Chapitre 68 (partie 2)

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Alors qu'elle buvait une tasse de thé, en lisant une lettre de son beau-père, on sonna à la porte de devant. John vint lui remettre une carte de visite sur un plateau d'argent. Dans une écriture élégante quoiqu'un peu trop ornementé pour être parfaitement lisible, elle déchiffra : Mr Mickaël, Galeriste.

– Ce Monsieur est accompagné de trois porteurs les bras chargés de paquets, ajouta John. Des tableaux je suppose.

– Il a fait vite. Mais je l'attendais. Faites-le donc entrer.

Mr Mickaël vint lui faire un baisemain chaste avec autant de cérémonie que si elle était une altesse royale.

– Milady, je ne pouvais laisser passer un jour sans vous voir, déclara-t-il en riant.

– Devrais-je vous faire préparer une chambre pour que viviez ici à demeure ?

– Oh loin de moi l'idée de m'imposer ! Mais j'ai pu assez facilement trouver des toiles peintes par ce bon vieux Shalott. Je suis immédiatement venu afin de les mettre à votre disposition. J'ai noté votre intérêt.

– Et je vous en sais gré Mr Mickaël.

– Et moi donc ! La voix d'outre-tombe de Lord Blake résonna dans la pièce qui s'obscurcit d'un coup, comme si un nuage noir venait de voiler le pauvre soleil.

– Mr Mickaël, je vous présente mon cher et tendre époux.

– Milord ! C'est un honneur, s'exclama le galeriste de son ton le plus flagorneur.

Le géant lui répondit d'un sourire carnassier qui fit se recroqueviller le petit homme.

– Alors que nous amenez-vous aujourd'hui ?

Le vendeur, un peu tremblant, visiblement impressionné par Joshua et sans doute gêné par les regards peu amènes qu'il lançait à son épouse, dévoila les cinq œuvres qu'on avait discrètement déposés sur des chaises.

– Pas d'hommes dans leur plus simple appareil ? Joshua s'approcha de Cassandre, se pencha à son oreille afin d'être certain de n'être entendu que d'elle. Vous devrez vous contenter du triste spectacle que je vous ai offert ce matin.

Ses yeux jaunes la défiaient, mais de quoi ? Voulait-il qu'elle affiche une mine dégoûtée ? Si elle lui disait qu'elle l'avait trouvé beau, il ne la croirait pas. Alors quoi d'autre : que cela n'avait pas d'importance, qu'elle avait elle-même des cicatrices et qu'il en fallait davantage pour lui faire pousser des cris d'orfraies. Elle aurait voulu mettre les choses à plat afin d'éviter que cela ne dégénère, Mais ce n'était ni le lieu, ni le moment de s'occuper de ses problèmes d'ego décida-t-elle. Elle n'avait pas la moindre envie de se donner en spectacle devant témoin. Elle se contenta donc de lui prendre la main avant de se tourner vers Mr Mickaël.

– Ceux-là sont plus difficiles à dénicher, répondit-il à la réflexion ironique de Joshua. Achetés par des... connaisseurs. Nombre d'entre eux ont quitté la ville depuis longtemps, quand ils ne se cachaient pas derrière un anonymat de bon ton. Bien sûr, je ferais des recherches mais cela prendra sans doute un peu de temps.

– J'ai toute confiance en vos capacités Mr Mickaël, en ayant si vite trouvé ceux-là vous m'avez prouvé vos qualités d'enquêteur chevronné.

Le galeriste rosit du compliment, fier de lui, il se redressa comme un garde royal faisant le planton devant Buckingham Palace

Cassandre tirait d'une main ferme son mari vers les toiles. La pleine lune approchait et elle avait, semble-t-il parfaitement retrouver la santé puisqu'il avait du mal à s'opposer à l'irrésistible traction. Ses doigts n'étaient plus entourés de bandages et comme elle ne portait pas de gants, il pouvait voir des cicatrices qui semblaient avoir plusieurs mois, derniers souvenirs des plaies qui il y a encore quelques jours lacéraient ses mains. Décidément, les meneurs de loups ne cesseraient jamais de le surprendre.

Quand les loups se mangent entre euxWhere stories live. Discover now