60- sombre secret

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PDV Sorcha

J'ai décidé de quitter ma chambre après trois jours cachée dans celle-ci.

Je me sens étrange. Enfin, je me sens comme une coquille d'oeuf après cet événement. Je n'aurai jamais dû tirer sur cette fille, mais comme Ruben le dit, il va falloir que je vivre avec.

Quelque chose dont j'ai dû mal à accepter.

Je m'en voudrais pour toujours. J'avais une promesse, mais je ne l'ai pas tenu.  Je suis une lâche.

Comment regarder ma mère après cela ?

Depuis quelques jours, je l'évite mais je pense que dans son côté, elle m'évite aussi.

Je marche lentement vers Ruben, qui, comme à son habitude s'amuse avec Félicia. Malgré mon humeur morose, cette scène me fait sourire pour une raison inconnue.

Je m'assois sur le transat et Ruben lève son regard vert dans ma direction avant de m'adresser un sourire.

— Il va falloir immortaliser ce moment. Sorcha qui sort de sa tanière, raille-t-il.

Je lève les yeux au ciel et Félicia s'approche de moi en marchant maladroitement. Je l'attrape juste à temps et la serre dans mes bras.

— Merci d'avoir occupé Félicia à ma place, remercié-je Ruben sincèrement. Félicia est toute ma vie, j'ai vraiment la chance de l'avoir.

Il se lève du sol et se poste en face de moi.

— Je comprends, elle passe son temps à rire, affirme le mexicain. Mais j'ai une question, pourquoi l'adopté si rapidement ? J'ai entendu que tu l'as pris sous ton aile avec sans hésitation.

Je me lève subitement, un peu effrayée de la tournure de cette conversation. Personne ne sait pas vraiment pourquoi j'ai adopté Felicia. Bien sûr, je donne le prétexte que j'ai l'ordre de la protéger mais pas que. C'est plus que cela.

Ça remonte depuis longtemps.

J'observe ma fille avec le cœur qui se tord douloureusement et les souvenirs de cette mission me reviennent en tête. Je lève mon regard pétillant dans la direction du Mexicain et lui sourit nostalgiquement.

— J'ai des problèmes d'infertilité depuis mes vingt ans, annoncé-je soudainement.

En voyant son regard, il ne s'attendait pas du tout à ça. Je serre ma fille dans mes bras et tente de calmer ma respiration qui est devenue trop rapide.

— C'était lors d'une mission au Soudan. Cette mission a été un vrai foutoir de merde, dis-je en rigolant tristement. On nous a transmis des mauvaises informations et naïve comme j'étais, je n'avais rien vu. J'étais dans une voiture et quelqu'un avait falsifié les freins.

Je m'arrête en essayant de trouver mon courage. Je ferme les yeux fortement avant de sentir deux mains sur mes épaules. Alors je les ouvre et fixe intensément Ruben.

— Un camion fonçait droit sur moi et je ne pouvais rien faire, continué-je d'une voix tremblante. Cela a donc provoqué un grave accident et lors de l'impact un morceau de fer s'est transpercé au niveau de l'utérus, ce qui m'a fait perdre cette chance de porter un enfant plus tard.

Je revois ce camion qui roulait d'une vitesse folle dans ma direction. Suite à  l'impact, j'avais des douleurs partout sur le corps, ce qui m'empêchait de respirer convenablement.

En y repensant à tout cela, je sens des picotements sur mon épiderme et je tente de garder un air neutre.

— Sorcha, je suis...

—  C'est une des plusieurs raisons que je ne veux pas m'engager avec toi, Ruben, avoué-je tristement. Tu n'auras rien avec moi. Je ne peux rien t'apporter à part l'ennui et la tristesse. Il vaut mieux que tu arrêtes tout.

Il ouvre sa bouche mais je tourne les talons avec Félicia qui dort paisiblement entre mes bras.

Qui voudrait une femme qui n'est pas capable de tomber enceinte ?

Personne autre que moi et maintenant Ruben sait ce secret. Ai-je fait le bon choix de l'avoir révélé un de mes sombres secrets ?

**

Plus tard dans l'après-midi.

J'ai passé le reste de ma journée dans ma chambre accompagné de mon enfant.

Je repense à la discussion de tout à l'heure et je me sens coupable. Pourquoi Ruben espère toujours ? Pourquoi continue-t-il à faire des efforts ?

Nous avons passé si peu de temps ensemble et... Et il me fait autant d'effet. J'éprouve beaucoup de choses pour lui. Ruben a toujours été là pour moi, et c'est comme cela je le remercie, en le recalant sauvagement.

J'ai peur de l'avenir. J'ai peur de l'amour. C'est un domaine que j'ai peu expérimenté.

Ma mère entre dans ma chambre avec une affreuse mine. Surprise, je me lève et elle me prend dans ses bras en présentant des excuses dans sa langue natale.

Émue, je ressers l'étreinte et inspire son odeur qui a le don de m'apaiser.

— Je suis désolée Sorcha, tout cela est de ma faute, chuchote ma mère en s'éloignant de moi avec les larmes aux yeux.

— Maman...

— Je ne peux pas imaginer ta douleur mais tout cela est à cause de moi, continue-t-elle avec la gorge nouée. Si je n'avais pas pris la place d'Arys, tu n'aurais jamais sans doute pas suivre les pas de ton père.

Je fronce mes sourcils et l'observe, confuse.

— Comment ça ?

Elle pince ses lèvres.

— J'étais amoureuse de ton père mais j'avais appris qu'il allait se fiancer avec Arys et j'ai tout fait pour l'empêcher. Je suis tombée enceinte de toi et comme je suis la fille d'un puissant baron de la drogue en Espagne, pour mon père, c'était l'occasion de sceller une alliance.

— Mais pourquoi tu racontes tout ça ? demandé-je, perdue.

Ma mère ancre son regard bleuâtre dans le mien.

— Parce que j'ai volé la place d'Arys. J'ai privé Azrael et Kelly de leur père et leur vraie vie. J'étais tellement égoïste que je n'avais pas pensé aux conséquences  pour mes deux et uniques enfants. Tu me mérites pas de vivre cette vie, Sorcha, répond-t-elle mélancoliquement.

Je me contente de la prendre dans mes bras pour la consoler.

Donc, tout ça est la faute de mes deux parents. S'ils ne sont pas croisés puis tombés raide dingue amoureux, alors Sacha et moi n'aurons jamais dû subir cette vie merdique.

La gouvernante entre dans ma chambre, affolée. Mal à l'aise, elle recule mais je m'éloigne de ma mère pour m'approcher de la vieille femme. Elle me tend un morceau de papier en baissant la tête en signe de respect.

Inquiète, je prends le papier et la déplie avant de la lire.

Mon visage se décompose tandis que mes mains se mettent à trembler.

— J'ai trouvé ce morceau de papier sur le lit de monsieur Jiménez, précise la gouvernante, effrayée.

— Qu'est-ce qui se passe ? s'enquiert ma mère.

J'écrase le papier entre mes doigts, en colère mais aussi déçue.

— Ruben est parti en Russie pour tuer le Serpent, lui dis-je sèchement.

Ce gars est terriblement fou. Co.. Comment il a pu me faire un truc pareil ?!

— Olga, avertissez Sarah afin qu'elle prépare le jet. Je dois rejoindre Ruben à tout prix.

Contrat Entre MafieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant