Chapitre 36 : Axelle

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Le téléphone de Michael sonne brusquement et nous nous écartons l'un de l'autre en sursaut. Le jeune homme regarde l'heure et soupire :

- Il est onze heures, je dois y aller.

Je hausse les épaules et réponds :

- Ce n'est pas grave, je viens avec toi.

Il ne proteste pas et me prend la main pour m'entrainer vers le même endroit que la veille. Nous n'échangeons pas un mot, et arrivons alors en vue de l'immense bâtiment délabré.

Tout est calme. Beaucoup trop calme. La porte a disparue, et le trou qu'elle a laissé donne l'impression que quelqu'un l'a arrachée en envoyant un coup de pied puissant. Michael observe le reste des dégâts avec inquiétude et accélère le pas. Il passe la tête dans l'embrasure et observe furtivement tout autour de lui. Moi je reste en arrière, sentant une atmosphère pesante s'installer. Je l'entends appeler ses amis, comme Octave, Anna ou un certain Karl, mais personne ne lui répond. Il ressort en trombe et attrape son téléphone pour composer rapidement un numéro. Je me poste tout près de lui pour entendre moi aussi la voix qui lui répond.

- Karl ? demande-t-il plein d'espoir.

- Oui, Michael c'est bien toi ?

Le jeune homme pousse un soupir de soulagement et s'empresse de répondre :

- Oui c'est moi, où êtes-vous bon sang ?

- Au dernier étage. Monte, on va t'expliquer.

L'homme a pris un ton grave et sérieux qui n'annonce rien de bon. Michael, qui ne semble plus se soucier de moi, se met à courir en direction du dernier étage de l'immense bâtisse qui m'inquiète. Je n'ose pas courir dans les escaliers comme il le fait en ayant peur que tout s'effondre à cause de moi. Je gravis les marches grinçantes unes à unes en ne cessant de guetter le moindre bruit qui pourrait annoncer que le toit est sur le point de s'écrouler. Les pièces qui étaient surement bien délimitées à l'époque, n'existent plus. A chaque palier, il n'y a plus qu'une immense salle où se trouvent encore les vestiges d'une cuisine ou d'une salle de bain, mais les murs et la plupart des objets ont disparu. Les parquets épais sont parsemés de trous et les fenêtres n'ont que des vitres absentes ou brisées.

Michael à beaucoup d'avance sur moi alors j'essaie de cesser mes contemplations pour accélérer le pas. Lorsque les escaliers s'arrêtent définitivement, une scène désolante s'offre à nous. Tous les amis de Michael sont là, entassés les uns sur les autres. Certains sont gravement blessés et du sang recouvre le sol en bois. Des formes humaines également apparaissent sous de grands draps blancs. Il y a des morts. Je cligne les paupières pour chasser les tâches floues qui dansent devant mes yeux et appuie ma main contre le mur pour éviter de m'évanouir. L'odeur nauséabonde me monte au cerveau et ces visions d'horreur me font pâlir. Michael attrape mon bras et je cesse de vaciller. Il contemple durement la scène et c'est alors que le grand homme aux cheveux noirs – surement Karl – s'avance vers nous.

- Qu'est ce qu'il s'est passé ?

La voix de Michael est tremblante, incertaine et pleine d'émotions. Karl soupire et baisse le regard en enfonçant ses mains dans les poches de son pantalon noir.

- Une mission d'espionnage qui a mal tourné. Le gars s'est pointé hier dans la matinée avec peu d'informations au sujet du dictateur de cet état. Je lui ai demandé d'où il tenait ces renseignements, et il m'a annoncé que ceux qui lui avaient révélé tout ceci étaient dignes de confiance. Résultat, ils nous ont dénoncés et des dizaines de soldats ont débarqués juste après votre départ. On a été pris par surprise. Ils ne se sont pas posés de questions, ils ont tué Jack qui surveillait l'entrée et ils ont défoncé la porte d'un seul coup pour ensuite tirer dans le tas. Je me suis prit une balle dans la jambe mais j'ai eu beaucoup de chance. On a quand même réussi à se planquer et à riposter mais ils étaient trop nombreux. On a perdu beaucoup de personnes durant cette foutue embuscade, mais on les a fait déguerpir en fin de compte.

Il nous dévoile la jambe sur laquelle il ne prend pas appui qui est entourée d'un long bandage bien serré.

- C'est Manoé qui me l'a fait.

Je sens Michael se décontracter peu à peu. Deux de ses amis ne sont pas morts, ce qui est déjà une nouvelle plutôt rassurante. Il ferme les yeux et déglutit. Je sais qu'il se retient de craquer ou de s'emporter et il demande froidement :

- Où est Octave ?

Double {Terminé} Where stories live. Discover now