50. Masque vacillant (part. 2)

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Ses sourcils se froncent. Mais cette fois-ci, il ne me prend pas pour une idiote et envisage sérieusement mes paroles. Enfin une réaction sage, je souris.

- Ce n'est pas Artenthus qui m'a rapporté le remède.

Il n'a pas besoin de me préciser que son bras droit n'aurait jamais dû se trouver dans le Sud de l'ancienne capitale économique. Je le sais.

- Alors, qu'était-ce que cette boîte qu'il a sorti d'un laboratoire encore alimenté en électricité ?

Ma mine innocente ne trompe personne. Toutefois, Victhorion est trop occupé à remuer toutes ces informations pour s'énerver contre mon insolence. Je le laisse encore un peu cogiter. A ma grande déception, il me regarde avec un regard sûr et contrôlé. Il a compris bien plus vite que moi cette après-midi.

- Bravo Theresy, je ne pensais pas que tu comprendrais cela toute seule. Oui, le Conseil ne m'a pas envoyé ici pour récupérer un remède. Il n'en existe aucun. Cependant, je ne te dirai pas ce j'ai envoyé chercher dans ce local. Mattelos n'est pas assez pour que tu en prennes connaissance.

Je souris, plantant mon regard dans le sien. Je sens que je n'ai qu'un pas à faire pour briser une corde sensible, juste là, je la vois.

- A d'autres Victhorion. Ne vous essoufflez pas à garder contenance, je connais la vérité.

Un réel étonnement passe un instant sur le visage du général qui se voit appelé par son prénom. Cela ne doit pas arriver souvent. Il me semble qu'il n'a pas de famille.

- Votre cher bras droit a comploté dans votre dos. Il est venu jusqu'ici pour servir des intérêts qui vous échappent encore en récupérant quelque chose d'extrêmement fragile et important. Tout cela pour le fournir à une ville avec qui il était en contact, au Sud-Ouest. Ne vous en faîtes pas, je sais que vous pourrez très bien vous charger de le corriger, je souris. Ce qui reste cependant embêtant, c'est que le Conseil vous ait menti aussi facilement sur la visée de cette mission. Cela devait être pour ne pas que vous posiez trop de question ou que...

Je m'arrête lorsque je capte un mouvement de tête du général. Un petit sourire est esquissé au coin de ses lèvres. Cette mimique n'a pourtant rien de jovial ou de mesquin. C'est une expression navrée.

- Vous ne comprenez pas ce que cela signifie.

Je ne dis plus un mot. Soudain, cette homme grand, dur et dénudé de pitié me semble empli d'une vie de tourments et d'émotions contradictoires. A la tendre lueur de la bougie, son visage paraît extraordinairement jeune, bien plus que ce que j'aurai pu m'imaginer. Alors seulement je me demande quel âge il a.

- Même après plus de sept années de service acharné en tant que général, ils ne me font toujours pas suffisamment confiance pour me confier une mission comme celle-ci.

Sa voix est plane, empli l'espace calmement, et mes yeux se plissent.

- Cela serait tout de même un réel handicape de nommer général un homme indigne de confiance.

Il me fusille du regard. Aurais-je touché une corde sensible de cet homme sans cœur ? pensé-je ironiquement.

- Tout l'intérêt est là. Cela est au général que l'on pense toujours, la cible la plus évidente. Alors, dissimuler des informations en les confiant à des personnes de l'ombre est bien plus stratégique et judicieux.

Il n'a pas tort, même si il doit sûrement y avoir plus « dans l'ombre » qu'un bras droit. Il reste tout de même la deuxième cible. Quelque chose me dérange.

- Je me demande simplement comment cela se fait-il qu'un homme comme vous ne soit pas digne de la confiance du Conseil. Je ne vous ai jamais vu hésiter une seule seconde à agir pour le bien de ce dernier, remarqué-je avec l'amertume d'une douleur récente.

GuerrièreWhere stories live. Discover now