Chapitre 81 : Michael

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-         Michael ! Salle de réunion dans une heure c'est clair ?

La voix d'Axelle est froide et sèche. Je crois qu'elle m'en veut, par rapport au fait que je ne lui dise rien de ce qu'il s'est passé durant la mission.

Je hoche docilement la tête et repense tristement à la discussion que nous avons eue tous les deux, assis sur le parquet en métal froid du labyrinthe qui servait de demeure à son oncle. J'étais persuadé que tout serait alors fini, mais il a fallu qu'elle perde la mémoire. Il faut dire que je brûle aussi d'envie de lui hurler à la figure tous les détails de l'excursion, mais je l'aime trop pour cela.

J'ai une heure devant moi, alors j'en profite pour sortir un peu et me dégourdir les jambes.

Encore et toujours les vieux quartiers. Il n'existe pas un seul état où il n'y a pas de population pauvre qui meurt de faim dans des immeubles délabrés. L'autre soir, alors qu'Axelle était dans sa transe et venait de tuer la petite fille, Manoé a forcé l'ouverture du coffre fort qui se trouvait dans une armoire au fond de la pièce à côté du bureau. Il en a sorti une centaine de liasse de billets qui valaient au moins des millions et des millions d'euros.

Axelle ne m'en a pas donné la permission, mais je n'avais pas envie de lui réclamer le droit d'en prendre une partie. Les poches pleines d'argent, je déambule à la recherche d'une âme qui vive.

J'aperçois une veille femme, assise sur une marche, entourée de vieux débris et de déchets voletant autour d'elle, au rythme du vent d'automne. Elle s'est enroulée d'une grande écharpe trouée et d'une couverture sale pour se tenir chaud. Lorsqu'elle lève les yeux vers moi, je me rends compte qu'elle ne doit finalement pas avoir plus de quarante ans. Mais ici, ceux qui ont plus de trente ans sont considérés comme des vieillards. S'ils ont réussi à survivre aussi longtemps, c'est un miracle.  Ses joues sont creusées, et son regard est vide. Je m'accroupis à sa hauteur et elle me demande d'une voix faible et enrouée :

-         Qu'est ce que vous voulez jeune homme ?

-         Vous donner de quoi manger.

Je souris et lui tend une liasse de billet. Elle la dévisage avidement, mais secoue la tête.

-         Je n'en veux pas.

-         Ne soyez pas ridicule.

Elle se pince les lèvres et demande :

-         Vous voulez savoir pourquoi ?

Je fronce les sourcils et hoche la tête. Quelle bonne raison a-t-elle pour refuser tout cet argent ?

-         Vous faites partie des résistants meurtriers n'est ce pas ? 

-         Pardon ? m'étranglé-je.

Elle désigne l'immeuble duquel je viens de sortir et où est construit notre quartier général.

-         Vous êtes avec eux là-bas ? Ceux qui tuent à tout va ?

Je déglutis, elle ne tient pas sa langue celle là, et elle n'a pas peur. Je réponds très honnêtement, et puis de toute façon, elle l'a déjà deviné :

-         C'est exact.

-         A cause de vous des innocents se font rafler, accuser d'avoir écrit de petits prospectus en faveur de la liberté. Ils sont accusés de trahison, et souvent fusillés, car tout le monde pense qu'ils sont vos complices.

Ses yeux transparents me transpercent et je ne sais quoi dire devant tant de révélations. Je me doute bien que des condamnations de ce genre ont souvent lieu, mais qu'on nous accuse nous ! Je n'avais jamais entendu cela.

- Réfléchissez-y, vous m'avez l'air d'être un bon garçon. Mon fils aurait votre âge aujourd'hui s'il n'avait pas été tué il y aquelques années.

Double {Terminé} Where stories live. Discover now