Chapitre 23

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S'il savait combien de fois je l'ai mentalement étranglé jusqu'à ce que mort s'ensuive en hurlant « tu sais où tu peux te la mettre ta hanche à la con ! », je crois qu'il ne tiendrait pas ces propos... En plus je suis morte de fatigue et malgré les échauffements qu'il m'a imposés, j'ai l'impression que les muscles de mes jambes me tirent horriblement !

« J'ai confiance en toi, sourit-il, je pense que demain ou après-demain, tu auras un niveau suffisant pour danser avec les garçons.

- Vraiment ?

- Oui. Bien sûr, on est loin d'un danseur professionnel, mais si on bosse à fond les deux prochains jours, ça pourra y ressembler, et tu n'auras pas l'air d'une idiote à côté des sept gamins là-bas. »

Du menton, il désigne les garçons, en pleine pause, en train de grignoter des barres de céréales. Nous avons déjà fait une pause d'un petit quart d'heure un peu plus tôt pour partager des sandwichs, mais c'est très loin de me tenir au ventre et de voir les sept amis en train de manger silencieusement, l'air épuisé, fait gémir mon estomac jaloux. Mon professeur est visiblement amusé et me tend une barre qu'il sort de sa poche.

« Tiens, prends-la, tu en as visiblement plus envie que moi. »

Un peu gênée, je commence par décliner son offre généreuse avant d'accepter quand il se fait plus autoritaire.

« Allez les garçons, appelle notre chorégraphe, répétitions générales. »

Ils nous rejoignent, me lançant des regards encourageants derrière des cernes sombres profondément ancrées. La musique est lancée ; je reste sur le côté en attendant la partie où j'entre en scène.

« Stop ! Charlie c'est trop lent, un peu plus de réactivité s'il te plaît ! »

Mais j'ai même pas commencé à danser ! J'étais en train de prendre ma place comme il m'a appris à le faire, au centre du petit groupe ! Oh putain la soirée va être longue, heureusement que ça se finit dans moins d'une heure...

Alors je recommence, encore et encore, et ce n'est qu'après dix minutes d'interminables essais que je réussis enfin à trouver le rythme parfait pour faire mon entrée et que les choses sérieuses peuvent commencer.

Jungkook est le premier à danser à mes côtés et par-dessus la musique, nous chantons tous les deux : lui pour voir comment accompagner ma voix, moi pour m'entraîner à chanter et danser en même temps. Le problème à ce niveau-là ne réside pas dans le souffle, puisque je chante depuis des mois en faisant de la corde à sauter, en revanche les mouvements font trembloter ma voix ; j'ai jusqu'au concert, mon premier direct, pour y remédier. J'ai hâte de pouvoir m'entraîner sur la version où je chante : ça va me faire si étrange de m'entendre, vivement le moment où j'enregistrerai la chanson !

Ça me fait mal de nous regarder dans le miroir : il est un si bon danseur alors que moi... Je suis moi, tout simplement. J'arrive à ignorer le fait que mes cuisses semblent faire deux fois les siennes pour me concentrer sur les pas. À travers les reflets renvoyés par la glace, je réalise à quel point tous mes jeunes camarades ont l'air exténués. Quel rythme effréné ; je me vois déjà mal le supporter pendant un mois (je tiens vraiment à mes nuits de huit heures), alors pendant des années, comme eux... Ils sont des surhommes, c'est pas possible autrement.

Nous enchaînons plusieurs fois le dernier refrain sans s'arrêter, même lorsque je fais une faute (oui parce que les garçons n'en font plus, eux... faut dire j'ai bien entendu qu'ils ont passé au moins une demi-heure à répéter encore et encore cette chorée pendant que je galérais avec ma hanche), et si mes mouvements sont encore à des millénaires d'être aussi fluides, gracieux et énergiques que les leurs, je trouve du moins que je progresse, et assez rapidement même. J'ai du mal à faire la chorégraphie sans hésiter, mais l'important c'est que je sais toujours quand je fais une faute : je connais tous les pas par cœur, même si l'exécution est parfois loin de ce que j'ai en tête. Ça veut au moins dire que je suis sur le bon chemin. Je suis plutôt satisfaite et, en dépit des petits regards moqueurs de certains garçons quand un « la hanche Charlie... » franchit les lèvres du chorégraphe, je reste positive et souriante.

SongwriterWaar verhalen tot leven komen. Ontdek het nu