Chapitre 3 : Le cadavre englouti

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AOÛT 1976

Notre escapade au manoir Martins fut atrocement compliquée à mettre en place. Il fallut tout d'abord inventer excuse pour pouvoir nous éclipser de Tinworth le temps d'une journée, puis convaincre mes parents et les Martins qu'on ne risquait rien en leur absence, même en dehors du village. Joyce et moi étant de bonnes menteuses, la première étape fut un jeu d'enfant, mais il nous fallut attendre l'anniversaire de Joyce et quatre adultes un peu éméchés pour nous acquitter de la seconde. Ce ne fut donc qu'à la toute fin du mois d'août qu'Haley Martins nous déposa finalement en plein cœur du Londres Moldu où nous avions prétendu vouloir nous promener avant notre retour à Poudlard.

— Vous êtes certaines que vous ne voulez pas que je vous accompagne ? nous demanda-t-elle pour la énième fois alors qu'elle se préparait pourtant déjà à transplaner.

— Haley... soupira Joyce. Déjà que tu n'étais pas obligée de nous emmener, on ne va pas non plus te forcer à nous accompagner toute la journée ! Et puis, tu sais, on comptait tout faire à pied, alors tu finirais par être fatiguée avec le petit bonhomme qui te prends toutes tes forces... continua-t-elle avec un geste évasif en direction du ventre maintenant bien arrondi de Mrs Martins.

Les yeux plissés, cette dernière nous jaugea encore quelques instants, sûrement pas complètement convaincue par le mensonge que nous avions trouvé pour pouvoir nous rendre au manoir dans le plus grand secret.

— Oh, je t'en prie ! finit par s'écrier Joyce qui commençait à s'agacer. Nous sommes du côté moldu de Londres, que veux-tu qu'il nous arrive ? Ce n'est pas comme si nous avions choisi de nous promener dans l'Allée des Embrumes !

Mrs Martins caressa des yeux la foule tranquille de moldus qui allait et venait dans l'avenue sur laquelle débouchait la petite rue où nous avions transplané, puis hocha la tête, nous fit promettre d'être de retour au même endroit à cinq heures tapantes et un craquement nous annonça son tranplanage.

— Pfiou... soupira Joyce. J'ai cru qu'elle ne nous laisserait jamais !

— Te plains pas, si c'était ma mère qui nous avait accompagnées, on serait toujours en train d'essayer de la convaincre que nous ne risquons rien.

La Serpentard eut un petit sourire et s'enfonça encore un peu dans la rue peu fréquentée. Lorsqu'elle fut sûre que personne ne pouvait nous voir, elle sortit sa baguette magique de la poche de son jean et la pointa vers le ciel. À peine quelques instants plus tard, un bus violet à double impériale apparut et Joyce et moi échangeâmes un regard impatient avant de grimper à l'intérieur.

— Ce bus n'a pas l'air très confortable... grommelai-je en me laissant tomber dans un fauteuil au fond du premier niveau.

— Il ne l'est pas, mais c'est le seul moyen de transport qu'on ait à notre disposition, s'excusa Joyce en prenant place en face de moi après avoir indiqué notre destination au contrôleur.

Quelques secondes plus tard, le Magicobus démarra et s'élanca dans la rue à pleine vitesse. Je grimaçai lorsqu'il manqua de foncer dans une poubelle et m'accrochai inutilement aux bras de mon fauteuil tandis qu'il quittait la capitale pour les environs d'un village quelconque. J'étais sur le point de questionner Joyce sur les objectifs de sa venue au manoir Martins qu'elle n'avait toujours pas daigné me révéler lorsqu'un détail me frappa.

— Joyce ! m'exclamai-je et en ouvrant de grands yeux horrifiés. On est de retour à Tinworth !

D'un même mouvement, nous plongeâmes derrière nos sièges respectifs.

— La jeunesse de nos jours... commenta la sorcière qui était assise derrière nous.

Je lui adressai un regard canaille et rampai jusqu'à Joyce afin de maudire avec elle l'imbécile qui avait manqué de faire échouer tout notre unique chance de nous rendre au manoir Martins. Prudemment, trop curieuse pour m'en empêcher, je risquai un œil en direction de l'avant du bus où le nouveau passager prenait possession de son ticket auprès du contrôleur et me figeai d'effroi.

Life Always RestartsWhere stories live. Discover now