occulter les termes appropriés faisait aussi partie de mes astuces pour éviter de m'enfuir de cette table d'examen. Je plongeais les yeux dans ceux d'Arenht, le feu ambré de ses prunelles m'hypnotisant, m'apaisant. Il caressa doucement ma joue. Allais-je redevenir entière? Etait-ce possible ou juste un espoir chimérique auquel je m'accrochais pour ne pas sombrer dans le chaos ?

Je resserrais l'étau autour de ses doigts. La piqûre de l'aiguille me fit frémir, mais je gardais mon calme. Je sentis le liquide s'élancer vers mes veines, remonter à l'intérieur de celles-ci, des picotements étranges dans son sillage. Doc restait à l'affût du moindre changement. Il contrôlait les machines auxquelles j'étais attachée surveillant toutes les constances. Nous ne savions pas combien de temps il faudrait attendre pour espérer voir une réaction, positive ou non.

— Parlez-moi de votre dernière mission. J'ai besoin de penser à autre chose qu'à ce produit qui courre en moi.

— Que veux-tu savoir ?

— N'importe quoi. Le lieu, les gens que vous avez rencontré...

— On a été envoyé vers la meute de la Forêt Noire pour négocier une possible coopération entre nos meutes. Et comment dire... Ils sont assez spéciaux là-bas.

— Spéciaux ! Tu es encore gentil, intervint Doc en faisant la moue. Je n'avais jamais eu l'occasion de les approcher et j'aurais préféré ne pas avoir eu à le faire.

— Qu'ont-ils de si bizarre ? m'intéressais-je.

— Ils ne sont pas très communicatifs.

— Ils ne nous ont pas décoché une seule parole sur le trajet nous menant à leur chef, enchaîna son partenaire. Et celui-ci...

Arenht faillit s'étrangler de rire en croisant le regard de Doc. Celui-ci n'avait pas l'air de trouver l'anecdote aussi amusante.

— Quoi ? Dites-moi ! voulus-je savoir en les dévisageant à tour de rôle.

— Je n'aurais jamais cru voir un gars aussi étrange à la tête d'un clan. Tout ce que je peux dire c'est que notre ami lui a fait de l'effet.

Ses yeux pétillèrent en sortant ces derniers mots.

— Arenht, je te jure que tu vas me le payer, l'avertit Doc en lui lançant un regard mauvais. Tu m'avais promis de garder ta langue.

— C'est pour Ayl, mec. Il faut bien lui changer les idées, non ?

Tout d'abord perplexe, je percutais finalement, regardant mon ami avec des yeux ronds.

— Ne me dis pas qu'il était... Non, vous me faîtes marcher.

— Si seulement ! s'exclama Doc en grimaçant à ce souvenir.

— D'un côté c'est assez flatteur, non ?

Il me foudroya du regard. Apparemment pas.

— Et ton nom?, m'enquis-je d'un air innocent. Ton vrai nom, tu ne me l'as jamais dit.

— C'est pour une bonne raison que je ne l'utilise plus. Doc me va très bien, pas besoin de connaître celui que mes parents ont eu l'ingénieuse idée de me trouver.

Je décelais l'ironie sous-jacente.

— Il est si terrible que ça?

Il eut un regard éloquent, avant de retourner au nettoyage de ses instruments.

— Arenht tu le connais?

Celui-ci hésita un très bref instant avant de secouer la tête pour signifier que non, il n'en avait aucune idée. Je l'observais à travers mes paupières mi-closes. Il le savait, cela ne faisait aucun doute. Il détourna le regard, paraissant soudainement très intéressé par la poche accrochée au piquet métallique.

— Arenht...

— Quoi? me dit-il avec son air le plus innocent.

— Tu le sais! Allez les gars, soyez sympa avec une pauvre fille testeuse de remède.

Les deux amis échangèrent un regard amusé.

— Anastaise, balança Doc dans un grognement. Non, mais franchement, c'est trop la honte. Tu vois à quel point je t'apprécie pour te l'avoir dit, hein? Et ne t'avise pas de te moquer, j'y peux rien si mes parents n'avaient pas de goût de ce côté-là.

Ah! Oui, quand même. C'était du lourd. Dans le genre vieux prénom oublié de tous, il n'avait pas eu de chance. En plus il ne lui correspondait pas du tout.

— On s'en tiendra à Doc, je suis d'accord avec toi, le rassurais-je en me mordant la lèvre pour ne pas sourire.

Surtout ne pas croiser le regard d'Arenht, sinonje ne répondais de rien et je ne voulais pas vexerdavantage celui qui faisait tout pour me guérir. Voilà, penser au virus et àson éradication, de quoi me couper l'envie de rire à coup sûr. J'appuyaissoudain sur mon estomac, un élancement aigu venant de me percuter violemment.Aussitôt ils furent en alerte, me demandant ce qu'il se passait. 

Protège-moi  - T.2: L'Alpha [ Terminé ]Where stories live. Discover now