À LA TÊTE DU CARTEL : II

Chapitre 9 - Garde à vue

Arrivée dans sa suite personnelle du palace africain, Louisa fulmine devant les grandes baies vitrées ouvertes sur l'océan.
L'altercation avec Oléana Thörsen se répète en boucle dans son esprit et dans un geste de rage incontrôlé, le bras de Louisa vient raser une petite table basse. La lumière à chevalet, le téléphone, ainsi qu'un vase en cristal contenant un délicat bouquet de roses, sont propulsés dans les airs et viennent se fracasser au sol dans un bruit tonitruant.
Louisa voudrait hurler à s'en détruire les cordes vocales, se défouler et retourner entièrement cette chambre pour évacuer sa rage. Elle rêve d'éventrer les canapés, de déchirer les grandes peintures contres les murs, de pulvériser toutes les vitres à coups de chaise en imaginant que chacun de ces objets seraient à l'effigie de cette prétentieuse d'Oléana Thörsen. Mais la raison lui revient subitement lorsqu'André, ayant entendu le fracas au travers de la porte, pénètre rapidement dans la chambre révolver en main.

—Que se passe t-il ?! 

Il pose directement les yeux sur les débris jonchant le sol. Louisa, la main ensanglantée, reste silencieuse puis se tourne en direction de l'océan.

—C'est la Norway Arctic... murmure-t-elle en tâchant de contenir sa rage. Cette Oléana est exécrable et ne se laisse pas démonter...
—C'est qui elle ?

Louisa, surprise d'entendre la voix d'Hélène se retourne subitement. La main en sang, les yeux presque encombrés par des larmes de rage, Louisa part enlacer son amie. Sa longue chevelure rousse et son délicat parfum lui avait manqué. Hélène est devenue son réconfort dans ce monde si brutal. 

—Eh bien ! s'exclame Hélène en la serrant vigoureusement dans ses bras. J'ai bien fait de prendre le premier avion pour Bonny. Apparemment j'ai loupé beaucoup de choses.
—Si tu savais... marmonne Louisa, tête contre son épaule. Alors comment ça s'est passé en Slovaquie ?
—Julien avait raison. Les Balaz reprenaient du service mais je n'ai pas réussi à obtenir le nom de leurs clients. Mais je me suis bien vengée, dit-elle tout sourire.
—Qu'as-tu fait ? demande André.
—Eh bien j'ai été fidèle à notre nouvelle spécialité ! J'ai tout fais péter ! scande Hélène en écartant les bras. C'était jouissif bordel, si t'avais vu ça Louisa !

Mais la jeune dirigeante semble désemparée face aux mots de son amie.

—Oh non... j'ai promis à Henrique de ne pas faire de vagues... Je crois qu'exploser une dizaine de Balaz n'était pas la bonne solution.
—Depuis quand on se préoccupe de ce qu'Henrique Tavares pense ?

Hélène essuie discrètement les larmes de Louisa.

—Depuis que tout les grands cartels du monde entier ont une dent contre moi ! Et l'arrivée de la la princesse nordique n'aide pas ! Elle m'a humilié !
—Qui t'a humilié ? réplique aussitôt Hélène. Il faut que je m'en charge ?
—C'est pas si simple...

Louisa part s'affaler dans l'immense sofa blanc tandis qu'André lui ramène un chiffon pour éponger la coupure sur sa main suite à sa violente crise de rage.

—Mademoiselle Oléana Thörsen, marmonne Louisa avec rancœur. Comme moi, elle a hérité de la branche commerciale de Thor industries. C'est elle qui commande la Norway Arctic.
—Comment elle est ? demande Hélène en s'asseyant à ses côtés.
—Parfaite... Elle a de l'élégance, une stature, une beauté inégalable et un calme déconcertant. Et elle semble déjà mieux comprendre ce monde que moi.
—J'appelle Julien pour qu'il effectue des recherches sur cette Oléana, lance André en branchant l'ordinateur portable.

Hélène enjambe le capharnaüm au sol et part se servir un whisky.

—On y est, murmure André.

Julien et ses yeux bleus apparaissent sur l'écran.

—Salut André !
—Bonjour Julien, comment vas-tu ?
—Tout va pour le mieux ! Depuis quelques jours, je fais quelques aménagements dans la tanière et je peux te dire qu'on est parer à toutes les attaques ! Même nucléaire c'est pour te dire !

Julien, avec son bras tatoué, attrape une combinaison jaune de protection.

—Anti rayons-gamma, anti radiation solaire, j'ai acheté tout les équipements pour...
—Julien on a pas vraiment le temps là, coupe André en s'éloignant de l'écran.

Louisa et Hélène, assises sur le canapé, font signe de la main.

—Ah salut... lance doucement Julien.
—Salut, répond timidement Louisa.

Depuis leur dernière discussion qui fut houleuse et fatale pour leur relation, de longues semaines de silence s'étaient imposées entre Louisa et Julien. Néanmoins, certaines rancœurs demeuraient ancrées mais étaient soigneusement dissimulées par chacun d'eux pour permettre une meilleure coopération dans l'équipe.
Tout les deux se regardent pendant un court instant, mais Hélène comme à son habitude, n'a pas le temps pour ses gamineries et reprend la parole.

—Cherches des infos sur Oléana Thörsen. C'est elle qui dirige la Norway Arctic.
—Thörsen comme Rof Thörsen ? Le pétrolier norvégien ?
—Tu connais ? interroge André.
—Oui, j'ai fouillé dans l'histoire de la Norway Arctic et plusieurs fois le nom de Rof Thörsen ressortait.
—C'est sa fille, reprend Louisa. Elle a hérité de la branche commerciale et aujourd'hui ils viennent de rejoindre le cercle des cartels.
—Qu'est ce qu'il vous faut ?
—Des infos. Tout ce que tu as sur elle, dit Hélène en sirotant son whisky.
—Merci Julien.

André s'avance pour fermer l'ordinateur mais Julien l'interpelle.

—Attends ! Je crois qu'on a un problème.

Les yeux de Julien scrute l'écran devant lui.

—Oh merde... dit-il le visage figé.
—Quoi ?! Accouche ! s'exclame André.
—Louisa, je viens de recevoir une alerte... murmure Julien. Ton frère est en garde à vue.