Chapitre 30 : La double vie de Marly

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JUILLET 1975

Les révélations que mon père avait faites à ma mère m'inquiétèrent tant et si bien que, le lendemain, quand cette dernière me déposa chez les Wade, j'avais les yeux gonflés de fatigue et étais incapable d'entendre le moindre bruit sans sursauter. Ma mère était à peu près dans le même état que moi, aussi je n'eus pas à justifier mon silence inhabituel tandis que nous progressions côte à côte dans les rues de Flagley-le-Haut, le village où vivait Angel, mais c'était une maigre consolation en comparaison de la sombre époque vers laquelle on voguait. Et puis, de toute façon, sitôt que j'eus retrouvé Angel et Becca, je ne pus plus faire semblant et dus expliquer la raison de mon trouble.

Leurs réactions respectives furent à l'image de leur personnalité. Angel en fit des caisses, imaginant déjà la chute du Ministère de la Magie, tandis que Becca se contenta d'hausser les épaules avant de déclarer qu'elle avait faim. Quant à moi, je tentai d'adopter une vision intermédiaire tout en luttant pour arrêter d'être obsédée par le prénom inscrit sur la porte de la chambre faisant face celle d'Angel, qui avait autrefois été celle de son frère.

Sinon, de cette semaine de vacances, je ne me souviens pas de grand-chose si ce n'est la déception que j'avais eue en apprenant que Theo était parti chez ses grands-parents avec sa mère et que je n'allais donc pas pouvoir passer du temps avec lui comme je l'avais escompté en venant à Flagley-le-Haut.

Quand je revins chez moi, c'est le visage grave que je retrouvai mes parents, qui avaient décidé que nous révéler les problèmes que traversait le Ministère valait mieux pour nous. Selon eux, nous avions le droit de savoir ce qui se passait et ils allaient de toute façon faire en sorte que la vérité sorte au grand jour tôt ou tard, aussi, tant que nous restions discrets, ils nous assurèrent que nous mettre au courant ne représentait aucun danger particulier pour la carrière de mon père.

Plus tard ce soir-là, une fois que le monde fut endormi, je quittai ma chambre sur la pointe des pieds. Je me souviens avoir trouvé l'air si froid en dehors des couvertures que j'avais attrapé le plus gros pull que j'avais en ma possession avant de m'aventurer à pas de loups dans l'escalier, mes tennis à la main. Arrivée devant la porte d'entrée, j'allai les enfiler lorsque celle-ci s'ouvrit et qu'une silhouette fit irruption dans le hall, me figeant sur place par la même occasion.

L'espace d'un instant, mille et un scénarios défilèrent dans mon esprit. Et si ce que mes parents craignaient tant était arrivé plus tôt que prévu ? Et si cette personne qui venait de pousser la porte était un mage noir de la trempe de Grindelwald ou un de ses sbires ? Et si... ? Tout à mes suppositions loufoques, je crois que je n'ai jamais été aussi heureuse de voir le visage de ma sœur apparaître devant moi, faiblement éclairée par la lune traversant la vitre. Aussitôt, je planquai mes tennis derrière la sculpture de chamois qui trône encore aujourd'hui dans l'entrée et fis au mieux pour afficher une expression neutre.

— Alicia ?! s'exclama Marly sous le coup de la surprise. Qu'est-ce que tu fais là ?

— Chuuuut, la réprimandai-je vivement en pointant d'un doigt la chambre de mes parents située juste au-dessus. Je... J'allais me faire un lait chaud au miel, j'ai froid, inventai-je. Tu en veux un ? demandai-je en tentant d'adopter un air détaché tout en priant pour qu'elle dise non.

— Non merci, ça va, fit-elle alors que je pénétrai dans la cuisine, elle sur mes talons.

— Qu'est-ce que tu faisais dehors ? questionnai-je en attrapant la bouteille de lait, à présent forcée de me préparer véritablement un lait chaud pour que mon excuse soit un tant soit peu crédible.

— Oh... euh... je prenais un peu l'air. Pourquoi est-ce que tu es habillée ?

— J'ai froid, je te dis, répétai-je en mettant une casserole de lait à chauffer.

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