𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒

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   - Oui, elle est avec moi là. [...] On va au Cokette Coffee. [...] Oui c'est ça, à plus MinGi.
Après avoir raccroché à son téléphone, Hong-Joong trouva une place juste devant le café que j'avais choisi et s'y gara. Je n'avais aucune idée de qui pouvait bien être ce MinGi, ni même de ce qu'il lui avait dit. Mais une chose était sûre: ils parlaient de moi, tout semblait calculer depuis un moment. Je choisis de garder le silence et d'attendre de pouvoir poser toutes mes questions au même moment. Il est clair qu'Hong-Joong devait m'informer de beaucoup de choses, même si je ne voyais pas lesquels.
En ouvrant la portière pour en descendre, je retiens un petit rire en me faisant la remarque que j'avais l'air de mettre toujours déplacée dans de si belles voitures. Alors que même un pot de yaourt surpassait ma petite mais fidèle tuture. Le moteur de la Porsche grondait si fort qu'il semblerait qu'on l'est entendu même depuis l'intérieur du café, si j'en crois les nombreux regards curieux que nous adressent le personnel et les clients. Nous en faisons tous les deux abstractions et partout commander quelque chose. Je ne sais pas ce qu'il compte m'annoncer, mais ça passera forcément mieux avec un bon brown sugar chaud !
   Arriver au comptoirs, c'est Hong-Joong qui commande le premier, et finalement aussi pour moi.
   - Bonjour, deux brown sugar en L s'il vous plaît. Avec un supplément cream cheese pour l'un, merci.
Mon visage se décompose. C'était exactement ce que je j'avais l'habitude de prendre ici ! De loin ma boisson favorite !
   - Tu aimes le cream cheese ?
   - Non, moi je déteste ça.
Il n'y avait plus aucun doute, il l'avait commandé pour moi et savait que c'était mon bubble tea favori ! Décidément, Batman est vraiment pleins de surprise.
Après que monsieur est payé, pour le plus grand bonheur de la michto que je suis, nous partons nous assoir dans le coin le plus reculer du café. Il y a une table à l'écart des autres, près d'un grand mur recouvert d'une fausse végétation. Je venais souvent squatter ici lorsque je faisais mes études, l'ambiance mignonne et coquette du café; d'où son nom, me plaisait beaucoup.

Je me mets ma à l'aise en retirant ma veste et mon épaisse écharpe, puis croise les bras sur ma poitrine pour inviter Monsieur Mystérieux à me déballer tout ce qu'il me cache.
   - On ferait mieux d'attendre que les bubble tea arrivent avant de commencer à parler. Je lui adresse un regard assassin et impatient. Je disais ça pour toi, mais j'ai compris le message...
   - Aller, vas-y, raconte moi tous tes secrets Batman.
   - Tu connais les Pirateez ?
   - L'organisation criminelle ? Il acquiesce, J'en ai entendu parlé, oui.
   - J'en fais parti. Je suis le bras droit de notre chef, plus exactement.
Ah.
   - Pas de bol.
« Pas de bol » ?
« Pas. De. Bol » ?
C'est tout ce que tu trouves à dire, Hannah ?
    - Je crois qu'il vaut mieux que je te laisse parler jusqu'à la fin. Reprends-je avec calme.
   - C'est une bonne idée. Mais avant que je ne commence, sache que tout ce que je vais te raconter doit rester strictement confidentiel. Tu ne dois en parler à personne, sous peine de représailles. C'est ok ? J'acquiesce d'un faible mouvement de la tête, alors qu'une personne un minimum sensée aurait pris ses jambes à son cou. Il enfonce son dos dans le dossier de la chaise, croise les bras, et commence enfin son récit après quelques secondes d'attente qui m'ont paru être éternité. Tu le sais peut-être déjà, mais Pirateez est le plus grand cartel d'armes sud-coréen depuis plus de quarante ans. À la mort du fondateur, c'est son fils et mon ami d'enfance Choi San qui a hérité de toute l'affaire. Si San meurt prématurément, c'est à moi que reviendrait tout Pirateez. Il fait une pause pour me laisser le temps de digérer ces premières infos, puis reprend. Et toi qui travaille en parti pour lui, tu dois déjà savoir que Kim Eunji possède l'une des plus grandes fortunes du pays, qu'il a d'abord hérité de son père avant de créer Palace Immobilier. Mais aussi qu'il n'a jamais cessé d'avoir soif de pouvoir et d'argent. Tu vois où je veux en venir ? J'hoche positivement de la tête, silencieuse. Aujourd'hui, le problème, c'est qu'il n'a jamais été aussi près du but. Ça fait dix ans qu'il essaye de mettre la main sur l'un de nos entrepôts pour nous faire du chantage, et il a finalement réussi à trouver le plus grand que nous possédons.
   - Qu'est-ce qu'il y a dans vos entrepôts ? Finis-je par demander.
   - Notre stock d'armes. Me dit-il presque en chuchotant. On en a un peu partout dans le pays, mais celui qu'a trouvé Eunji, située dans la banlieue de Séoul, est celui qui en renferme le plus. Pour te donner une idée, ça représente un peu plus de vingt milles armes. Enfin bref. Il s'en sert pour faire pression sur nous, et si nous n'abandonnons pas le cartel pour lui donner toute la tune et nos armes, il multipliera ses ressources pour nous faire tomber. Je fronce les sourcils, et il semble comprendre la question que je me posais. J'anticipe ta question, non il ne peut pas nous balancer aux autorités. Eunji a découvert notre entrepôt grâce à des hommes qu'il embauche pour faire le sal boulot. Il a déjà directement et indirectement tué une centaine de personne rien que pour arriver à ses fins. Sa fortune lui vient aussi de pas mal de détournements de fonds. Et si aucun de nous deux encourent la prison pour le moment, c'est que jusqu'à maintenant les autorités n'ont jamais trouvé de preuves nécessaires pour nous arrêter. Chaque trace de notre passage est minutieusement effacée et chaque témoin tué dans le cas où il refuse de coopérer. Nous utilisons tous les deux les mêmes procédés pour ne laisser aucune trace. Alors oui j'ai déjà tué, comme la plus part des membres du cartel d'ailleurs. Donc, si on a besoin de toi, c'est parce que tu es celle qui connaît le mieux Kim Eunji. Je t'observe depuis une semaine, et j'ai remarqué que tu ne l'aimais tellement pas que tu observais ses moindres faits et gestes rien que pour te moquer silencieusement de lui, pas vrai ? J'ose même pas répondre tant je tombe dénue. Je prends ça pour un oui. Et puis, le fait qu'il soit tomber love de toi te permettait de lui soutirer n'importe quelle information sans que ça soit suspect.
   - Donc, si je comprends bien, tu me demandes de jouer les infiltrée pour vous aider à obtenir un moyen de pression sur lui, et l'éliminer plus facilement ensuite ? Il fait un oui de la tête. Et j'ai quoi à y gagner moi là-dedans ? Non mais parce qu'à t'entendre, on dirait que je ne risque aucun soucis avec les autorités en travaillant avec vous, que je ne risque pas de foutre en l'air ma carrière professionnelle ou encore moins d'être blessée et même tuée !
   - Si tu acceptes, tu serais bien évidemment sous ma protection et celle de Choi San lui-même. Tu serais presque un membre à part entière du cartel.
   Je pouffe un léger rire tout en me redressant sur ma chaise pour avancer mon visage vers le sien.
   - Tu penses sincèrement que j'ai envie de faire partie d'une organisation illégale ?
   - Non, mais je pense sincèrement que le reste devrait te plaire. Je l'incite à continuer par mon silence. Tu seras rémunérée.
   - Donne un chiffre.
   - Sept cent trente millions de won. (~un demi million d'euros) L'argent est déjà placé sur un compte à mon nom à l'étranger, pour éviter que ta banque se doute de quelque chose. Il saisit son porte monnaie et en sort une black card. Tu obtiendras cette carte lorsque San aura jugé ta mission finie. Cela peut prendre plusieurs mois, mais pas plus de six selon nos estimations. Et d'ici là, tu pourras nous demander ce que tu veux de physiques. Une voiture de sport, un appartement sans crédit à rembourser pour toi, des bubble tea illimités. Tout ce que tu veux.
   Cette fois ci, j'ai du mal à me retenir de rire. Hong-Joong reste sérieux.
   - Ah ouais ? Et c'est quoi le piège ?
   - Nous n'avons aucun intérêt à te piéger. Je te l'ai dit, tu es notre seul espoir Hannah. Nous savons que nous t'en demandons beaucoup, alors nous voulons te rendre plus que la pareille.
   - Et pourquoi moi ? Kang Soyeon stalk sans arrêt Eunji, et je suis sûre que ça lui plairait de faire parti d'un cartel avec un jeune beau gosse comme toi. Elle est définitivement la candidate idéale.
   Moi-même je ne crois pas un mot de ce que je dis. Mais sur un malentendu...
  - Tu la vois garder un masque devant Eunji ? Ou pointer une arme sur quelqu'un ?
   - Ah parce que moi je suis capable d'en tenir une même ? Dis-je en arquant un sourcil.
   - Oui, et tu le sais aussi. Le danger te plaît, tu aimes l'intrigue, l'aventure. Tu ne laisses pas tes émotions te dicter, et tu arrives à contrôler ta vie en gardant un bonne équilibre. Ses yeux se mettent à briller en le fixant. C'est effrayant, mais très attirant. Je ne peux qu'imaginer ce que tu donnerais sur le terrain, mais bon sang Hannah, tu es exactement la personne qu'il nous faut !  Tu es observatrice et sais tromper les autres, je t'ai vu le faire avec Eunji.
   - Alors... Il y a trois jours, quand tu m'as bousculée, c'était totalement intentionnel ? Tu savais déjà où j'habitai ? Ou je prenais mon bus ? Ou je travaillais ?
Ma tête me fait mal. Je commence à faire le lien entre tous pleins de petits détails que j'avais jusqu'à maintenant ignorer.
Dans la voiture, la première fois, toutes les questions qu'il m'avait posée servait à mieux me connaître et à vérifier ses informations.
Il m'avait demandé si je gagnais bien ma vie là-bas. Je lui avais répondu que oui grâce aux primes qu'Eunji m'envoyait en plus de mon salaire, puis il n'avait pas rebondit dessus. Ma réponse lui a permis de savoir à quel point Eunji me portait de l'intérêt, c'était une information précieuse pour lui.
Depuis le début je me fais bernée, et je n'y ai vu que du feu ! Le mec m'observais pendant tout ce temps chez moi, dans mes trajets quotidiens, au travail, partout ! Depuis une semaine ! Et là encore je n'ai rien remarqué !
   - Tu peux me prendre pour un fou, mais crois moi, mes intentions sont sincères. Je te porte de l'intérêt car tu peux sauver la cartel dans lequel je suis née et a grandi. Mais ça ne m'empêche pas de vouloir ton bien. Et puis... Hannah, si tu n'avais pas soif de danger et d'aventure, tu ne serais pas là à m'écouter attentivement.
   Au moment où il finit sa phrase, une serveuse vient déposer notre commande sur la table, puis repars en nous regardant de travers. Pas étonnant, je dévisageai silencieusement Hong-Joong et lui avait un visage des plus sérieux.
Je saisis ma boisson, la remue, et plante ma paille dans le papier qui la recouvre sans accorder la moindre attention à monsieur.
   - Voilà ce qui va se passer. Fais-je en relevant enfin ma tête vers lui. Je vais boire ce bubble tea et je ne veux pas t'entendre prononcer un seul mot. Je te donnerai ma réponse seulement lorsque je l'aurai bu jusqu'à la dernière goutte.
Bien que surpris par ma décision, Hong-Joong acquiesce simplement et commence à siroter son Brown Sugar tout en écrivant à quelqu'un sur son téléphone. Ça devait être le MinGi de tout à l'heure ou ce Choi San, peu importe.
De mon côté, j'essaye tout d'abord de remettre de l'ordre dans mes pensées. Et croyez moi, c'était pas une partie de plaisir. Je réalisais doucement que je m'étais totalement trompée sur Hong-Joong. Ce n'était ni un violeur, ni un psychopathe, ni les deux en même temps. Hong-Joong était tout simplement le bras droit du chef du cartel le plus dangereux et puissant du pays. Mais oui, comment ai-je pu ne pas y penser ? Ahah.
Ahahah, je vais devenir folle.
Donc en résumé, il y a trois jours j'avais trouvé la bonne idée de monter dans la voiture d'un mec qui au fait a tué, volé, séquestré et vendus tout un tas d'armes à feu totalement illégales. Et aujourd'hui, j'apprends que notre rencontre est tout sauf un hasard, car en faaaait il veut que je joue les agents secrets ultra secrets pour aider Pirateez à éliminer Kim Eunji.
Normal quoi.
En même temps de peser les pour et les contre de sa proposition, je ressasse involontairement les mots d'Hong-Joong.
« Le danger te plaît, tu aimes l'intrigue, l'aventure ».
« Si tu n'avais pas soif de danger et d'aventure, tu ne serais pas là à m'écouter attentivement ».

Cinq minutes plus tard, je posa bruyamment mon bubble tea, vide, sur la table. Hong-Joong leva la tête de son téléphone pour me regarder attentivement.
   - Si je refuse, je vous aurai à mes trousses, n'est-ce pas ?
   - C'est l'idée.
Il me sourit. Il connaît déjà la réponse que je vais lui donner, et elle lui plaît.
   - Je veux la moitié des sept cent trente millions maintenant. Et une Porsche noir matte moi aussi. Ce sont mes deux seules conditions avant d'accepter de travailler avec Pirateez.
Je lui tends ma main et son sourire s'agrandit. Je n'arrive plus à retenir le mien lorsqu'Hong-Joong me tend à son tour la sienne pour une bonne poignée de main.
   - Vendu.

𝐖𝐡𝐞𝐧 𝐭𝐡𝐞 𝐍𝐢𝐠𝐡𝐭 𝐅𝐚𝐥𝐥 - 𝐂𝐡𝐨𝐢 𝐒𝐚𝐧Où les histoires vivent. Découvrez maintenant