Chapitre 35 : Axelle

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Un courant d'air frais me fait ouvrir les yeux. Je suis allongée sur un lit. Ma tête et mes paupières sont lourdes. Je cligne des yeux, et essaie de prendre une grande inspiration, mais quelque chose me compresse la poitrine. Un poids est étendu sur moi. Il m'empêche de respirer convenablement et me fait mal à l'épaule. J'ouvre complètement les yeux avec difficulté et essaie de me dégager de l'emprise de cette masse étalée sur mon corps. Mes muscles sont affaiblis, je n'y parviens pas. Je daigne tourner mon regard sur le côté, et aperçois la tête de Michael, reposant sur mon épaule. Son bras droit m'enserre la taille et ses jambes sont entremêlées aux miennes. Je frissonne en sentant son souffle chaud dans mon cou. Son haleine à moins une odeur d'alcool, mais ses yeux sont cernés et il dort profondément. J'attrape sa main agrippée à ma taille et la dépose délicatement le long de son corps. Je bascule légèrement sur le côté et sa tête retombe sur le matelas. Je me masse un peu l'épaule, avant de sortir du lit pour me mettre debout. Des tâches floues apparaissent devant moi pendant quelques secondes, je titube, puis ma vision redevient normale, et je me stabilise. Michael grogne dans son sommeil et se tourne sur le côté. Je me dirige sans bruit vers la salle de bain et referme délicatement la porte derrière moi. Mon premier réflexe est de me regarder dans le miroir en face de moi. Je suis encore plus pâle que d'habitude et des cernes immenses entourent mes yeux fatigués. Un mal de crâne atroce me fait comprendre que j'ai vraiment beaucoup forcé sur l'alcool hier soir.

J'entre dans la douche et l'eau brûlante qui se déverse sur mon corps et mes cheveux remplis de transpiration séchée me laisse échapper un soupir de satisfaction. Lorsque je ressors, enfin prête, après avoir masqué du mieux que possible les traces de fatigue sur mon visage, je vois Michael qui dort toujours.

Se souvient-il de ce qu'il s'est passé hier soir ? Comment réagira-t-il en apprenant qu'il a dormi avec moi ? Il n'était pas dans son état normal hier, aura-t-il conscience de ce qu'il a fait sans vraiment le vouloir ? Je préfère le laisser seul pour qu'il commence à deviner tout seul la situation avant de me rejoindre. J'enfile rapidement mes nouvelles chaussures et sors en refermant sans bruit la porte derrière moi.

Lorsque je suis dans la rue, je tourne brusquement à droite pour me diriger vers la côte. Je me laisse tomber lourdement sur un banc et ferme les yeux, en écoutant le bruit des vagues, des mouettes, et des gens autour de moi qui recommencent à vivre, à parler gaiement, et à laisser courir leurs enfants dans tous les sens. Mon téléphone affiche dix heures, et il fait déjà une chaleur suffocante. J'envoie un message à Michael pour qu'il sache où me trouver, puis j'appuie mon dos contre le dossier du banc en métal et j'attends.

Il me rejoint en seulement quelques minutes, haletant et rajustant son tee-shirt qu'il a surement dû enfiler en chemin. Il s'arrête, reprend son souffle et scrute mon visage impassible. Il n'ose pas s'assoir à côté de moi avant d'avoir posé toutes ses questions :

- Tu as dormi sur le canapé ?

- Non, je réponds simplement.

Il fronce les sourcils. Il sait très bien où j'ai dormi, mais il ne veut sans doute pas me le faire comprendre. Il continue :

- Où as-tu dormi alors ?

- Dans le lit.

- Avec moi ?

- Oui.

Michael se frotte l'arrière du crâne comme il le fait souvent lorsqu'il est embarrassé. Il contourne le banc mais ne s'y assois toujours pas. Je continue de l'observer en levant ma tête au maximum.

- Je me souviens de rien, ajoute-t-il, après la fête, on est rentrés, et à partir de là, c'est le flou total.

Il devait être encore plus mal en point que moi hier soir. Moi je me souviens pratiquement de tout lorsque je m'efforce à réfléchir. Je ramène mes genoux contre ma poitrine et sourit timidement :

- Moi je me souviens un peu.

Michael ne sait pas quoi répondre. Il s'approche un peu plus de moi et balbutie quelque chose pour m'inciter à poursuivre. Je rougis en collant le plus possible mes jambes contre moi pour me faire toute petite et articule :

- Tu as dit que tu me trouvais jolie, parce que j'avais de beaux yeux, de beaux cheveux...et que j'étais délicate et courageuse.

Nous n'osons plus nous regarder dans les yeux. Nous tournons la tête chacun dans une direction opposée et un silence s'installe. Au bout d'un moment, Michael se force à le briser :

- Je suis désolé, je n'étais pas moi-même hier soir.

- Tu ne pensais pas ce que tu as dit ?

Michael hésite. Je sais qu'il le pensait vraiment, mais aura-t-il le courage de l'avouer ?

- Oui, oui je le pensais.

- Parce que tu as aussi dit que tu m'aimais et après tu m'as poussée sur le lit pour m'embrasser.

- J'ai fait ça ? s'étrangle-t-il.

Je pouffe et l'attrape par la main pour le forcer à s'assoir près de moi. Il fait tout pour ne pas croiser mon regard. Finalement, il daigne me regarder dans les yeux et se frappe violemment le front.

- Je suis vraiment désolé...

A petit pas, je me rapproche de lui et finit par me blottir contre son bras. Il détourne le regard, honteux, et je murmure :

- Moi aussi, j'ai dit que je t'aimais.

Lentement, il tourne la tête vers moi. Nos visages ne sont plus qu'à quelques centimètres de distance à présent. Nos nez se touchent presque lorsque je murmure :

- Michael ?

- Oui ?

- Je ne sais pas embrasser.

- Pas grave.

Nous sourions et il m'attrape le menton pour me faire toucher ses lèvres douces. Nos doigts s'entrelacent et il passe une main derrière mon dos. Beaucoup de gens ont les yeux rivés sur nous, mais leur regard ne me dérange pas. Enfin un vrai baisé, pas un baisé de deux personnes complètement saoules qui viennent de rentrer d'une fête. J'aimerais rester ainsi éternellement, mais il faut bien que quelque chose vienne perturber ce moment magique.

Double {Terminé} Where stories live. Discover now