𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒𝟒

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Mes yeux s'ouvrent alors que mon cerveau n'a même pas encore conscience que je suis réveillée. Tout est... bizarre. J'ai l'impression d'être dans un rêve, et à vrai je ne sais même pas vraiment qu'est-ce qui me permet d'être sûre que ce n'en est pas un. Tour autour de moi semble irréel. Ma vue est brouillée, c'est comme sil y avait un voile devant mes yeux. La faible lumière suffit à les agresser tandis que mes oreilles distingues des voix qui, elles aussi, n'ont pas l'air de vraiment exister.
Je suis perdue. Totalement désorientée. Je ne suis même pas sûre d'être... d'être, tout simplement. Cette sensation je la connais bien, c'est la même que j'ai lors de mes crises d'angoisses, quand je déréalise. Mais ce phénomène n'a jamais été aussi fort qu'aujourd'hui. C'est vraiment affreux. Je n'ai pas l'impression d'exister, pourtant je suis bien là, dans un corps que je n'arrive pas à bouger. Ou alors je bouge un peu, mais je ne m'en même pas compte.
Je dois faire un effort qui me paraît surhumain pour juste comprendre que ce que je vois est un plafond blanc et que les voix que j'entends sont celles de mes amis et de San. Mes oreilles discernent même une voix féminine. Bora...? Comment c'est possible ? Oh et puis je ne suis même pas vraiment sûre de savoir ce que j'entends...
Je ne sais pas ce qui m'arrive mais une chose est sûre, cela ne m'est jamais arrivé.
Mes mains tentent de bouger. Il me semble que j'y parviens, mais je ne sens qu'un drap sous mes doigts. Mes yeux clignent dans un geste lent et... Bon sang, pourquoi cela me paraît si difficile de les fermer pour les réouvrir ? Ça ne devrait pas être le cas. À chaque clignement j'ai l'impression d'être à deux doigts de me rendormir, c'est là que je me rends compte que j'ai terriblement sommeil.
J'essaye de gigoter, pourquoi ? Je n'en ai aucune idée. Mais quand je n'y arrive pas, ou du moins pas comme je le voudrais, je commence à paniquer. Mon cœur s'emballe, je ne l'ai jamais entendu battre aussi fort. De même pour ma respiration qui s'accélère, s'agite et devient très bruyante. Si les sons extérieurs sont flous et lointains, ceux qui proviennent de mon corps résonnent dans mes oreilles. Un son sort de ma bouche, un gémissement de peur me semble-t-il.
Les voix autour de moi s'arrêtent, remplacée par des bruits de pas qui se rapproche. Je sursaute presque quand la tête de San apparaît juste au dessus de moi. Il a l'air mort d'inquiétude. Non, il est mort d'inquiétude.
Pourquoi ? Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qui m'arrive ?
J'ai peur...
Est-ce que San est bien là ? Ou est-ce que je rêve depuis le début ? Je suis... morte ?
Sa main se dépose doucement sur ma joue et la caresse. Le contact de sa paume chaude sur ma peau me rassure un peu.
Je ne suis pas entrain de mourir, tout ça est bien vrai.
Quelque chose s'affaisse à côté de moi. San vient de s'assoir. Je comprends que je suis allongée sur un matelas, celui de sa chambre. Maintenant que je fais attention, je vois les rideaux transparent de son lit à baldaquin. Ils sont couleur lilas. C'est ma couleur préférée. Les anciens étaient rouges, mais ils ont été déchirés le soir de la réception d'Eunji. C'est San qui s'est défoulé dessus quand je prenais ma douche, je m'en souviens. Pourquoi ce souvenir me revient en tête ?
- Doucement ma Hannah.
Il me chuchote presque ses mots, puis rapproche son visage du mien pour embrasser mon front. Ses lèvres chaudes et humides ont un drôle d'effet sur mon corps. Mon cœur ralentit ses battement légèrement, mais c'est déjà ça, cependant j'entends encore ma respiration haletante.
  - J'ai... Je me rends compte que ma bouche est pâteuse. Ma voix se casse en prononçant mes premiers mots. J'ai peur... J'ai peur...
   - Peur de quoi ?
   Sa voix est si douce...
   Son visage aussi...
   Je commence à douter de ne pas être morte. Je suis certaine que si les anges existent, San pourrait très bien en être un. C'est presque si je ne vois pas quelques rayons de soleil émaner de son corps.
   - M-Mon corps... Je suis morte...?
   J'ai peur de la réponse, malgré tout.
   J'entends une voix de femme, la même que tout à l'heure.
   - C'est l'anesthésie générale qui lui fait ça, c'est flippant mais normal.
   Bora... Je suis sûre que c'est Bora. Mais qu'est-ce qu'elle fait là.
   - Tu as entendu ? Reprend San. Tu te réveilles d'une anesthésie, c'est normal Hannah.
   Je n'arrive vraiment pas à m'habituer à sa voix calme. Et mon prénom dans sa bouche me fait encore plus d'effet que les autres fois. Il m'aide à me sentir réelle, vivante. Et il me donne l'impression d'être précieuse pour lui.
C'est le cas, pauvre idiote.
   Il me parle d'une anesthésie, je n'en ai aucun souvenir. En fait, je n'ai aucun souvenir de ce qu'il s'est passé avant que je me réveille. J'essaye de creuser ma mémoire pour cherche même un petit indice, mais c'est comme ci mon cerveau refusait de me donner son accès. Je suis trop épuisée pour ressasser des souvenirs.
   Ne pas savoir de quoi il parle me stresse encore plus. Mais San est là, il est bien là.
   - San... San...
   - Oui, je suis là. Tout va bien.
   Pourquoi il a l'air si... ému ? Ses yeux brillent comme s'ils allaient se mettre à pleurer, ou plutôt comme s'ils se retenaient de pleurer. Je m'aperçois que de toutes petites larmes perlent le coin de ses yeux, mais San refuse qu'elles tombent on dirait.
   San... pleurer ? Non, c'est un rêve. Ce n'est pas possible. Pas San. San ne pleure pas. Il ne pleure jamais. 
   - San... San...
   Je meurs d'envie de lui poser toutes les questions que je me pose, mais rien ne sort de ma bouche mis à part son prénom. Mes lèvres sont aptes à seulement le répéter en boucle. Il y a quelque chose de rassurant à le dire. Ça me donne la certitude qu'il est bien réel, devant moi. Parce que j'ai toujours l'impression que tout ceci n'existe pas. Que moi même je n'existe pas.
J'ai peur...
   - Hannah, je suis là.
   Sa main attrape l'une de mes mains et la serre fort, alors que sa seconde est toujours sur ma joue.
   - San...
   - S'il te plaît... arrête... Une larme roule sur sa joue et s'écrase sur la mienne. Tout va bien, je suis là. Hannah, je t'en supplie, arrête. Tout va bien. Tout va mieux.
   - San... Je...
   - Pitié, arrête Hannah.
   Mon prénom dans sa bouche a l'air inestimable à mes yeux. Mais le sien dans la mienne le met dans un état presque second. Il n'aime pas ça, pas dans la situation actuelle. Lui, qui avait un cœur de pierre quand je l'ai rencontré, est touché et déstabilisé juste m'entendant répéter son prénom. Ça m'a l'air trop impossible pour que ce soit...
Arrête de dire que c'est irréel. San pleure vraiment pour toi.
   Mais que m'est-il arrivé pour qu'il en arrive là ?
   Des pas s'éloignent et une porte se referment. Mon cœur s'emballe en imaginant San partir, mais il est toujours là, les larmes aux yeux bien qu'aucun autre ne tombe. Sommes-nous seule désormais ?
   - San je... Sa main se referme plus fermement sur la mienne alors que l'autre essuie sa propre larme sur ma joue. Il n'a pas le temps de me demander une nouvelle fois d'arrêter de prononcer son prénom que j'ai déjà repris la parole. Je t'aime. J'ai sommeil... J'ai sommeil. Très sommeil. Je... je peux dormir ? J'ai sommeil...
   J'ai étrangement conscience d'avoir l'air d'une imbécile à répéter la même chose en boucle, mais je n'y peux rien. Ma bouche bouge toute seule. Répéter m'aide à être sûre que j'existe bien et que tout va bien. Entendre ma propre voix me rassure.
   San me regarde avec de grands yeux emplis de sentiments comme la... je ne sais pas.
   Pourquoi il me fixe comme ça ? Qu'est-ce que j'ai dit ? J'ai oublié.
   - Je peux dormir ? J'ai très sommeil...
   Pourquoi il me fixe comme ça ? Qu'est-ce que j'ai dit ? J'ai oublié.
   J'ai oublié.
   Oublié.
   J'ai sommeil.
   Très sommeil.
   - Oui, dort Hannah. Je veille sur toi. Et comme pour être sûr que je comprenne bien ce qu'il me dit, il me le répète une nouvelle fois. Tu peux dormir. Je reste là. Je ne pars pas.
   - C'est vrai ?
   - Oui, tu peux dormir.
   Je ne demandais pas une nouvelle confirmation à ce propos là. Mais mes yeux se referment déjà.
   - M'aban... donne pas. Marmonnais-je.
   - Jamais je ne pourrais faire ça, Hannah. Je le sens recoiffer une mèche de mes cheveux et la glisser derrière mon oreille. Dors, je reste là.
   - Hmm...
   Mes lèvres sont soudain trop lourdes pour que je puisse dire un mot de plus, tout comme mes paupières pour que je puisse les ouvrir juste une fois encore. Mes questions s'évanouissent dans mon esprit. Mon corps devient mou. Je sens toujours ses mains alors que son corps se coller au mien après s'être allongé.
   - Je t'aime aussi, bien plus que tu ne peux l'imaginer Hannah.

Quand mes yeux se rouvrent, je n'ai quasiment aucun souvenir de mon premier réveil de l'anesthésie.

𝐖𝐡𝐞𝐧 𝐭𝐡𝐞 𝐍𝐢𝐠𝐡𝐭 𝐅𝐚𝐥𝐥 - 𝐂𝐡𝐨𝐢 𝐒𝐚𝐧Where stories live. Discover now