Protège-moi - T.2: L'Alpha [ Terminé ]

Chapitre 35.4

Il fut installé dans une salle nue aux murs d'un blanc éclatant. Notre prisonnier clignait frénétiquement des yeux, hagard. Son réveil avait de quoi être déstabilisant. Se retrouver attaché à un siège en métal dans une pièce vide, aveuglé par la lumière crue des néons, pas vraiment agréable. Je pris place à aux côtés de mon homme, le long du mur face à l'inconnu.

— T'as rien manqué, me souffla Sheren. Trenan n'a pas encore commencé à le cuisiner.

Je pouvais sentir l'odeur aigre de la peur. Sous le regard froid de notre maître d'armes, qui ne paraissait pas souffrir de la lumière, il parut se tasser encore plus sur sa chaise, si cela était physiquement possible. J'espérais qu'il en savait suffisamment pour nous être d'une quelconque utilité. La seule chose que nous eûmes à déplorer fut la rapidité avec laquelle il se déroula. Comme je l'avais prévu, moins d'une heure fut le temps nécessaire pour récolter de notre homme tout ce qu'il connaissait de l'organisation du Groupe L. Notre prisonnier n'était peut-être pas l'agent de l'année mais il avait une mémoire photographique incroyable. Il nous déballa le plan des bâtiments du QG de Tanëhl avec une précision implacable. Avant d'être enlevé et intégré dans le programme des expériences du Groupe L, le gars travaillait dans un cabinet d'expertise s'occupant des grands travaux de constructions. Cela expliquait son sens du détail.

Le vent soufflait violemment en cette fin de journée. Sous couvert de cette atmosphère orageuse, nous nous faufilâmes avec agilité le long des accès que notre prisonnier nous avait indiqués. Ceux-ci débouchaient sur les sorties des égouts. Une fois à l'embouchure de celles-ci, nous nous changeâmes en loup. L'avantage non négligeable était de nous faufiler vivement à travers les tunnels sans se contorsionner, mais il fallait supporter une odeur infecte sans pouvoir se cacher la truffe. J'eus du mal à réprimer des hauts le cœur. Une fois hors des réseaux d'évacuation, chacun prit une grande goulée d'air, le nez encore froncé par les relents nauséabonds respirés. Reprenant forme humaine, nous nous dispersâmes dans le complexe suivant le plan. Je sentis les battements de mon cœur s'accélérer alors que nous approchions de notre cible. J'appréhendais un peu de me retrouver de nouveau en face de cet alpha. J'avais encore à l'esprit ce qu'il m'avait fait subir durant ma détention dans ces mêmes lieux. Entourée par Declan, Lucius et Ferghus, notre rôle consistait à nous occuper de Tanëhl. C'est donc à découvert que nous poursuivîmes notre avancée, ne cherchant pas à passer inaperçus, bien au contraire. Le connaissant, il ne pouvait pas rater une telle occasion. On lui présentait sur un plateau une alpha qu'il convoitait et trois chefs de meute. Un long couloir à parcourir, une grande salle ouverte, toujours rien.

— Je pense qu'il a besoin d'un petit encouragement, murmura Lucius.

Son visage montra les signes d'une intense concentration. Voilà, le message télépathique était envoyé en direction de leur chef. A voir s'il répondrait à cette invitation.

Quand il le fit enfin, Lucius et moi nous arrêtâmes d'un coup, surpris par la voix de Tanëhl résonnant dans nos têtes.

— Je savais que tu reviendrais vers moi ma louve. Tu as enfin compris où se situait ton intérêt.

Je levais les yeux au ciel alors qu'il poursuivait son petit discours.

— Et tu m'as amené des invités ! Je n'en attendais pas tant de ta part. Continuez sur votre droite, je vais vous recevoir comme il se doit.

Son rire sadique résonna dans mon crâne avant que je ferme mon esprit. Lucius transmit le message de Tanëhl aux deux autres chefs de clans puis les consulta du regard. Fallait-il se jeter directement dans la gueule du loup ? Declan acquiesça. Bien que nous ayons planifié ce point, je gardais une certaine appréhension. Dieu seul savait ce qu'avait pu manigancer ce cerveau malade.

Une fois à l'intérieur d'une pièce semblable à toutes celles que nous venions de dépasser, il ne tarda pas à se montrer. La porte se referma, nous isolant du reste. On n'en attendait pas moins de sa part. Je sentis chacun se préparer mentalement à la suite du programme. Je pris le temps d'observer le maître des lieux. Son visage reflétait une tranquille assurance mais dans ses yeux brillait une lueur de mauvaise augure. Ouvrant mon esprit, je tentais de percevoir ses pensées tout en isolant les miennes, exercice que je ne maîtrisais pas encore totalement et qui requérait une concentration intense. Une fois son esprit en vue, je veillais à ne pas me laisser submerger par les vibrations intenses qui en émergeaient. J'en sortis rapidement, en ayant vu assez. Deux choses ressortaient de ce fouillis d'ondes télépathiques : le sang et un vif sentiment de vengeance. Alors que je reprenais contact avec ce qui m'entourait, je remarquais que notre hôte avait le regard braqué sur moi. J'eus la certitude qu'il savait ce que je venais de faire, pourtant, il ne parut pas s'en soucier.