𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒𝟔

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   - Oh mon Dieu Hannah !
   Ma meilleure amie se jette sur moi pour entourer mon cou de ses bras et me serrer contre elle. Son corps me surplombe presque tandis que je suis allongée, mon tronc relevé pas deux gros coussins derrière mon dos. Bora fait attention à garder son ventre éloigné du mien, évitant ainsi d'appuyer davantage sur ma blessure douloureuse. L'une de mes joues, pressée à la sienne, commence s'humidifier à cause de ses larmes abondantes. Aucun sanglot ne sort de se bouche. Je ne suis même pas sûre qu'elle se rende compte qu'elle est entrain de pleurer. L'une de ses mains presse l'arrière de ma tête pour la maintenir près d'elle dans un geste doux, sa deuxième posée sur le matelas pour l'aider à garder l'équilibre et éviter qu'elle s'effondre sur moi.
   Après s'être détachée et assise sur le bord du lit, elle essuie ses larmes du revers de la manche. C'est là que je remarque qu'elle porte l'un de mes sweat-shirt ainsi qu'un de mes jogging. Mon cœur se ressert un peu plus dans ma poitrine lorsque je comprends qu'elle a dû piocher dans mon dressing pour changer ses vêtements couverts de mon sang. Le sang de sa meilleure amie, bordel. J'ose à peine l'imaginer tachée par mon propre sang, alors qu'elle arrêtait l'hémorragie difficilement en recousant la peau de mon abdomen. En fait, j'ai même du mal à me dire que c'est arrivé. Si je suis toujours en vie c'est grâce à elle. C'est à la fois tellement effrayant et beau. En se rencontrant au lycée nous n'aurions jamais imaginé que l'une allait sauver la vie de l'autre. D'ailleurs, il y a quatre mois je n'aurai jamais imaginé travailler pour un cartel et, pire encore, tomber éperdument amoureuse de son chef.
   - Ça me fait tellement plaisir de te voir réveillée. J'ai eu tellement, tellement peur !
   Je me suis réveillée de mon second évanouissement il y a moins de deux heures à peine. Il m'a fallu un petit moment pour retrouver mes esprits et l'usage de tous mes sens. À chacun de mes réveilles je déréalise, la faute aux médicaments et à l'anesthésie encore récente. Mais cette fois ci ça n'a pas duré longtemps, heureusement.
   J'ai passé ce laps de temps avec San. À mon réveil il dormait encore, mais mon premier petit mouvement l'a directement sorti du sommeil. Même endormi il restait prêt à intervenir au cas où j'ai des complications. J'ai trouvé ça mignon mais ça m'a aussi fait un peu de peine. Il est presque aussi épuisé que moi mais ne s'autorise pas prendre du repos. S'il ne trouve pas le sommeil il peut toujours prendre des anxiolytiques, mais il ne veut pas. Il a trop peur pour moi, plus que j'ai peur pour moi-même. Ça serait totalement stupide de lui en vouloir pour ça, mais... je m'inquiète pour sa santé en retour. Il même s'il le sait, il ne va rien changer. Rien d'étonnant venant de lui. San est borné, c'est pas nouveau.
   Ce n'est que maintenant que j'ai autorisé ma meilleure amie et les garçons à me voir. Je ne voulais pas qu'ils me voient dans un état trop pitoyable, même si ça ne sert pas à grand chose après que la moitié m'est vue avec une balle dans le ventre et le poignée qui pendait comme si plus aucun os ne le traversait. Mais il n'y avait pas que ça. Je n'avais pas envi de parler, et je savais que Bora allait avoir du mal à retenir toutes ses questions, bien qu'elle est déjà eu beaucoup de réponses de la part des gars. L'avantage avec San, c'est que lui peut rester silencieux pendant des heures. Bora, elle, aime beaucoup parler. Moi aussi, quand je ne me fais pas tirer dessus.
   - Merci infiniment pour... elle m'oblige à me taire en pressant son index contre mes lèvres.
   - Ne me remercie pas. Je te l'interdit. Elle retire son doigt, ses yeux toujours brillants comme s'ils pouvaient recommencer à pleurer d'une seconde à l'autre. J'ai fait ce qui était normal.
   - Rien de tout ça n'est normal.
   - C'est vrai, mais j'ai décidé de faire comme si c'était le cas pour mieux digérer le fait que, de un, Pirateez est un cartel qui existe vraiment et est tout autour de nous sans qu'on le sache, et de deux, que ma meilleure en fait partie.
   - Je n'en fais pas vraiment partie.
   Quelqu'un derrière Bora se racle la gorge. Je penche la tête pour voir MinGi, le point devant la bouche, le dos appuyé contre l'encadrement de la porte de la chambre de San. La peau de sa joue et son front est éraflée à certains endroits. Eux aussi ont dû combattre pendant que nous étions pris dans les flammes, et ils s'en sont carrément mieux sortis. Quand nos regards se croisent il me sourit et m'adresse un clin d'œil. À côté de lui se trouve Jong-Ho étonnement silencieux pour une fois. Derrière eux, dans le couloir, j'aperçois les ombres et les voix des autres. Ils ont tous l'air impatient de me retrouver, mais attende patiemment que j'ai fini de parler avec Bora. San, lui, fume une cigarette à la fenêtre sans a priori prêter plus attention que ça à notre conversation. Mais évidement qu'il le fait.
   - Je travaille pour San. Reprenais-je en la rectifiant.
   - Ouais, dit plutôt que t'aimerais lui faire un boulot. Je suis au courant de tout ! Et je dois dire que je suis plutôt abasourdie. 
    Ses cheveux courts s'agitent dans l'espace. Mon regard se bloque un court instant sur ses cernes et la pâleur de son visage. D'après San, elle a occupé ma chambre pour se reposer un peu, mais comme tous les autres le sommeil a été dur et long à trouver.
   - Ah oui ?
   Ma réponse est nulle, mais la vérité c'est que je suis un peu gênée que maintenant elle connaisse toute la vérité à cause d'une terrible accident qui a failli me coûter la vie. J'avais prévu de tous lui dire à la minute où ma mission se terminerait. J'aurai aimé qu'elle l'apprenne dans de bien meilleures conditions et de ma bouche. J'ai aussi la bizarre impression de l'avoir menti tout ce temps, alors que je ne pouvais juste pas lui en parler.
   Elle trouverai mon ressenti totalement stupide si je lui en parlai.
   - J'ai du mal à me dire que tu as réussi à garder tout ça rien que pour toi. Te connaissant, je sais que ça a dû du être dur pour. Bon, pas autant que de supporter la drague lourde de ton patron et tes petits espionnages. Ou encore tes entraînements. Bon sang, tu sais te servir d'un pistolet ! C'est totalement fou mais carrément stylé ! Une vraie espionne quoi, comme dans les films !
   - Mais tu te doutais déjà un peu de tout ça.
   Elle acquiesce.
   Évidemment qu'elle avait des soupçons. Au nouvel an elle a fait la rencontre de tous les garçons. Bon, pas vraiment de San puisqu'il a tapé sa phase bizarre mais peu importe. Elle était trop bourrée et dans l'action pour me poser des questions sur depuis quand et d'où je les connais, mais elle avait déjà commencé à comprendre certaines choses. Elle a choisi de ne pas m'en parler car elle savait que c'était à moi de le faire, et que j'avais surtout mes raisons de ne pas encore l'avoir fait.
  - C'est surtout en voyant Seong-Hwa agir comme s'il était Batman que j'ai commencé à comprendre. La première fois qu'il est parti de chez moi au beau milieu de la nuit, pendant que je dormais, j'ai cru que j'allais le retrouver juste pour l'enculer. Quand il m'a dit qu'il devait travailler et qu'il ne voulait pas me réveiller je ne l'ai pas cru.
   Elle m'avait déjà racontée cette anecdote au téléphone. Quelques jours après le nouvel an ils ont pour la seconde fois dormi ensemble, c'est là que c'est arrivé. Bora a eu peu de s'être faite avoir. Que l'homme par qui elle est attirée la voit comme un vide couille. J'avais galéré à la rassurer ce jour là. Je savais ce qu'il partait faire, mais comme lui expliquer qu'il ne ment pas sans en dire trop ?
   - Je sais, et c'est normal. Si j'avais été dans la même situation avec San, j'aurai pleuré pendant une semaine en me disant que je ne suis juste pas assez bien pour lui.
   - Les daddy's issues, tout ça tout ça... elle soupire. Comment tu te sens ?
   - Mon poignet me fait mal mais c'est supportable. Pour mon ventre ça va, je crois.
   - T'éviteras maintenant de faire... je sais pas quoi. J'aimerai mieux éviter de refaire tes points de sutures une nouvelle fois. Mais si ça arrive quand même, n'attend pas avant de m'appeler ! Je comprends pas vous avez pu attendre autant avant de me prévenir.
   - C'est à cause de cet homme là-bas. Je désigne San avec un mouvement du menton. Il est trop con, mais irrésistible.
   San m'a entendu, c'est sûr, mais il fait comme si ce n'était pas le cas. J'ai l'étrange sentiment qu'il va me ressortir ça plus tard.
   - Les zhommes quoi.
   - Ouais, et puis maintenant qu'on sort ensemble... elle me coupe subitement.
   Non, en fait, Bora n'est pas la seule à me couper. Les garçons dans le couloir entre en trombe dans la chambre et tous les huit, en comptant Bora, me regardent avec de grand yeux. Moi, puis San, et ils recommencent.
   - QUOI ?! S'écrient plusieurs d'entre eux, dont WooYoung et Jong-Ho
   J'ai l'impression d'avoir dit quelque chose qu'il ne fallait pas, alors que pas du tout. Je regarde rapidement San. Il fume une nouvelle clope sans nous prêter aucune attention. Et là je comprends que je vais devoir gérer tout ce bordel seule.
   - Je pensais que vous saviez déjà...
Surtout que Bora m'a assuré « tout savoir ».
   - Donc tout à l'heure on vous a entendu vous battre et maintenant vous êtes...?! Fait Yeo-Sang.
   - Moi je dirais que c'est pas trop tôt.
   C'est Hong-Joong qui vient s'assoir à côté de moi alors que ma meilleure amie s'est relevée, visiblement trop choquée. Il passe une main dans mes cheveux et les ébouriffe doucement tout en me souriant.
    Mon cœur se réchauffe en le voyant pour la première fois depuis quelques jours. Apparement il avait des affaires à régler à l'étranger, une histoire de livraison encore une fois. Je ne résiste pas à l'envie de le prendre dans mes bras, ou plutôt un bras pour éviter de forcer que mon poignet. Mais même mon bras valide est difficile à bouger: j'ai peur que mon cathéter se détache ou que le fil de la perfusion s'emmêle.
   Il me rend mon étreinte sans tarder.
   - Tu m'as manqué. Chuchotais-je presque, la tête enfoui dans son cou.
   - Toi aussi tu m'as manqué. Une main caresse mon dos et la seconde l'arrière de ma tête. Apparement tu t'es super bien débrouillée, bravo.
   - J'ai besoin d'explications là. Fait Yun-Ho tandis que je mets fin au câlin. Toi et San, ça étonne personne. Mais il me faut les détailles.
   - Oh oui, raconte nous tout ! Crit Bora.
   - Il voulait me faire arrêter ma mission et me mettre dans un appartement, loin de lui. Commençais-je. Ça ne m'a pas plu alors je lui ai sauté dessus.
   - T'oublies le passage où tu me griffes comme une hystérique.
   San a enfin pris la parole. Il fait même l'effort de me regarder, expirant la fumée de sa cigarette.
   Il est tellement sexy comme ça que même avec un trou dans le ventre et un poignet brisé j'ai envie qu'il me prenne fort contre ce mur, juste là.
   Je devrais plutôt me réjouir d'être encore en vie et que la balle n'est pas touchée d'organes vitaux. En tout cas, c'est ce que quelqu'un de normal serait entrain de faire.
   Je lui jette un regard noir comme réponse. Il sait très bien qu'il est à l'origine de l'état dans lequel j'étais et que ma violence était totalement justifiée. Enfin... Là encore quelqu'un de normal me dirait qu'on est pas censés se jeter sur l'amour de sa vie pour lui faire la peau.
   - C'était mieux quand tu contemplais l'extérieur en fermant ta gueule.
   - Je peux pas m'empêcher de te faire chier, amoureux ou pas.
   - Alors je peux évoquer le passage où tu pleures en m'avouant que tu m'aimes ?
   Son regard s'assombrit alors que ceux de nos amis se font plus insistant, tout à fait captivés pas notre discussion. Finalement, un fin sourire se dessine sur ses lèvres, puis il reporte son attention dehors. Je comprends alors qu'il a bien l'attention de me faire payer pour avoir dévoiler son petit secret, plus tard quand on sera en privée. Et quelque chose me dit que, bizarrement, je ne vais pas tellement détester sa punition. En revanche, ce que je retiens surtout, c'est qu'il n'essaye pas de jouer les mâles alphas devant ses amis en niants mes dires. Il a pleuré pour moi et il l'assume. C'est vraiment adorable.
   - Et pour la mission maintenant ? Fait Seong-Hwa en se collant au dos de ma meilleure amie, ses bras autour de sa taille. Comment est-ce qu'on s'arrange ?
   - Demain c'est lundi, Hannah est censé travailler mais... répond Yun-Ho.
   - Mais elle n'est pas en état. Finit MinGi.
   - Eunji ne sera pas là la semaine qui arrive, c'est quasiment certain. Il s'était déjà absenté quand San a tué tous ses hommes, il le refera sûrement.
   - Mais après ? Demande Bora.
   La question de Bora me fait tout drôle. Je ne suis définitivement pas encore habituée à la savoir impliquée dans Pirateez à ce point. Je suis même étonnée que San l'autorise à l'être. Mais bon, maintenant qu'elle a sauvé la vie de sa meilleure amie ça aurait été difficile de la garder à l'écart.
   Hong-Joong remarque que je triture nerveusement mes doigts et prend mes mains dans les siennes pour les caresser doucement. Je le remercie par un petit sourire.
   Tous ces changements me stressent. La mission est compromise, mais celle-ci n'est pas encore fichu. Nous sommes tous dans une période de flou, je suis certaine que je ne suis pas la seule à me préoccuper de l'avenir même s'il n'y a que moi qui en ait l'apparence.
   - Hannah s'occupe de gérer sa mission comme bon lui semble.
   La voix de San instaure un silence pesant. Personne ne s'attendait à ce qu'il réponde, pas même moi.
   Mon... copain ? ouais, c'est ce qu'il est maintenant, bordel. ne prend encore une fois pas la peine de nous regarder.
   Il aime trop paraître ténébreux, c'est fou.
   - C'est-à-dire ? Fait Hong-Joong plus à moi qu'à San.
   - San n'a plus d'autorité sur ma mission. Toutes les décisions qui la concerne me reviennent à moi, et moi seule désormais.
   Les sourcils de mon meilleur ami s'arquent. Il n'a pas l'air de remettre en question ce choix, il a surtout l'air inquiet et curieux.
   - Tu as un bras dans le plâtre et un trou dans le ventre, comment peux-tu toujours continuer ta mission ? Ses mains se resserrent autour des miennes. Je crois qu'il ne s'en rend pas compte.
   - J'ai suffisamment acquis la confiance d'Eunji pour pouvoir bientôt mettre fin à sa mascarade. Je ne peux pas abandonner après tout ce que j'ai fait.
   - Je ne veux surtout pas paraître méprisant mais... Je ne vois pas du tout comment tu comptes faire.
   - Je rejoins Hong-Joong. Intervient WooYoung. Eunji a réussi à pénétrer à nouveau notre espace de stockage le plus grand et maintenant il n'en reste plus rien. Avec lui une bonne partie de la puissance de Pirateez est parti. Les autres cartels en ont sûrement déjà pris connaissances, ou ça ne va pas tarder du moins. Notre réputation est entrain de s'écrouler et l'avenir du cartel avec. Il devient urgent d'agir, mais dans l'état dans lequel tu es...
   - Je suis devenue inutile ? C'est ce que tu veux de dire ? Ça sort plus agressif que prévu, mais tant pis.
   - Non pas du tout... il évite mon regard avant de l'affronter à nouveau. Enfin si, c'est bien là où je veux en venir.
   Ce qu'il dit me blesse mais est compréhensible. Je réagirai sûrement pareil si le cartel dans lequel j'ai grandi était menacé et que quelqu'un de... invalide; parce que c'est ce que je suis; me tiendrait un discours comme le mien.
   Jong-Ho prend à son tour la parole.
   - Je sais pas comment on a pu laisser Eunji prendre autant de puissance... Des tas de clients annulent leurs commandes après avoir appris ce qu'il s'est passé cette nuit. On a perdu presque la moitié de nos armes, et une bonne partie d'entre elles ont été volés par Eunji. Non seulement il a pris l'ascendant sur nous, mais en plus lui et ses hommes sont encore mieux armés qu'avant. Quand il fait une pause tout le monde reste silencieux. J'ai... J'ai honte de ce que je vais dire mais... pour la première fois de ma vie je commence à envisager de quitter le cartel.
   Mes yeux s'agrandissent devant sa déclaration. San se retourne si brusquement que son coude fait accidentellement tomber le cendrier au bord de la fenêtre. On l'attend se briser sur le sol de la coure, seul bruit qui vient perturber le silence ambiant.
   - Jong-Ho... intervient Yeo-Sang qui passe un bras autour des épaules de son ami. De son frère.
   - Je sais que ce que je viens de dire est lâche et peut suffire à faire de moi un traitre mais... faut qu'on se l'avoue, les choses se sont beaucoup trop aggravé suite au décès de... il cite aucun nom, mais je me doute qu'il parle du père de San, et aujourd'hui nous ne pouvons plus faire face à Eunji. Il relève les yeux vers San, un peu craintif. Je suis désolé, mais c'est ce que je pense et la vérité.
   San jette son mégot de cigarette par la fenêtre, la referme puis vient s'appuyer contre un des piliers du lit à baldaquin. Les rideaux avaient été attachés exprès.
   - C'est à moi de m'excuser. C'est à cause de moi que les choses se sont empirées. J'aurai dû m'occuper d'Eunji comme je me suis occupé de son père après qu'il est tué le mien. Je ne le voyais pas comme une menace avant ça. Il était tellement immature que je ne pensais pas qu'il allait réussir à atteindre un niveau proche du mien, dans la stratégie et la gestion d'une organisation. Je ne pensais encore moins qu'il allait me surpasser.
   J'avais déjà cru comprendre que la famille d'Eunji y était pour quelque chose dans le meurtre de son père. Maintenant que j'entends San le dire, ça me fait bizarre. Si nous n'étions pas devenus aussi proche il n'en aurait jamais parlé devant moi. Il n'aurait même pas évoqué son père. Mais maintenant, je le sens comme libéré d'un poids. Il s'autorise à ressentir autre chose que de la colère. Il accepte de parler du passer, ce qu'il n'avait jamais fait hors mis la crise où il m'a révélé avoir été adopté longtemps après l'abandon de sa mère.
   Ses mains commencent à se frotter contre ses avants bras. Il stresse et recommence à se gratter jusqu'au sang, recouvrant ses dernières blessures dont certaines dont je suis responsable.
   - Tout n'est pas de ta faute. Dit Hong-Joong en se relevant du matelas, lâchant ainsi mes mains. Nous aurions dû agir plus nous aussi.
   - Non, au contraire, vous en avez déjà fait trop pour moi. Surtout toi, Hong-Joong. Je n'ai pas assumé mon rôle de chef et maintenant voilà où on en est.
   Je me penche vers lui pour attraper sa main sans avoir à me lever. Mon ventre me fait un peu mal, ou peut-être que j'ai tellement mal que je ne sens plus la douleur. C'est possible. Le contact de ma main fait presque sursauter San et ses ongles arrêtent de griffer sa peau nue. Il me regarde d'une manière qui me brise le coeur. Il est si fatigué, anxieux... Il garde la tête haute pour ne pas nous inquiéter, mais si on le connaît bien on voit directement que tout ça n'est qu'une facette. En revanche, je sais qu'il n'est pas prêt de baisser les bras.
   Je n'ai pas besoin de parler, San comprend ce que je veux. Il s'assoit sur le bord du lit et m'incite à poser mes fesses sur ses genoux, ce que je fais évidemment sans hésiter. Il attrape mes cheveux lâchés pour les rassembler d'un côté et pouvoir poser sa tête de l'autre côté. Ses bras s'enroulent autour de ma taille. C'est la première fois que nous nous retrouvons dans une telle position et, bon sang, je me demande comment j'ai pu m'en passer pendant si longtemps; toute ma vie.
   Je croise le regard coquin de ma copine et lui réponds par un clin d'œil. Elle sait très bien que San est le type d'homme que j'attends depuis toujours, et que j'ai fini par croire disparu. Avant lui.
   - Je ne t'en veux pas Jong-Ho. Reprend-t-il calmement. Tu sais que sortir de Pirateez est impossible, mais si c'est vraiment ce que tu veux je peux faire une exception. Pour toi comme pour vous autres. Il soupire doucement. Je frissonne en sentant son souffle chaud caresser mon cou. Je sais que Jong-Ho n'est pas le seul à envisager de nous quitter.
   Il ne cite pas de nom, mais à mon avis il a déjà une petite liste.
   Après un long silence, Jong-Ho lui répond.
   - Mais t'as besoin de moi. T'as besoin de nous, mec. San relève la tête vers lui et se fige en voyant son sourire illuminé son visage. Le même qui m'a fait directement l'aimé. Je ne veux pas t'abandonner. J'ai juste peur et surtout je ne vois pas comment on peut s'en tirer. Mais tu as toute ma confiance, tu le sais.
   - Tu as notre confiance à nous tous. Ajoute WooYoung.
   - Même la mienne, un petit peu. Dit Bora, faisant rire Seong-Hwa.
   - Merci. Dit-il doucement, ému. Merci beaucoup. Je vous promets que d'ici un mois on sera débarrassé d'Eunji. La fausse relation qu'entretient Hannah avec lui est sur le point de porter ses fruits.
   Nous échangeons un regard complice.
   - Il sera bientôt l'heure de le confronter. Ajoutais-je.
  

𝐖𝐡𝐞𝐧 𝐭𝐡𝐞 𝐍𝐢𝐠𝐡𝐭 𝐅𝐚𝐥𝐥 - 𝐂𝐡𝐨𝐢 𝐒𝐚𝐧Where stories live. Discover now