Chapitre 78 (Partie 1) -Devereux

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Le commissaire Hector Devereux se tenait debout devant la fenêtre du salon, observant à la lumière déclinante du jour, le manège des ouvriers qui vidaient Blake House. Miss Hicks les guidait depuis le perron avec des faux airs de cheffe d'orchestre. Cela avait le mérite de le distraire de la pièce dans laquelle on l'avait installé et particulièrement du buffet sculpté d'une multitude de tête de chérubins grimaçants. Ils semblaient tous le regarder avec leurs orbites vides.

Il ne se retourna que lorsque lady Blake entra dans la pièce. Le spectacle était bien plus agréable, elle avait une mine superbe. Bien qu'un peu échevelée, elle était comme dans son souvenir d'une beauté quasi surnaturelle, elle en aurait presque été intimidante sans ce lumineux sourire. Un sourire qui lui parut bien plus naturel que celui qu'elle lui avait offert lors de leur dernière entrevue.

– Commissaire Devereux ! Quelle surprise !

– J'espère ne pas vous déranger.

Il la vit lever les sourcils, regarder vers la porte, avant de lâcher un :

– Vous êtes le bienvenu, je m'en veux seulement de vous accueillir dans de telles conditions. Nous ne sommes pas vraiment en état de recevoir, vous avez dû vous en rendre compte.

– Effectivement. Est-ce prudent d'ailleurs ? Un tel remue-ménage, ces allées et venues sans aucun contrôle de qui rentre et de qui sort.

– Pourquoi une telle remarque ? Devrions-nous nous inquiéter à votre avis ? Lui demanda-t-elle en caressant la tête de sa chienne qui dévisageait leur visiteur avec une fixité assez inquiétante. Ce dernier, mal à l'aise se balança sur ses pieds.

Elle lui fit signe de suivre son exemple et de s'asseoir dans un des certes ignobles mais très confortables fauteuils tandis qu'Artie se roulait à ses pieds sans pour autant cesser de surveiller les faits et gestes de leur visiteur.

Le policier garda un moment le silence devant le sourire de sphinx de son hôtesse. Il n'était pas tout à fait certain de l'approche qu'il devait choisir. Cette femme était indéniablement intelligente et il se dégageait d'elle une assurance qu'on rencontrait rarement chez d'aussi jeunes personnes. Alors pourquoi tergiverser ?

– Milady, nous savons tous les deux que vous êtes partie prenante dans l'enquête que mène Mr Brogan, et je doute qu'il vous ait tue la visite que je lui ai rendue il y a quelque temps.

– Effectivement, nous avons... des visées communes.

– Nous partageons TOUS les mêmes visées.

Elle garda un instant le silence et il fut saisit par l'éclat bleu de son regard qui semblait transpercer les barrières de son esprit. Pour un peu, il aurait pu penser être en face d'une télépathe.

– Vous nous exhortez à la prudence, finit-elle par dire. Je suis tout à fait prête à suivre vos conseils en ce point, car je ne vois pas pourquoi je devrais croire un seul mot sortant de votre bouche. Après tout vous vous êtes présenté à nous en premier lieu sous une fausse identité. Et cela me pousse à considérer vos déclarations avec une certaine circonspection. Vous me pardonnerez ?

– Évidemment et je suis rassuré de voir que vous n'êtes pas naïve au point d'accorder votre confiance à un parfait étranger sous prétexte qu'il est dépositaire d'une quelconque autorité.

John entra en portant deux candélabres, suivit de Louis les bras chargés d'un plateau.

– Voilà Milady.

Elle attendit que les serviteurs aient allumé les bougies et quitté la pièce en laissant la porte entrouverte cependant avant de continuer.

– Lait et sucre Commissaire ? Il acquiesça. Vous nous avez dit de nous méfier des canaux classiques de communication, de ne pas confier nos lettres aux services postaux britanniques. Nos lettres auraient donc pu être interceptées. Par qui d'après vous ?

Quand les loups se mangent entre euxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant