Chapitre 23.2

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— Sohren. Je peux te parler une seconde?

Il mit un temps avant de se retourner. Je faillis partir, persuadée qu'il continuerait à m'ignorer.

J'amorçais un mouvement vers la sortie quand il m'arrêta d'un mot ou devais-je dire, d'un grognement. Je le dévisageais, incertaine. Il me fixa tout en restant de glace. Au moins il daignait me regarder. Je me mordillais la lèvre en hésitant sur le comportement à adopter. Attendait-il que je lui parle ici même, en plein couloir ou devais-je l'emmener vers une des salles non loin en espérant qu'il me suive? Je détestais être dans cette situation de doute. Se vengeait-il en me laissant ainsi en proie à la confusion? Finalement il mit fin à mes questionnements en se dirigeant de lui-même vers la cuisine. Je le suivais timidement, me préparant à la confrontation.

Je m'affairais sur la préparation de mon thé. Occuper mes mains pour ne pas avoir à affronter son regard peu amène.

— Tu veux quelque chose? demandais-je sans me retourner.

— La même chose, laissa-t-il tomber d'une voix monocorde.

Je remplissais donc une théière d'eau brûlante après y avoir déposé les feuilles de thé vert, sortis deux tasses, préparais le plateau. Bon, je n'avais plus rien à faire à part attendre que le thé infuse. Une grande inspiration et je me tournais vers lui. Il m'observait. Ma confusion augmenta. Passant une main nerveuse dans mes cheveux, je m'asseyais à table.

— Je...

Un rire nerveux me prit alors que nous venions tous les deux d'ouvrir le dialogue en cœur. L'ombre d'un sourire passa sur son visage, si furtivement que je me demandais si je ne l'avais pas rêvé. Pourquoi étais-je aussi empotée face à lui? Je me relevais pour servir la boisson chaude. J'étais tellement nerveuse que je finis par m'asperger de quelques gouttes bouillantes. Je réprimais à demi un cri de douleur tout en portant ma main à ma bouche. Quelle maladroite! Je le sentis s'approcher vivement. Il saisit ma main rougie par la brûlure et m'entraîna d'autorité vers l'évier. Ouvrant le robinet, il plaça ma main sous un jet d'eau froide. Je levais la tête vers lui, surprenant son regard inquiet. Il me maintint ainsi pendant une ou deux minutes. Je n'osais bouger.

— Tu n'es pas croyable.

Ses gestes doux contredisaient pourtant son ton énervé.

— Désolée.

Il me relâcha et ferma l'arrivée d'eau en soupirant.

— Je n'y arrive pas, pesta-t-il en amenant les tasses à table.

Je m'installais en face de lui, redoutant de croiser son regard.

— Ça va mieux ta main ?

— Oui. Merci.

Je lui jetais un coup d'œil pour juger de son état d'esprit. Disparue la froideur qu'il m'opposait depuis notre violente altercation.

— De quoi voulais-tu me parler au fait ?

— De notre dispute. Je... Je voulais m'excuser pour ce soir-là. J'étais sur les nerfs. Je n'aurais pas dû t'agresser comme cela.

Il but une gorgée de thé avant de répondre.

— C'était assez virulent comme attaque tout de même.

Je me mordis la lèvre, gênée. Je l'avais bien cherché en même temps.

— De toute façon je ne suis plus capable de te faire la tête plus longtemps, reprit-il en soupirant. Alors considérons-ça comme réglé. N'en parlons plus. Nous avons des problèmes autrement plus graves qu'une petite dispute.

— En effet, acquiesçais-je.

Je lui souris timidement tout en saisissant ma tasse. Je soufflais dessus avant d'en prendre une gorgée.

— Au fait, je m'excuse aussi.

Je levais la tête vers lui, surprise. Il planta son regard dans le mien.

— J'ai aussi réagi excessivement ce jour-là.

— On remet les compteurs à zéro alors ?

— Ça me semble la meilleure chose à faire, acquiesça-t-il avant de finir sa tasse.

Il se leva juste après.

— Bon, merci pour le thé. Je dois rentrer maintenant. On se reverra sûrement dans peu de temps.

— Oui. Rentre bien.

— Et toi dors un peu, tu as l'air d'en avoir besoin.

— Si seulement c'était aussi simple, murmurais-je, avant de lui offrir un sourire se voulant rassurant.

Il hésita sur le pas de la porte.

— Le deuil n'est jamais facile, dit-il d'un air grave. Mais tu es bien entourée, c'est une chance.

Puis il s'en alla, me laissant avec la fugace vision de son air bouleversé. Je débarrassais mécaniquement nos tasses dans l'évier, méditant ses paroles. Il avait raison, je devais me ressaisir. Me laisser aller ne ferait pas revenir Ethan. Si je voulais venger sa mort, j'aurais besoin de toutes mes forces.

Protège-moi  - T.2: L'Alpha [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant