Partie 2 : Espoirs et déchéance

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Elle tremble. Son angoisse, ses doutes, son effroi, se lisent sur son visage. Sam cille, stupéfait de la voir dans un tel état, lui qui ne l'a jamais vue perdre un cheveu de son expression composée habituelle.

— Où est-elle partie ?

Il pousse un long soupir, mais ne répond pas, malgré les coups et les interrogations qui se répètent. Ça n'a aucun sens d'essayer de répondre, puisqu'il ne le sait pas.

Mais au moins, il a tiré une certitude rassurante de ces quelques derniers jours de souffrance : Lilith est vivante. Il a toujours eu des doutes sur sa mort, mais maintenant qu'on le bassine avec cette même question, c'est une certitude. Elle a survécu à Stockholm, tout comme elle a survécu à Barcelone.

Et, vu la manière dont les questions sont formulées, Stockholm n'était qu'un énième guet-apens qui a échoué.

Finalement, la commandante s'immobilise. Une terreur sans nom hante ses yeux alors qu'elle formule dans un souffle à peine audible une nouvelle question, qu'elle n'avait jamais posée jusque là :

— Où ont-ils emmené mon fils ?

| † | † |

Adam papillonne des paupières. Sa peau est pâle, blanchie par le froid, brûlée par endroits, son torse nu porte encore les marques violacées de sa dernière « discussion » avec Kirstin. Ses yeux luttent pour s'habituer à la luminosité des lieux, son cerveau embrumé bataille pour mettre un nom sur le visage qui lui fait face. Lorsqu'il y parvient, la terreur se déverse dans ses veines, il essaie de se débattre. Mais ses mains sont toujours enchaînées au plafond, ses orteils effleurent à peine le sol.

— Adam, le salue la voix âpre. Tu n'as pas l'air en forme.

Le ton est plat, le regard, inexpressif. Il serait vain d'y chercher du soutien, sans même parler de compassion. Pourtant, Adam tente sa chance.

— Tyko, je ne...

Le poing fermé dans sa mâchoire transforme la fin de sa phrase en un râle de douleur. Sonné, le Kaiser demeure quelques instants muet, la tête basse. Lorsqu'il ose relever les yeux, il repère la quinzaine de fioles qui sont alignées sur une petite table métallique, non loin, et son souffle se glace dans sa poitrine.

— Tu sais que d'habitude, je me spécialise dans les gaz, explique tranquillement Tyko. Mais on m'a laissé m'amuser avec les produits corrosifs de ce siècle... et j'ai hâte de les découvrir.

| † | † |

— Comment libérer ma mère ?

Les iris verts d'eau, ternes et globuleux, se fichent dans ceux, turquoise iridescent, lumineux ; un sourire narquois semble étirer les lèvres inertes. Un frisson parcourt l'échine du Loki lorsque les paupières se ferment une fois, signifiant une réponse approbatrice. Il se penche en avant.

L'eau glacée lui brûle la gorge, le froid engourdit son esprit.

— Le prix à payer est une simple vérité. Es-tu prêt à l'accepter ?

Tendu, le Loki hoche la tête. Il sent au plus profond de son âme qu'il ne veut pas entendre la vérité, mais il faut qu'il ait la réponse à sa question.

— Dites-moi, murmure-t-il, faussement bravache.

— Tu n'es pas l'Élu.

La phrase claque comme un coup de tonnerre, déchire ses certitudes comme la foudre pourfend les nuages. Ses entrailles se tordent, son estomac remonte dans sa gorge. Il plonge dans le gouffre béant du doute, brisé la force et la vérité qui irradient de cette affirmation. La voix poursuit, implacable.

— Tu n'es qu'un pantin. Une distraction, pour détourner tout le monde de l'enfant que Loki a réellement choisi.

| † | † |

Le Cycle du Serpent [II] : L'Alliance des DéchusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant