Chapitre 30.2

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Dans l'avant-dernière pièce, une nouvelle découverte nous attendait. Antonh et Sheren nous y attendaient, sagement attachés. Ils étaient pleinement conscients mais nous avouèrent avoir eux aussi étaient drogués. Les deux frères se donnèrent une longue accolade, soulagés de voir l'autre sain et sauf. Tahlia émergeait lentement mais restait encore faible. Sheren aida Sohren à la soutenir pour avancer plus vite. Les devançant, nous allâmes, moi, et Arenht, suivi par Antonh, ouvrir la dernière porte. Peut-être que d'autres membres de notre équipe y étaient enfermés. Contrairement aux précédentes, celle-ci n'opposa pas de résistance. C'était surprenant mais cela ne nous arrêta pas. C'est donc d'un pas décidé que nous nous engouffrâmes à l'intérieur de cette pièce.

La porte se referma dans un claquement brutal, nous plongeant dans une obscurité totale. Nous venions de nous faire enfermer. Antonh émit un juron alors que son frère resserrait ses doigts autour des miens. Je m'efforçais de ne pas paniquer alors que ma louve sentait un danger imminent approcher. La lumière soudaine qui éclaira la pièce nous fit cligner des yeux. La salle ne comportait rien d'autre qu'une table et une boîte en carton. Intrigués, les deux frères s'approchèrent de l'objet, Arenht me retenant derrière lui. Antonh souleva le couvercle et examina le contenu. Avant qu'Arenht puisse à son tour regarder, il referma brusquement le tout, la respiration soudain plus forte.

Son frère posa la main sur son épaule, inquiet.

— Antonh ? Qu'est-ce qu'il y a dedans ?

— Rien, murmura-t-il d'une voix blanche.

Ses doigts demeuraient fermement crispés sur le carton. Contournant la table et son frère, Arenht vint lui faire face, agrippant la boîte à son tour.

— Non, cria Antonh.

— Bon sang, mais pourquoi tu ne me laisses pas voir à la fin!

— Ce n'est pas nécessaire de t'infliger ça. Ces tordus vont payer.

Je n'avais jamais vu le jeune homme dans un tel état. Qu'avait-il vu là-dedans pour être aussi furieux ? Arenht persistait à vouloir ouvrir le carton, tirant celui-ci vers lui. Finalement, la caisse céda et se renversa sur la table alors que les deux hommes la tiraient chacun d'un côté. Mes yeux s'écarquillèrent en avisant le contenu. Des dizaines de photographies jonchaient la surface du bureau ainsi que le sol. A leur vue, mes jambes cédèrent sous moi. Je m'affaissais à terre, incapable de détacher mon regard de ces images morbides. Devant nous s'étalaient des images de corps sans vie, loups-garous sous leur forme humaine ou animale, autant de victimes du Groupe L, autant de vies sacrifiées. Ils avaient poussé la cruauté jusqu'à orchestrer cette scène macabre. Je repensais aux corps que j'avais trouvés sous les draps blancs. Nauséeuse, j'enfouie mon visage entre mes mains. Le cri de douleur et de rage qui résonna me fit frémir et redresser la tête. Il émanait d'Arenht. Son poing percuta violemment l'un des murs, y laissant une traînée de sang ainsi qu'une fissure. Alarmée par sa réaction, je me relevais maladroitement et m'approchais de lui.

— Arenht, qu'est-ce qu'...

Il se dégagea de mon étreinte comme si je l'avais brûlé, le corps parcouru de tremblements.

— Aylyn, recule. Il risque de perdre le contrôle, m'intima Antonh, le visage ravagé par la douleur.

Resserrant les bras autour de moi, je jetais un regard désemparé sur les clichés qu'ils nous avaient laissé. Sur l'un d'eux, je repérais soudain un visage féminin qui m'interpella. Je ne la connaissais pas et pourtant elle me semblait vaguement familière. Le teint livide, elle avait les yeux ouverts, d'une couleur proche de l'ambre et... J'étouffais mon exclamation de ma main. Je redoutais de comprendre. Un fin collier avec un nom. Je sus ce que j'allais y lire. Zariah. Le nom de leur sœur assassinée. Combien d'entre nous se retrouvaient ainsi immortalisés, affichés tels des trophées sur un tableau de chasse? Les images se superposaient les unes aux autres, s'imprimaient sur nos rétines sans que nous le voulions. Je balayais de la main les photos. Un autre visage et cette fois-ci pas de doute sur son identité. Un poids énorme s'abattit sur ma poitrine. Mes doigts agrippèrent le papier glacé. La blessure ne s'était pas encore refermée, juste anesthésiée. Ethan. Il était encore en vie au moment de la prise de la photo, mortellement blessé mais en vie. De revoir ses traits raviva la douleur fulgurante, me lacérant le cœur. Elle enfla, enfla à un point tel qu'elle m'emplit totalement. Ils l'avaient photographié juste avant de le laisser agoniser, seul.

Je sentis monter en moi une colère féroce, à l'instar de celle qui devait dévorer les deux frères. Sans l'avoir prémédité, je me transformais brusquement. Le poil hérissé, je fonçais vers la porte sans réfléchir. Je heurtais celle-ci avec un bruit sourd. Ils avaient prévu leur coup en prévoyant une porte renforcée. Je ne réussis qu'à me faire mal à l'épaule. Pourtant, je réitérais ma charge, incapable d'admettre ma défaite. Elle finirait bien par céder. Ma soudaine folie fit réagir les deux hommes qui s'acharnèrent à m'arrêter.

Un loup noir s'interposa entre moi et l'objet de ma fureur.

— Aylyn, arrête. C'est ce qu'ils veulent. Nous rendre fous de rage pour mieux nous avoir.

La voix d'Arenht m'atteignit, traversant le brouillard de colère embrumant mon cerveau. Alors que je percutais, je me rendis compte de mon apparence. Impossible de me souvenir du moment où je m'étais métamorphosée. Et dire que mon homme avait su gérer sa propre douleur pour me faire face. Je me recroquevillais sur moi-même et repris forme humaine. Il me suivit de peu et m'enserra dans ses bras. J'éclatais en sanglots, m'accrochant à lui.

— Pourquoi? Pourquoi ? ne cessais-je de répéter.

La gorge serrée je vis Antonh ramasser les photos et les remettre dans la boîte avant de s'écarter. Qu'attendaient-ils de nous? 

Protège-moi  - T.2: L'Alpha [ Terminé ]Where stories live. Discover now