Chapitre 34 : Grands-pères

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RAPPELS (sait-on jamais) : Le don de clairvoyance que possède la famille Azer se manifeste sous la forme de rêves durant lesquels les porteurs du don reçoivent la visite de leur grand-père ou grand-mère (en fonction de la branche de la famille d'où vient le don). Alicia, Jake, Marly et Arthur reçoivent donc la visite de John, le père de Benjamin. Ce dernier a eu une vie assez mystérieuse : tout ce qu'Alicia sait, c'est que son père, Barthelemius Azer, a été assassiné par les Martins dans sa maison à Cabourg le 14 juillet 1919, lors d'un incendie criminel (cf. chapitre 3 de ce tome), et qu'il a rencontré sa grand-mère à l'orchestre, avant de l'épouser, d'engendrer Benjamin et de mourir, assassiné par Euphellys Martins le 27 février 1945. Enfin, dans le Cercle des Sept Dons, on compte aussi les Hoffen, famille dont est issue la première femme du père d'Angel, avec laquelle il a eu Bellamy, qui avait donc le don de légilimancie. La lignée porteuse du don s'est éteinte avec lui.


— Tu as mis du temps à revenir.

— Tu n'avais pas besoin de moi.

La voix était bien plus grave que les deux dernières fois, l'homme qui me tournait le dos plus grand. Mais toujours aussi mince.

— J'ai du mal à le croire.

— Parce que tu n'as jamais osé croire que tu en avais dans les tripes.

Daignant enfin me regarder, John se retourna, un fin sourire sur les lèvres, du sang sur la chemise et un trou dans la poitrine.

— Tu as changé, commentai-je.

— Toi aussi. Tu as grandi.

J'haussai les épaules.

— Enfin bon, reprit-il. Ça fait trois ans, après tout.

— Ça fait des morts et une stérilité, rectifiai-je d'un ton dur. Où on est ?

John rit doucement.

— Et dire qu'avant c'est toi qui me trouvait abrupt... On est à Margate.

Je serrai les dents.

— C'est là que...

— Que le corps de Regulus a été retrouvé. Oui.

— Je ne vois pas ce qui pourrait me pousser à avoir envie de me retrouver ici.

— La question que tu te poses tout au fond de toi.

— Et quelle serait-elle ?

— Si oui ou non la mort de Regulus a changé quelque chose à ce que vous auriez pu vivre.

Je fronçai les sourcils. Suite à mes deux précédents rêves, j'avais appris que John avait bien plus souvent raison que je ne l'aurais voulu, mais ma relation avec Regulus était un domaine bien trop intime pour que les raisonnements qu'il avait à émettre à son propos soient entendus d'une bonne oreille.

— Évidemment que ça a changé quelque chose. Il est mort. Par définition, cela enlève toute notion de vie à son futur, dont la seule perspective un tant soit peu amusante est d'apprendre combien de temps il te faut pour être complètement décomposé.

John soupira.

— Ce n'est pas de ça dont il s'agit.

— Alors quoi ? Il est mort, se questionner sur un avenir dont il ferait partie n'a plus aucun sens, plus aucune rationalité !

— Votre situation n'était pas unique, tu sais. Des sentiments qui se développent là où il ne devrait pas y en avoir, ça arrive tout le temps. Construction de l'esprit ou réelle magie, cela reste à déterminer, mais ce serait une sottise de croire que le courage d'assumer ce qu'on ressent gagne à chaque fois.

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