Chapitre 8

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Je savais bien que la hâte me ferait ouvrir les yeux avant mon réveil, mais je n'imaginais pas que ça serait à une heure du matin... et qu'il me serait par la suite impossible de me rendormir. Après avoir été gonflée d'impatience et d'euphorie, je suis rongée par des doutes qui viennent brusquement m'assaillir et que j'avais jusque là à peu près réussi à mettre de côté. De même, je réalise que je vais quitter ma famille pour presque un mois pour aller m'installer avec des inconnus, dans une ville qui m'est inconnue et dont les habitants parlent une langue que je maîtrise vaguement. Est-ce que je vais réellement être capable de dialoguer avec eux ? Certes, Aly et moi avons appris énormément de vocabulaire pour pouvoir discuter de la vie de tous les jours ensemble, et dès qu'un mot nous manquait, nous essayions de l'apprendre... mais tout cela sera-t-il suffisant ? Et quand bien même ça le serait ; s'ils parlent trop vite, je ne pourrai pas les comprendre.

J'ai la sensation que de toute façon, ce moment n'arrivera jamais, comme si c'était trop incroyable pour être vrai, comme si ce voyage était quelque chose qui serait à jamais dans mon avenir et qui ne pourrait pas faire parti du présent... un peu comme l'idée qu'un jour j'aurai un travail et peut-être une famille, je n'arrive pas à l'envisager, tout simplement.

Oui je sais, c'est compliqué dans ma tête.

Avec un soupir, je me lève peu après mon réveil et vais chercher mon ordinateur. Équipée de mes écouteurs, je me mets plusieurs films, à commencer bien sûr par Le Roi Lion (oui le Disney, et alors ?) puis, plus classique, Le Titanic, pour m'occuper jusqu'à l'heure à laquelle je suis supposée me lever. Sensible comme je suis, je finis en larmes, alors même que j'ai bien dû voir ce film au moins trois fois depuis le début de l'année... Je ne changerai jamais...

« Bouh ! »

Je sursaute brutalement, manquant de laisser mon ordinateur glisser de mes genoux. La main toujours sur mon épaule, Aly est morte de rire à sa propre blague.

« J'adore quand tu sursautes ! »

Qu'est-ce qu'elle fout réveillée à quatre heures et demie du matin elle ? Surtout pour me faire ça... Elle sait que je déteste qu'on me fasse sursauter, mais depuis qu'elle s'est rendue compte que quand on me fait peur, j'ai bel et bien un mouvement de sursaut mais que mon visage reste absolument stoïque, elle s'amuse à le faire de plus en plus souvent. J'y peux rien moi si mon visage refuse de changer d'expression quand je sursaute...

Je pose calmement mon ordinateur sur ma table de chevet, me lève pour faire face à Aly et la bascule brutalement sur le sol avant qu'elle n'ait le temps d'exécuter le moindre mouvement de recul.

« Excuse-toi.

- Non. »

Assise sur elle, j'attrape un oreiller et l'écrase sur sa figure.

« Excuse-toi.

- Toujours pas ! »

Bon, il va falloir passer au plan d'urgence. Sans qu'elle s'en rende compte et du bout de l'index, j'appuie très légèrement sur le côté de sa taille. Immédiatement, elle pousse un couinement aigu et se tord. Aly est la personne la plus sensible aux chatouilles qu'il m'ait été donné de rencontrer.

« Je suis désolée !

- J'aime mieux ça. »

Je m'écarte et la laisse se relever, avant de revenir à l'assaut de sa taille. Elle bondit littéralement de côté, l'index levé et les lèvres entrouvertes comme si elle voulait me menacer, à la place de quoi elle recule lentement.

« Toi, je t'ai à l'œil, dit-elle en partant. Je ne sais pas pourquoi tu vas me manquer...

- Moi aussi t'inquiète pas. »

SongwriterWhere stories live. Discover now