Chapitre 41 : That's All In Your Head

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Je ne savais pas où j'étais.

Alors que j'avais la quasi-certitude d'avoir reçu un coup violent à l'arrière de la tête, je ne ressentais pas la moindre douleur. Le sang ne coulait plus. Il ne semblait même pas déjà avoir coulé. Je ne percevais pas la croûte écarlate qu'il aurait dû laisser sur mes cheveux.

Et je ne savais pas où j'étais.

Ma peau n'était plus recouverte d'une épaisse couche d'eau. Les gouttes de pluie ne s'amoncelaient plus sur mon visage. Je n'étais même pas mouillée, en fait. Non, j'étais parfaitement sèche et je sentais les rayons du soleil me chatouiller agréablement les joues et le bout du nez.

Et je ne savais pas où j'étais.

Je n'entendais plus les cris des supporters et les hurlements du vent dans mes oreilles. L'étrange et lointain coup de sifflet que j'étais pourtant certaine d'avoir entendu avant de sombrer dans les méandres d'un monde inconnu ne me parvenait plus. Seuls quelques bruissements doux du vent dans les feuilles des arbres et le chant délicat des oiseaux caressaient mon ouïe.

Et je ne savais pas où j'étais.

Contrairement à ce que j'avais pensé, ouvrir les yeux ne me demanda aucun effort. Le soleil m'éblouit instantanément et je peinai à distinguer un ciel bleu qui se détachait au travers des feuilles ciselées du chêne sous lequel j'étais allongée.

Mais je ne savais pas où j'étais.

Je me redressai sur les coudes et constatai que je portais une robe d'été que je ne me souvenais pas posséder. En me mettant debout avec une légèreté qui n'était pas la mienne, je sentis mes pieds nus s'enfoncer dans l'herbe fraîche aux brins d'un vert brillant.

Mais je ne savais toujours pas où j'étais.

— Viens ! s'exclama alors une voix fluette et enfantine dans mon dos.

Alors qu'en temps normal j'aurais sursauté, ce fut dans le plus grand des calmes que je me retournai vers un petit garçon d'une dizaine d'années qui me contemplait avec un grand sourire, quelques mètres plus loin. Ses yeux marrons pétillaient d'excitation et le vent décoiffait ses cheveux châtains. Je le connaissais. Mais je ne savais plus qui il était. Pas plus que je ne savais où je me trouvais, malgré la familiarité qui se dégageait de l'endroit.

— Viens, Alicia, j'ai quelque chose à te montrer !

Si j'avais réellement été maître de mes gestes, je ne me serais pas approchée de lui. Je n'aurais pas saisi la main encore potelée qu'il me tendait. Je ne l'aurais pas laissé m'entraîner dans sa course. Je n'aurais pas courbé le dos pour m'adapter à sa petite taille ni réduit mes foulées pour rester à son rythme.

Mais voilà. Je n'avais plus l'impression de décider de mes mouvements. Et je ne savais toujours pas où j'étais.

***

— Qu'est-ce qu'on fait là ? osai-je enfin demander au petit garçon qui m'avait traînée jusqu'à un buisson où il m'avait indiqué de m'accroupir. Et puis qui est-ce que tu es, d'abord ?

— Chuuut ! s'exclama-t-il en plaçant un doigt sur ses lèvres. Un jour tu comprendras, je te le promets.

— Mais qui es-tu ?!

— Est-ce que ça a une importance ? Je suis là, c'est tout. C'est à moi te de guider. Et laisse-moi te dire que tu t'es fait désirer, ça fait des années que je t'attends.

Je soufflai d'agacement. Je ne savais plus qui il était, mais ce garçon commençait à m'exaspérer. N'ayant rien d'autre à faire, je reportai mon attention sur les feuillages qui nous entouraient. J'avais toujours la curieuse impression d'être déjà venue ici. Tous les détails de ce sordide rêve m'apportaient une sensation de déjà-vu que je n'arrivais pas à estomper.

Life Always RestartsNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ