CHAPITRE 64

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Les semaines passent et la douleur au fond de ma poitrine me fait toujours aussi mal. Mes parents me regardent comme si j'étais une personne fragile atteinte d'un cancer incurable. Quant à ma sœur, elle n'ose même plus me regarder dans les yeux de peur d'y voir la profondeur de ma peine et de fondre en larmes. J'accueille ma vie comme un véritable calvaire. Je mange peu, me contentant d'avaler juste ce qu'il faut pour survivre. Je ne parle pratiquement plus, vivant au jour le jour. Je me lève pour aller en cours ou en stage, puis je rentre aussitôt à la maison pour me réfugier dans ma chambre. Sony n'est plus le même, il s'éloigne chaque jour un peu plus de moi. Lui, se réfugie dans son travail jusqu'à devenir l'ombre de lui-même. Nous nous voyons à peine car nous retrouver seuls dans la même pièce, nous incommode. On évite tout contact physique, jusqu'au contact visuel.

Après l'accident, j'ai pu récupérer les cendres de mon ami, grâce aux faux papiers que Sony m'a procurée. Je suis allée les rependre sur le grand terrain vague où je l'ai vu pour la première fois. Ici, c'était notre première rencontre, ce n'était pas la plus belle, certes, mais c'était la nôtre ! J'ai dispersé sa poussière au gré du vent, en lui rendant un dernier hommage, sous le regard compatissant d'Ethan, Jared, Samantha et Sony, puis j'ai pleuré, pleuré, jusqu'à que mes yeux s'assèchent. Il me manque à chaque seconde qui passe et je pense qu'il me manquera jusqu'à la fin de ma vie. Voilà comment la belle s'éprit de la bête !

Ma visite chez le gynécologue démontre que mon corps a bien tout évacué et que je dois prendre la pilule pour réguler mon corps et pour éviter que je ne tombe enceinte de sitôt. Pour ça, il n'y a aucun risque, car nous ne faisons plus rien depuis des semaines et c'est à peine si nos lèvres se frôlent pour se dire bonjour... Jusqu'à ce fameux soir de mars... Sony pénètre par la fenêtre de ma chambre en pleine nuit sans y être invité. En silence, il fond sur mes lèvres pour m'embrasser avec une passion dévorante qui me donne la nausée. J'essaie de le repousser, mais il m'en empêche, en s'affirmant un peu plus, jusqu'à que je cède à ses avances. Pourtant, psychologiquement je ne suis pas prête à m'offrir à lui et je ne le serais sans doute plus jamais car le plaisir n'a pas lieu d'être dans mon chaos, mais physiquement mon corps le réclame contre mon gré. J'abdique, le laissant s'approprier mon corps comme il le souhaite. Ces gestes sont sauvages, ses mains sont fermes et sa bouche est agressive. Dans son regard, il dégage une telle intensité que je détourne les yeux, puis se sentant limite repoussée, il s'enfonce en moi avec toute la force qu'il peut avoir. C'est la première fois que je le perçois aussi envahissant. Je ne sais pas ce qu'il éprouve à cet instant, on dirait qu'il me fait l'amour avec rancœur et haine. Sa peau si familière me devient indéchiffrable, nous ne sommes plus les amants d'autrefois. Il va et vient avec lenteur mais dureté, faisant de ce plaisir un moment presque insupportable. Tiraillée entre le désir et l'écœurement, je me laisse pleurer quand l'orgasme me submerge. Sony, lui, éprouve le besoin de me faire mal, en me mordant la lèvre jusqu'au sang, dans un grognement qui lui parait douloureux. Nos corps se dessoudent, enfin, et toujours sans un mot, il se rhabille avant de disparaitre dans la nuit. Je ne sais pas ce qu'il vient de se passer, mais je peux affirmer avec certitude que quelque chose vient de changer. C'est le lendemain à la fac, que je comprends le sens des évènements de la veille. Et dans la panique la plus complété, je m'absente au milieu de mon cours en courant pour aller chez lui.

« Des ADIEUX, c'était un adieux »

Dans son appartement, c'est son frère qui m'accueille.

- Malcolm, tu n'es pas en cours ?

- Non ! dit-il d'une voix pale.

- Où est Sony ?

Le jeune adolescent évite mon regard pour regarder honteusement le sol.

- Réponds-moi Malc, il est où ? demandé-je sur un ton ferme.

- Parti !

Et voilà que ma crainte se réalise, il a fui, il m'a abandonnée, lui aussi, détruisant ce qu'il restait de mon cœur. Je refoule brièvement la réalité en allant dans sa chambre, dans l'espoir de le voir. Mais rien, il n'y reste que ses meubles désertés d'une quelconque présence. Il a tout pris, il est réellement parti. Lâche ! Ma tristesse et mon angoisse font place à ma haine. J'explose de colère cassant tout sur mon passage, chaise, lampe, miroir et je finis par ses dessins sur le mur que je déchire en criant de rage. Puis abattue, je me laisse tomber à genoux, pour encaisser une autre forme de douleur dont j'ignorais l'exitance. Après avoir perdu Vincenzo et mon bébé, je pensais ne plus souffrir comme ce jour sur la plage, je me suis largement trompée, car la disparition de l'homme que j'aime m'anéanti encore plus profondément.

- Pourquoi, pourquoi m'a-t-il fait ça ? demandé-je à Malcolm qui se tient sur le pas de la porte.

- Je ne sais pas.

- Pourquoi tu es resté là, toi ?

- Il me laisse vivre ici pour que je reste auprès de Jeanne, mon oncle Diégo va venir s'installer avec moi.

- Tu le sais depuis quand ?

Il ne me répond pas alors je me relève du sol, pour le pousser violement sur la poitrine. Malcolm se laisse faire en reculant d'un pas pour retrouver son équilibre.

- Réponds-moi Malcolm, depuis quand le sais-tu ?

- Trois jours.

« Trois jours ! »

Il a prémédité son coup. Il ne fait jamais rien au hasard, sa décision à du murir depuis des mois déjà. Il savait qu'il allait m'abandonné. Comment a-t-il pu me faire une chose pareille ? Salaud ! Je ne peux plus contenir mon agressivité, alors dans un élan incompris et limite involontaire, je gifle si fort Malcolm que ses lunettes atterrissent sur le sol.

- Lâche! m'écrié-je avant de prendre conscient de mon interlocuteur. Désolée Malcolm, ce n'est pas toi que je voulais frapper.

- Ce n'est rien, laisse tomber, il fallait que ça sorte.

A travers ce geste, je pensais atteindre Sony, mais c'est son frère qui reçoit mon courroux car il est avec moi et que... LUI, n'est plus là. Il est loin, très loin, trop loin et qu'il vient d'emporter ce qu'il restait de mon cœur.

A présent, je ne suis plus rien.

Et puis..., plus rien.

Santana partie 2Where stories live. Discover now