𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒𝟏

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Quand Jong-Ho lance le top départ je suis déjà en position défensive. Les poings serrés dans mes gants rouges parallèles à ma poitrine, les coudes vers l'extérieur, les jambes légèrement fléchis et le ventre gainé. J'inspire et expire un grand coup, consciente qu'après ça je n'allais plus avoir l'occasion et le temps de le faire avant la fin du combat.
Je suis prête.
MinGi se déplace rapidement sur l'épais tapis pour me donner un crochet du droit dans les côtes que j'esquive en faisant tourner mon buste vers la gauche avec une facilité étonnante, résultant de toutes mes séances d'entraînements précédentes. Je n'ai pas le temps de m'écarter que Yeo-Sang apparaît derrière lui puis, en une fraction de seconde, se déplace jusqu'à moi. Il m'enchaîne avec plusieurs coups où il vise mon visage. Je pare la plus part de ses attaques avec mes avant bras qui rougissent à vu d'œil, mais n'arrive pas à échapper au dernier.
Le poing de Yeo-Sang s'abat violemment sur ma joue et m'assomme sur le coup. Mon corps ne tombe pas mais vacille en arrière de quelques pas tandis qu'un goût de fer empli l'intérieur de ma bouche. Lorsque je passe ma langue sur ma lèvre inférieur je comprends qu'elle s'était ouverte dans le coin et saignait de manière abondante, sans douleur particulière pour autant.
Je relève la tête vers mes deux entraîneurs dont le tee-shirt de compression faisait ressortir tous leurs muscles en détail. Je les avais suffisamment vu pour ne plus perdre ma concentration en les regardant, mais l'envie de m'y attarder n'avait pas disparu. Je croise le regard de l'un et de l'autre. MinGi semble se préparer à m'attaquer de nouveau alors que Yeo-Sang avait plutôt l'air surpris de m'avoir touchée à la joue aussi fort. Un peu plus loin derrière eux j'aperçois dans mon champ de vision San, adossé contre la table qui délimite la piste de tire, les bras croisés contre son torse, qui nous regardait faire attentivement. Sa présence et l'attention qu'il me porte me donne la pression. J'ai peur de ne pas être à la hauteur pour lui, alors que d'habitude je suis la première à m'en foutre de ce que pense les autres. Mais même si je sais très bien qu'il est fou de moi, j'ai toujours l'impression de toujours devoir lui prouver ma valeur pour ne pas qu'il se lasse de moi. C'est stupide, toute foi j'arrive de mieux en mieux à en faire abstraction. Félicitation moi.
Je ne laisse pas MinGi m'attaquer le premier. Je me faufile jusqu'à lui pour le ruer de coup au niveau de la poitrine. Si j'arrive à le toucher je pourrais l'essouffler bien plus vite. Évidemment je ne parviens pas à le toucher une seule fois, ça aurait été trop facile. MinGi esquive mes coups facilement. L'élève n'est pas près de dépasser le maître, en revanche il lui donne de plus en plus de fil à retordre.
MinGi arrive à anticiper la plus part de mes mouvements, mais je vois qu'il a du mal à le faire pour les derniers coups que je lui donne. Et comme s'il en avait marre, il bloque mon bras droit entre son avant bras et son biceps. Le muscle se contracte tandis que son coude s'appuie contre lui pour garder sa puissance. J'essaie de me dégager en tournant mon bras, en vain, puis commence à m'agiter en espérant qu'il dessert rapidement sa prise quand je vois Yeo-Sang se faufiler derrière moi. Ce dernier me donne un coup à l'arrière des genoux, me faisant subitement perdre l'équilibre. MinGi libère mon bras alors que je retombe lourdement au sol. Mes dents claques à cause du choc et je me retrouve à quatre pattes, prise en sandwich entre les deux hommes, les genoux presque tremblants. De là où je suis les garçons m'ont l'air de géants.
J'avais perdu l'avantage, il fallait vite que je le retrouve.
J'élance de toutes mes forces l'une de mes jambes vers l'arrière et mon pied tape le genoux de Yeo-Sang pour le ralentir. J'en profite pour me redresser et fais directement face à MinGi. Mes gangs frappent les siens et je parviens à lui mettre un coup dans le ventre. Malgré la douleur il ne se plie pas, évitant ainsi de me perdre de vu et d'être plus vulnérable. Je me décale pour ne plus être entre eux mais face à eux. Je sautille sur place pour éviter de perdre mon rythme et mon adrénaline, la respiration haletante et la transpiration perlant mon front et mes tempes.
Les deux reviennent encore plus en force et je dois d'autant plus me concentrer pour anticiper leurs gestes et ne pas me faire surprendre. Mon bras gauche pare le poing de Yeo-Sang et le droit celui de MinGi. Face à leur force qui n'est pas du tout égal à la mienne je peine à garder leur poing à l'écart, mais je tiens bon et parviens à les écarter. Mon genoux droit part dans le ventre de MinGi, ravivant la douleur laisser par ma main quelques secondes avant. Malheureusement je ne vais pas assez vite puisque Yeo-Sang a le temps de me redonner un coup dans la joue, la même que tout à l'heure. Ma lèvre qui avait arrêté de saigner s'y remet de plus belle alors que ma mâchoire s'engourdit. Je recule de quelques pas en essuyant ma bouche avec mon bras, laissant une traînée de sang sur ma peau nue. D'un coup, mes gants me paraissent trop encombrants.
Avec mes dents je retire le scratch de l'un pour le faire tomber par terre et fais de même avec l'autre. Mon pied shoot dedans pour les éloigner du tapis, soit la zone de combat. Un sourire apparaît sur le visage de mes adversaires, puis sur le mien.
Ma jambe droite s'appuie vers l'arrière pour me donner un peu plus d'élan avant de foncer sur Yeo-Sang. J'encercle sa taille de mes bras en plaquant ma tête contre son torse. Il recule de quelques pas, déséquilibré par mon poids pas si éloigné du sien. Je soulève une de mes jambes pour l'enrouler autour de sa cuisse puis fait pivoter mes hanches. Ma queue de cheval fouette l'air alors que son corps ne parvient pas à garder appui et tombe sur le tapis, m'entraînant dans sa chute dans un gros bruit sourds. Son dos et l'arrière de son crâne tape fort contre le tapis tandis que je me retrouve presque à califourchon sur lui. Cela me rappelle notre premier entraînement.
Quel nostalgie.
Yeo-Sang croise ses bras devant son visage pour le protéger et essaye de me dégager sur le côté en enroulant ses jambes autour de ma taille et en faisant basculer son corps sur le côté, ce qui fonctionne. Je me rattrape sur les mains, manquant de me taper la tête, et ait tout juste le temps de me redresser que MinGi me charge, littéralement. Son corps vient plaquer le mien contre le mur derrière alors que ses mains se pressent autour mon cou. Je ne l'avais même pas vu enlever ses gants, je n'étais donc pas encore assez attentive.
À cause de ma respiration saccadée il me faut qu'un court instant pour commencer à manquer d'air et à en souffrir. Mes poumons semblent être pressés à l'intérieur de ma poitrine et me brûle. Ma tête me fait mal, peut-être à cause du sang qui circule, je ne sais pas, et ma vue se trouble. Je ne discernait plus que le visage passible de MinGi.
Mes mains essayent de desserrer les siennes, mes ongles les griffent, mes pieds donnent un à un des coups dans ses tibias, sans succès. C'est en réalisant que je ne pouvais pas me sortir de là que je commença à vraiment paniquer.
Autour de nous une personne parla, puis une autre encore. Je comprenais tout juste ce qu'elles disaient, et j'avais encore plus de mal à mettre un prénom sur une voix.
   - Tu y vas trop fort. Je crois qu'il s'agit de Jong-Ho.
   - Lâche-là San. Fait Yeo-Sang, ou pas.
   - Elle doit savoir ce que ça fait.
La voix froide de MinGi me fait encore plus paniquer. Au court de nos entraînement j'ai eu plusieurs fois l'occasion de voir son double visage, mais jamais autant que maintenant. Ce n'était plus mon ami MinGi. J'avais devant moi le puissant et dangereux Song MinGi, membre du cartel Pirateez.
   Mes poumons manquaient cruellement d'oxygène, si bien que la force quitta rapidement mon être et que mes mains se détachèrent des siennes pour retomber mollement le long de mon corps. Mes yeux se fermèrent lentement. J'allais m'évanouir.
   - ÇA SUFFIT !
   J'étais incapable de savoir à qui appartenait cet hurlement. À vrai dire, j'étais étonnée d'avoir pu l'entendre.
   MinGi me lâche enfin, mes poumons me font mal à la première respiration. Mes genoux flanchent. Je m'écroule sous mon propre poids, retenu par un bras entourant ma taille pour éviter de m'écraser. On m'assoit contre un mur alors que ma respiration est bruyante, rapide, hachée et douloureuse tout comme ma tête. Je tousse à m'en faire mal à la gorge, portant une main faible à ma poitrine comme si cela allait m'aider à reprendre mon souffle. Mes poumons ont l'air de crier. Jamais je n'ai eu aussi mal de ma vie.
   Au bout d'un temps que je n'arrive pas à définir, j'ouvre lentement les yeux et suis éblouie par la lumière du garage. Je distingue enfin quatre silhouettes que je reconnais quand ma vue se stabilise. À ma gauche se trouve MinGi dont le bras est encore dans mon dos, autour ma taille, devant moi est accroupi San, le visage terriblement inquiet et en colère, et derrière se tiennent Jong-Ho et Yeo-Sang, debout. Je vois San adresse un regard furieux à MinGi qui me lâche pour se mettre à la même hauteur que les autres. Le chef de cartel me saisit les mains tout en me regardant sous tous les angles. J'ai encore du mal à les serrer dans les miennes.
   - C'est passé.
   Je tousse dans mon coude, mais cette fois-ci un peu de sang sort. Ça ne rassure encore moi San, alors que moi je me sens trop mal pour me soucier de mon état de santé.
   - C'est bon, ça va. Je grimace à cause de ma gorge douloureuse.
  En tout cas beaucoup mieux qu'avant.
   - Je suis désolé. Je ne pensais pas presser ta gorge aussi fort...
   San se retourne vers lui pour lui adresser un nouveau regard assassin. Il lui en voulait et voulait qu'il le sache.
   - 'Pas grave. Je mâchais mes mots.
   - Bien sûr que ça l'est. Crache San avec autorité.
   - Faut quand même dire qu'au moins, Hannah sait à quoi s'attendre si elle se fait étrangler. Ricane Jong-Ho jusqu'à ce qu'il croise les yeux de son ami et chef. Oh c'est bon. On peut rigoler ouuuu ? Il lève les mains en l'air.
   J'ai tendance à vite oublier qu'eux et moi n'avons pas la même vision de la souffrance. Ce que MinGi m'a fait est presque anodin pour eux. Ça ne l'est pas parce que c'est moi et que nous sommes amis, mais ça ne les choquent pas.
   - Arrête, MinGi a traumatisé Hannah quand même. Lui répond Yeo-Sang.
   - Super, vous me faites encore plus culpabiliser. Dit le concerné.
   MinGi s'accroupit à mon niveau pour passer sa main dans mes cheveux attachés en queue de cheval, rapidement arrêté par San. Il n'est visiblement pas prêt d'oublier ce qu'il s'est passé. Il n'aimera donc pas que je prenne sa défense.
   - C'est bon, San.
   Il me fixe comme si j'avais dit quelque chose de mal, là où MinGi me remerciait plutôt rien qu'à travers un regard. Je le laisse caresser la racine de mes cheveux puis mon épaule pendant que ma respiration redevient peu à peu normal. Je pense en avoir encore pour un petit moment avant que cela soit entièrement le cas.
   - Je ne pensais pas que tu allais paniquer autant. Il se justifie.
   - J'ai plutôt l'habitude qu'on m'étrangle gentiment pendant qu'on me baise. Je hausse les épaules innocemment.
   - À bon entendeur. Rigole Jong-Ho, fusillé par San comme d'habitude.
   - Je t'ai répété plein de fois que... je le coupe.
   - Que paniquer s'est se laisser être tué. Je sais. Mais sur le coup je n'ai pas su quoi faire.
   - J'oublie que ça ne fait que trois mois que je t'entraîne. Désolé Hannah, ça ne se reproduira plus.
   Il dépose un doux baiser sur mon front, sous l'œil mécontent de Monsieur Possessif. Quand MinGi se détache, j'ouvre en grand mes bras en me penchant vers San pour le prendre dans mes bras. Comme la plus part du temps son corps se crispe au départ, puis se détend en se joignant à mon étreinte. Son souffle chaud caresse ma joue, ses mains mon dos. Je respire son parfum, un mélange de fraîcheur et de mâle alpha. Miam. Son corps s'écarte et ses mains viennent se poser sur mes joues. Il tourne mon visage à droite, puis à gauche, s'attardant sur ma blessure superficielle à la lèvre inférieur qui saigne toujours. Mon cœur se réchauffe davantage lorsqu'il embrasse cette endroit là doucement, me provoquant une légère douleur qui me faisait étrangement presque du bien. Mon visage se crispe par la gêne et l'excitation lorsque je sens sa langue lécher mon sang dans un geste qui paraissait presque anodin. À mon avis les garçons autour de nous ne l'avait même pas remarqué.
Je devrais être entrain de savourer ce baiser; notre sixième si mon compte est bon puisqu'il m'avait embrassé deux autres fois depuis la réception d'Eunji; mais à ce moment là je ne pouvais pas m'empêcher de rire intérieurement en me faisant la remarque que si j'avais eu le sida, il l'aurait chopé à cause de ce geste tout aussi sexy que dégoûtant. Quelque de normal n'aurait pas pensé à ça en étant embrassée par l'homme de sa vie.
Si moi je n'ai jamais fait le premier pas c'est bien par peur du rejet. Je me joigne toujours à ses baisers et parfois il m'arrive de capturer ses lèvres pour un deuxième, en revanche c'est toujours San qui s'occupe de le faire en premier. Il le fait dans des moments où j'ai besoin d'être rassurée, ou quand lui a eu peur pour moi d'une manière ou d'une autre. Mis à par ça, on en reste aux câlins. Mais je me rends compte maintenant plus que j'en ai marre de devoir attendre un baiser de lui rien que parce que j'ai peur qu'il me rejette. C'est pas du tout mon genre d'attendre quelque chose des autres, et encore moins quand ça implique un homme. Pourtant, avec San, je l'ai toujours fait sans même me poser de question.
Il faut que je lui en parle, je ne suis pas sûre de pouvoir le supporter plus longtemps maintenant que je m'en rends compte.
   J'attrape ses mains chaudes et les garde même après qu'il les retire de mes joues. Ses lèvres sont légèrement rosées, les miennes doivent l'être tout autant. Un sourire se dessine sur ces dernières en voyant ses yeux pétiller alors qu'il détaille mon visage.
   San me rend tellement folle que j'ai du mal à croire ce que je vais dire, mais il a l'air d'être encore plus sous mon charme que moi je le suis sous le sien. Je me sens vraiment précieuse pour lui. Mon dieu, que ça fait du bien.
- Ouais bon, moi à la base j'étais là pour voir comment la petite se débrouille. C'est Jong-Ho qui brise le silence et la tension entre moi et San par la même occasion. Je me tire en haut.
   San roule les yeux au ciel, fatigué par l'attitude de son ami parfois un peu trop sans filtre. Mon bad boy préféré se relève et me tend une main que je saisis volontiers. De nouveau sur pied je ne peux m'empêcher de grimacer à cause de mes muscles endoloris par ce rude entraînement. Mon ventre était couvert de bleus, mes côtes encore plus. Les anciens n'ont même pas le temps de disparaître que d'autres apparaissent, résultat mon buste ne ressemble plus vraiment à grand chose. J'ai la certitude que si un inconnu voit ça il s'imaginera que je suis une femme battue. Les crop-top c'est mort pour moi depuis une longtemps.
   Jong-Ho monte à l'étage suivi par Yeo-Sang après que MinGi ait refusé son aide pour le rangement de l'équipement dont nous nous sommes servis. San les rejoint pour me préparer un sac de glaçons. De mon côté je reste avec MinGi pour l'aider malgré mes douleurs musculaires et ma peau poisseuse à cause de la sueur. Je suis persuadée qu'on aurait presque pu essorer mon legging et ma brassière de sport. J'attrape les gants que j'ai balancé plus loin au court du combat et les jette en visant le panier dans lequel ils sont tous regroupés, en dessous de l'établi en fer. MinGi pendant ce temps donne un coup de chiffon au sac de frappe suspendu au plafond que nous avons utilisé pour nous échauffer. Il avait l'air dans ses pensées.
- Je ne t'en veux pas MinGi tu sais.
   Il se redresse vers moi alors que je m'assois sur l'établi. Le froid du fer fait du bien à mon divin postérieur. MinGi semble d'un coup embarrassé. Il sourit même bêtement.
- À moins que tu ne pensais pas du tout à ça, au fait. Je lui souris malicieusement. Qu'est-ce que tu me caches toi ?
   - R-Rien du tout.
   Il bégaye et espère vraiment que je ne lui pose pas plus de questions ? Alors là, c'est très mal me connaître.
- Oh, je connais ce regard.
   - Quel regard ?
   - T'es amoureux.
   - Pas du tout.
   - Si si, San me regarde pareil.
   Il évite mon regard et cache son visage comme si c'était son sourire qu'il voulait cacher parce qu'il n'arrivait pas à le retenir.
   J'ai carrément raison.
   Je saute du meuble pour me pointer devant lui, bien prête à avoir plus d'informations.
- OK, je veux tout savoir.
   - Il n'y a rien à savoir !
   - Ah oui ? Je pouffe un rire en pensant à ce que je vais faire. T'ES AMOUREUX ! Cris-je pour le gêner et le confronter encore plus à la réalité.
- Mais absolument pas !
   - Ah le voilà ! Ton sourire ! Il s'agrandit dès que je parle d'amour !
   Je l'entends jurer quelques mots dans sa barbe inexistante, quelque chose comme « le démon cette fille », ou alors c'était « le pimpon cette quiche ». Je ne sais plus.
- Je suis pas amoureux d'elle.
   Mon sourire s'agrandit.
   Il allait parler !
   - Pas encore.
   - Oui, pas encore.
   - Nom, Prénom, âge, profession, description, tout ce qui fini par -on.
   - Arin Dixon, sa mère est coréenne et son père australien. Vingt-trois ans, barman, presque rousse, belle, bonne, intelligente, patiente, attachante, dyslexique, charmante, joyeuse, Hello Kitty girl... Je le coupe sans pour autant revenir sur le « dyslexique » qui a l'air de s'être perdu dans cette énumération de qualités.
- Ouais, je pense avoir compris. En un mot: parfaite, si je comprends bien.
   - Tu comprends très bien.
   Je n'ai jamais vu MinGi aussi solaire. Il est toujours souriant et de bonne humeur, mais alors là je dois dire que ça m'épate presque. Il parle de cette fille comme si elle était déjà la prunelle de mes yeux, comme si elle était déjà tout son monde. À travers lui je vois San avec moi, ou alors Seong-Hwa quand il parle de ma meilleure amie. C'est vraiment adorable et je ne peux qu'être touchée de le voir aussi comblé.
- Ça fait depuis combien de temps ? Vous vous êtes rencontrés où ? Qui a fait le premier pas ?
   - Pitié, épargne moi un interrogatoire. Rit-il. Mais moi je rigole pas, je dois tout savoir. Ça fait un gros mois. J'allais rencontrer un client dans un bar vintage type occidentale quand je l'ai vu. Quand je l'ai vu, je sais pas... mon cœur s'est envolé. Hannah, si tu la voyais, elle est vraiment à coup le souffle. J'en ai même perdu mes moyens au départ. J'y suis retourné une seconde fois, seul, rien que pour avoir son prénom.
   - C'est mignooon. Lâchais-je totalement absorbée par son histoire.
- Elle, elle m'a dit que c'était gênant. Mais elle a rigolé et on a commencé à se fréquenter doucement depuis. Mais j'ai fait quelque chose que je n'aurai pas dû. Mes sourcils se froncent alors que je reste dans le silence pour l'inviter à continuer. Je lui ai dit que j'étais dans un cartel.
   - Mais elle ne sait pas lequel.
   - Si. Je lui ai tout dit. Je lui ai dit qui j'étais pour Pirateez. Elle sait que je suis important pour lui, et que j'ai un train de vie qui est en conséquent assez compliqué. San me tuerait s'il était au courant. Ou plutôt il la tuerait. Finit-il avec une pointe d'appréhension, comme s'il imaginait déjà sa douce y passer.
- Je ne lui dirai rien, je t'en fais la promesse.
   Son sourire devient un peu plus triste, mais il montre aussi qu'il est touché par mes mots.
- Il n'y a que toi qui est au courant. Et Jong-Ho. Il a rigolé quand je lui ai dit que je voyais quelqu'un pour du sérieux. Je crois qu'il ne m'a même pas cru, le con.
   Je n'arrive pas à retenir un rire. C'était vraiment pas étonnant venant de lui.
- Je sais que je peux compter sur toi, et à vrai dire j'espérais pouvoir profiter de tes conseils pour ne pas merder. Je... Je veux vraiment bien faire. 
   - Elle a réagi comment ? Même si je ne le dis pas, MinGi sait que je parle de sa réaction à sa profession tout à fait douteuse et discutable.
- Elle m'a jeté un cocktail à la tête, un moscow mule, je m'en souviens encore. Je puais la vodka et le gingembre après. J'ai vu de la peur sur son visage quand elle a compris que j'avais du sang sur les mains, beaucoup de sang. J'ai dû quitter le bar sous sa demande. Enfin c'était plutôt un ordre qu'elle m'avait crié.
  - Mais après...?
  Il retrouve un large sourire. Il est vraiment piqué. Vraiment, vraiment piqué.
- Mais après elle m'a envoyé un message une semaine plus tard, où elle me menaçait de découper mon zizi si je ne la rejoignait pas au bar après son travail avec un plateau de sushis dans une main et un bouquet de fleur dans l'autre le soir même. C'est ce que j'ai fait, avec un bouquet énorme et une peluche Hello Kitty qui l'était tout autant. Ensuite elle m'a emmenée chez elle, et là on a baisé comme des fois partout dans l'appartement. Le lendemain matin elle boitait à cause de...
   - STOP ! Fais-je dégoûtée et amusée en même temps. Ce genre de choses se disent entre mecs, moi je ne veux pas tout savoir !
   - Ah oui, pardon. Il pouffe un rire avant de reprendre son histoire. Arin accepte qui je suis, ce que j'ai fais et ce que je vais faire. Elle veut juste n'avoir aucun rapport avec le cartel pour le moment. C'est trop récent entre nous pour qu'on imagine cela encore, mais je suis sûre que tu t'entendrais bien avec elle.
   - Tu me la présenteras un jour ?
   - Bien sûr, au moins elle verra qu'il n'y a pas que des fous à Pirateez. Même si tu es en voix de devenir une machine de guerre.
   Ouais, pas sûr que je sois si différente des fous de Pirateez maintenant.
   Après avoir tout ranger, nous nous dirigeons lentement vers l'escalier. Nous nous arrêtons en bas des marches le temps de finir notre discussion, conscients qu'une fois en haut nous ne pourrons plus en parler.
- J'arrive pas à croire que tu aies réussi à garder ça pour toi pendant tout ce temps.
   - Je passe mon temps à cacher à mes patents ma véritable profession. Il mime des guillemets pour ce dernier mot. J'ai l'habitude.
    - Oh, je n'étais pas au courant. Tu leur as fait croire quoi ?
    - Ils pensent que je finis mes études en droits. Ils ne savent même pas que je roule sur l'or, ou alors les virements que je leur fais les ont mis sur la piste mais ils ont délibérément choisi de ne pas m'en parler.
   Je hoche la tête en l'écoutant attentivement. Je me suis presque sentie bête et nulle de n'être même pas au courant de ça, même si je ne pouvais pas le savoir.
   De toute évidence MinGi ne voulait rien avoir à cacher à cette Arin. Tant mieux, au moins elle voit directement qui est MinGi et leur relation à plus de chance de durer. Ça c'est un homme capable, putain. San devrait prendre exemple parfois.
    - Parle en à San d'ici peu. Je serais là pour le calmer, si cette fille est de confiance il n'a aucune raison de s'emballer.
   - Mais tu connais San.
   - Justement. Je lui montre un coup mes fesses et ça y est il aura déjà oublié qu'il était en colère. Et puis il n'a rien dit pour Bora, alors ça devrait aller.
   Bora et Seong-Hwa, un duo auquel je n'aurai vraiment jamais pensé, pourtant il marche super bien. Nous sommes fin février, et depuis le nouvel an ces deux là ne se lâchent pas beaucoup.  Ils essayent de se voir au moins toutes les semaines, apparement l'un ne peut déjà plus se passer de l'autre et inversement. Entre soirées devant la télé et restaurants, Bora est vraiment aux anges. La semaine dernière encore elle me disait lors d'un repas ô combien il est fort au lit, et comment elle s'était retrouvée allongée sur le plan de travail de sa cuisine, dans la baignoire et sur la table basse du salon les jambes grandes ouvertes pour accueillir sa masculinité en l'espace de vingt minutes. Moi et mes petits bisous avec San on en est encore très loin.
- Merci Hannah. J'ai bien fait de t'en parler, au moins j'ai quelqu'un sur qui compter.
   Cette phrase, je l'écouta plus que ravie. C'était le genre à rester graver dans ma mémoire, et celle-ci n'était pas prête de plonger dans l'oublie.
- C'est normal. Lui souris-je en passant mon bras dans son dos.

   Affalée sur le canapé, une poche de glaçons sur mon ventre rougis par le froid, nous; moi, MinGi, Jong-Ho et Yeo-Sang écoutions une heure plus tard les plans de San pour le week-end qui commençait à peine. Lorsqu'il cita une livraison qui allait avoir lieue la prochaine nuit et à laquelle il voulait que j'assiste, je m'étais soudainement redressée dans mon assise, à la fois impatiente et apeurée.
   Demain j'allais partir pour la première fois voir l'un des entrepôts que garde Pirateez, celui où le chef de cartel avait réalisé un véritable massacre six semaines auparavant.
   Si aucun fantôme ne me hantait pour le moment, j'eus l'étrange impression que ça n'allait pas rester ainsi longtemps.

𝐖𝐡𝐞𝐧 𝐭𝐡𝐞 𝐍𝐢𝐠𝐡𝐭 𝐅𝐚𝐥𝐥 - 𝐂𝐡𝐨𝐢 𝐒𝐚𝐧Où les histoires vivent. Découvrez maintenant