𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟎

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   La soirée continua son cours dans la bonne humeur. Personne ne m'avait interrogée sur ma soudaine crise d'angoisse silencieuse qu'ils n'avaient sûrement même pas dû remarquer. Et tant mieux. Qu'est-ce que je leur aurais répondu ? Que mon corps était traumatisé après avoir assisté à des assassinats que mon faux copain a lui-même commis devant mes yeux ? Pour me montrer en parti de quoi il est capable ?Ouais, en le disant comme ça la scène me semble encore plus horrible et improbable.
   Finalement, une heure du matin arriva rapidement. Jiji s'était endormie depuis un moment sur le canapé, et nous autres les adultes étions pour la plus part bien bourrés. Tout le monde, sauf ma grand-mère maternelle et San qui tient évidemment bien l'alcool grâce à, ou à cause de, tout ses excès. J'étais d'ailleurs heureuse de voir qu'il s'était si bien intégré dans ma famille.
   À la base ce couple c'est de la comédie, mais je vois bien que San n'a pas fait que semblant. Il prend son rôle de copain trop à cœur pour que ça soit le cas, par exemple en laissant traîner sa main sur ma cuisse ou ma taille, ou encore en m'adressant des regards si doux que l'on en oublie qu'il est un trafiquant d'arme. Ma famille n'y a vu que du feu et je la sais déjà impatiente de le revoir.
   - Vous êtes sûrs de ne pas vouloir rester dormir ? Me demande ma mère, le visage rougi par l'alcool tandis que ma tante part s'allonger près de sa fille. Il est tard, je ne voudrais pas qu'il vous arrive malheur.
- San a l'habitude de conduire la nuit, tout ira bien.
Ma mère acquiesce, souriante comme toujours. Mon père arrive à ses côtés et pose franchement sa main sur l'épaule de San, ce qui nous surprend tous les deux.
   - À bientôt gamin, je te confie ma fille.
Je pouffe un rire en voyant mon père prononcer ses mots d'une voix différente de celle qu'il a d'habitude. Il avait bien bu lui aussi, pas étonnant qu'il se montre si sympas d'un coup envers San. Dommage qu'il ne le soit que lorsque nous sommes sur le départ, mais je ne pouvais pas non plus ignorer les efforts qu'il a fait tout le long du repas.
   - Je continuerai de prendre soin d'elle, monsieur.
San prononce ses paroles en attrapant ma main dans la sienne pour entrecroisée nos doigts, un geste dont je n'ai toujours pas pris l'habitude. Mes yeux attendris croisent les siens qui le sont tout autant, mais nous sommes vite interrompus par un cri d'effrois tout à fait inhabituel.
Tout les regards de la maison se braquent sur ma grand mère maternelle qui s'était levée de sa chaise si soudainement qu'elle l'avait faite tomber. Son visage ridé était imprégné par la peur et la surprise qui contrastait avec son expression neutre et paisible habituelle.
Je ne l'avais même jamais vu ainsi. C'était bien la première fois que je l'entendais crier, et la première fois qu'un son sortait de sa bouche depuis quelques jours apparement. Je ne l'ai jamais connu expressive, et pour ma première fois j'aurai préféré lire sur son visage de la joie que de la peur. C'était tellement improbable que je m'étais même demander si ce n'était pas l'alcool qui me donnait des hallucinations, mais tout ça était bien vrai.
Son index se leva pour pointer dans notre direction, ou plus exactement San. Son action me glaça le sang. Elle le fixa avec une terreur qui aussi effraya rapidement toute la maison, moi y compris, comme si elle était contagieuse. San n'avait rien fait, pourtant il était bien la cause de sa peur pour une raison qui nous échappe à tous. Mon faux copain la fixe en retour, calmement, les yeux emplis d'incompréhension.
Le cri de mamie réveilla Jiji qui se redressa du canapé en frottant ses yeux, tandis que sa mère se précipite vers la sienne pour abaisser son doigt crochu et abîmé par sa longue et pénible carrière d'agricultrice.
   - Bon sang, qu'est-ce qui te prend maman de crier comme ça ?!
Les yeux de ma tante s'embrumèrent rapidement par de grosses larmes, tout comme ceux de ma mère. Les deux sœurs étaient plus particulièrement touchées et choquées que nous, pour la simple et bonne raison qu'elles n'avaient pas du voir leur mère s'esclaffer ainsi depuis plus d'une vingtaine d'années. Ça devait aussi leur évoquer la mort de leur père. Mon grand-père.
   - C'est lui !
La voix de ma grand-mère résonna dans toute la maison avec une puissance dont l'on lui en aurait jamais cru être capable. Du coin de l'œil je voix Jiji sauter du canapé pour venir s'agripper à mes jambes et se cacher derrière moi et San, visiblement apeurée par la vieille dame. San ne bouge pas, mais je sens sa main se resserrer sur la mienne.
   - San ? C'est le copain d'Hannah, il est avec nous depuis le début du repas. Lui répond ma tante en ignorant ses larmes.
   - C'est lui !
Ma tante s'éloigne de sa mère en portant une main à sa poitrine. Aussitôt mamie pointe à nouveau San du doigt.
   - Hae-Won, occupe toi d'elle... Elle perd complètement la tête, je peux pas le supporter... Fait-elle d'une voix branlante et faible.
Ma mère secoue la tête puis implore du regard mon père de faire quelque chose. Celui-ci récupère la chaise au sol pour faire rassoir la grand-mère et abaisser sa main. Mais elle continue de fixer San avec ses grands yeux et son air terrifié.
   - C'est lui ! Répète-t-elle une fois encore.
   - Hannah... Commence Jiji en serrant ma manche et celle de San dans ses petites mains. Mamie me fait peur... Qu'est-ce qui lui arrive ?
Je place ma main libre sur le sommet de son crâne pour la consoler.
   - Rien, mamie est vieille c'est tout.
Et folle.
   - Qu'est que tu veux dire par « c'est lui » ?  Lui demande mon père.
   - C'est lui ! C'est lui ! Il l'a tué !
   Je me fige sur place, et San aussi. Le temps semple se suspendre. Mes grand-parents paternelles échangent entre eux un regard, tout comme ma mère et sa sœur. Ma mère finit par perdre patience et lui hurle dessus, sachant pertinemment que face à elle c'est inutile.
   - San n'était même pas né quand papa est mort !
   - C'est lui ! C'est lui !
   La main de Jiji se ressert sur ma manche, tout comme celle de San dans la mienne. Finalement, mon père fait signe à ma mère et ma tante de nous emmener dehors ce qu'elles font sans perdre une seconde, sans doute trop impatiente de quitter l'atmosphère étrange que ma grand-mère a soudainement instaurée.
   Nous sommes conduit sur le perron de la porte, nos affaires déjà avec nous puisque nous comptions quitter la maison d'ici peu. Ma mère referme la porte derrière elle en soupirant et essuie du revers de la main ses larmes, imitée par ma tante rejointe rapidement par Jiji.
   - Maman ! Maman ! Mamie est flippante ! Dit la jeune enfant apeurée, rassurée par des caresses dans les cheveux.
   - Mais elle est gentille.
   - Ouais, on dirait pas.
   Je me colle un peu à San et pose ma tête sur son torse pendant qu'il lâche ma main pour encercler ma hanche avec son bras. Il caresse ma taille avec douceur, m'aidant à éloigner le souvenir du cri strident de ma grand-mère.
   - Désolée, c'est la première fois qu'elle agit ainsi. Commence ma mère, embarrassée. D'habitude on finit même par l'oublier tellement elle est silencieuse... On pensait qu'elle avait fait le deuil de la mort de notre père, depuis le temps... Mais faut croire que ce n'est toujours pas le cas.
   - Vous n'y êtes pour rien, ne vous en faites pas.
   San tente de leur accorder un sourire réconfortant, mais abandonne l'idée en se rendant compte que celui-ci avait l'air trop forcé. Mis à part à moi et aux garçons, San n'a clairement pas l'habitude de sourire, et encore moins pour réconforter.
   - On ne vous retient pas plus longtemps. Reprend-t-elle. Merci d'être venus les enfants. San, tu es ici comme chez toi.
   Pas sûr que se faire accuser d'un meurtre qu'il n'a, pour une fois, pas commis lui donne envie de vite revenir.
   Jiji lâche les jupes de sa mère pour courir vers nous et nous prendre dans ses bras.
   - Faites vite pleins de bébés, comme ça je serais plus le bébé de la famille !
   Je ris en m'accroupissant près d'elle pour embrasser sa petite joue rose rebondit. Quand je me relève, je souris en la voyant tendre son poing vers San. Le chef de cartel tend le sien à son tour et laisse la fillette le taper de toutes ses forces, comme à notre arrivée. Il ne laisse échapper aucune émotion, mais le connaissant je suis sûre qu'il est fière de la petite relation qu'il a réussi à créer avec ma cousine.
   - Fait des bisous à papa pour moi.
- Je n'y manquerai pas. Et toi embrasse Bora pour moi. Me sourit ma mère.
San incline sa tête pour les saluer puis je le suis jusqu'à la voiture garée de l'autre côté du trottoir. Lorsqu'il la déverrouille j'entends ma mère et ma tante s'extasier devant le véhicule hors de prix pour elles et pour moi. Enfin ça c'était avant qu'Hong-Joong me donne une black card et m'offre une Lamborguini suite a ma simple demande.
Alala, quelle vide de rêve vu comme ça.
Une fois installés, San démarre et la voiture s'éloigne rapidement de la campagne...

𝐖𝐡𝐞𝐧 𝐭𝐡𝐞 𝐍𝐢𝐠𝐡𝐭 𝐅𝐚𝐥𝐥 - 𝐂𝐡𝐨𝐢 𝐒𝐚𝐧Où les histoires vivent. Découvrez maintenant