Chocolat

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- Que faites-vous?

Chopin s'appuya contre l'encadrement de la porte qui s'ouvrait sur le salon, et posa les yeux sur les deux hommes, assis à même le sol et séparés par la petite fille.

- On essaie de trouver comment faire fonctionner ce jouet...

Curieux, il s'approcha, sirotant le chocolat qu'il était allé se préparer.

- Qu'est-ce? Oh mais... c'est une locomotive! Fit-il avec de grands yeux.

- Les anglais appellent ça un Birmingham Dribbler, l'informa Berlioz. Mais nous n'arrivons pas à le faire avancer.

- Ah! C'en est assez, je déteste les machines et la physique! Maugréa Liszt. J'ai pourtant suivi les indications à la lettre!

Chopin haussa un sourcil, et s'accroupit auprès de lui, jetant en même temps un œil à la feuille qu'il avait entre les mains.

- Tu as dû te tromper, avança Berlioz.
Liszt mit la main sur le petit jouet en fer.

- Je ne me trompe jamais! Pourtant il chauffe. Alors pourquoi n'avance-t-il pas et ne fait-il pas de vapeur?

- Donne-moi ça, dit son ami en lui prenant la feuille des mains. Voyons... tu as allumé le brûleur?

- Tu vois bien!

- Et l'eau? Il faut la rajouter avant.

- Ah... en effet.

- Comment veux-tu faire de la vapeur, si tu n'as même pas rajouté d'eau? Rajouta Chopin.

- Tais-toi ! Je te dis que je hais les machines. Sois gentil et va nous chercher un verre d'eau.

- Va le chercher toi-même. La cuisine, j'en reviens, et nous sommes chez toi.

Liszt lâcha un grognement, et se leva rapidement pour s'exécuter. Au milieu de tout ça, Blandine avait les yeux rivés sur la locomotive miniature depuis qu'ils l'avaient déposée au sol. Elle ne la toucha pas, et ne dit mot, comme si elle attendait qu'il se passe quelque chose.

- Franz est de mauvaise humeur...

- Tu sais bien qu'il ne supporte pas de ne pas réussir une tâche.

- Ce jouet est extraordinaire... il doit avancer seul? C'est époustouflant, ce que l'on fait à notre époque.

- En effet. Que fera l'Homme dans les années à venir? Nous vivons une époque formidable.

- Tu exagères. Il y a eu des découvertes de tous temps. Veux-tu du chocolat, Blandine?

En voyant qu'il lui tendait sa tasse, celle-ci la prit dans ses deux petites mains, et y but avidement.

- Hé là! Ne bois pas tout.

- Poussez-vous, annonça Liszt en revenant s'installer entre eux avec le verre dans les mains.

- Voilà notre sauveur.

Il versa l'eau dans la chaudière de la locomotive, sans douceur, laissant s'échapper quelques gouttes sur le sol.

- Et maintenant?

- Je suppose qu'il faut attendre.

Un silence s'abattit sur la pièce. Il fut brisé par Blandine, qui se leva sous le regard des trois hommes, et enjamba les genoux de son père pour venir s'accrocher à ceux de Chopin.

- Ma parole, elle t'apprécie.

- Soif!!

Elle leva un bras vers la tasse, ses grands yeux bleus posés dessus.

La mélodie des sentimentsWhere stories live. Discover now