Chapitre 10 : Du rêve au cauchemar

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FÉVRIER 1977

Après la visite de John, les jours me semblèrent teintés d'une lumière plus douce. Même si, au départ, comprendre qu'il s'était laissé tuer sans se défendre fut dur à admettre, la passivité dont il avait fait preuve m'ôtait un peu de la culpabilité que je n'arrivais pas à arrêter de ressentir. Je mentais toujours à propos de sa mort et cela m'écœurait, mais, en même temps, qu'aurais-je dit à ma grand-mère ? à mon père ? Qu'il s'était laissé crever alors qu'Euphellys Martins pointait un revolver sur sa poitrine ? C'était tout bonnement inenvisageable. Je ne pouvais pas les priver de la dernière image qu'ils avaient gardée de lui.

De plus, avec les multiples attaques qui ébranlaient le monde magique sans jamais parvenir à toucher Poudlard, savoir que j'étais menacée de mort par des personnes dont je ne connaissais pas le visage me parut moins inquiétant. Si Voldemort et ses nombreux sbires n'arrivaient pas à s'immiscer à l'intérieur des murs du château, comment une organisation qui n'avait comme mobile à mon encontre que l'existence d'une marque cachée derrière mon oreille pouvait-elle bien réussir à m'atteindre ?

Seul mentir à Angel restait toujours aussi difficile. Mais plus les jours passaient et plus une part de moi se persuadait qu'elle n'aurait jamais les moyens de découvrir ce que je lui cachais, et ça atténuait le malaise que je ressentais en sa présence.

Je mis du temps mais, enfin, après les douloureuses révélations de l'Éventrée, je repris du poil de la bête et appris à vivre avec. Et, plus que tout, je compris que mon grand-père avait raison : à chaque battement son silence ; à chaque mauvaise passe son renouveau.

Il y avait juste un élément qu'il n'avait pas pris en compte. Au cours de son cycle vital, le coeur ne se contractait pas qu'une fois, mais bien deux. Aussi destructeur que pouvait être le premier battement, le second pouvait l'égaler en tout point, et il ne me fallut qu'une journée pour le comprendre.

***

5 FÉVRIER 1977

C'était le 5 février 1977. Si je m'en souviens aussi bien, c'est parce que, sur le podium des journées les plus difficiles que j'ai eues à affronter, elle se situe sans peine à la deuxième position, après le 1er novembre 1981. Et, à l'image de cette Toussaint funeste, elle avait extrêmement bien commencé. Une sortie à Pré-au-Lard avait été organisée, à la fois pour permettre aux élèves de se changer les idées à l'extérieur et pour que le Ministre de la Magie, Harold Minchum, puisse montrer à la population que, si les sorciers les plus vulnérables pouvaient continuer à vivre normalement en dépit des attaques qui rythmaient l'actualité, elle le pouvait aussi.

Si ça n'avait tenu qu'à eux, Dumbledore et le reste du corps professoral auraient annulé la sortie mais, faute de pouvoir aller à l'encontre de la décision ministérielle, ils se contentèrent d'accabler les élèves de mesures qui, au final, s'avérèrent inutiles. Sur leur initiative, l'heure de retour au château fut fortement avancée, des officiers de la Brigade de Police Magique furent dépêchés à Pré-au-Lard pour patrouiller dans les rues du village et les élèves reçurent l'obligation de se promener par groupes de trois minimum, un des membres dudit groupe devant être au moins en sixième année.

C'est ainsi que la journée que j'avais prévue de passer avec Nathan en tête à tête afin que nous puissions discuter de ce nous étions ou n'étions pas se transforma en une plaidoirie interminable de Joyce qui avait accepté de nous accompagner.

— J'aurais jamais dû vous dire oui ! passa-t-elle l'ensemble du trajet jusqu'à Pré-au-Lard à répéter. Maintenant, je vais devoir tenir la chandelle pendant toute une journée !

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