Chapitre 58 : Michael

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Je les suis sans broncher, en ayant hâte de connaître la suite des événements. Je n'ai pas peur de ce qui pourrait arriver, je sais très bien que personne ici ne pourrait me tuer. Nous nous arrêtons tous les trois dans la pièce où Axelle se rétablissait il y a quelques jours, lorsque je la prenais toujours pour ma chef. Les deux complices s'adossent au mur tandis que je reste planté devant eux, droit comme un i.

- Bon, c'est quoi l'embrouille ? soupire Karl.

- Monsieur joue les rebelles. Il voulait filer en douce pour rejoindre sa mère.

Karl me fixe et hausse un sourcil en entendant la réponse d'Axelle.

- Michael, je ne pensais pas que tu nous ferais cela un jour.

Je hausse les épaules et la jeune femme poursuit :

- Moi j'étais sûre que cela finirait par arriver. C'est pour cela que je t'en ai parlé à l'avance Karl.

Ce dernier hoche la tête et croise les bras.

- Pourquoi t'as fait ça Mike ?

- Parce que j'en ai marre de cette organisation pourrie.

- Tu te dégonfles à cause de la mort d'Octave.

J'hésite à répondre. Il est évident que la mort brutale de mon ami m'a influencé dans ce choix, mais dois-je vraiment l'avouer à Karl ?

- Mais vous ne comprenez pas que tout ce qu'on fait ne sert à rien ? Cela ne vous fait donc rien de gâcher des vies humaines pour accomplir un travail inutile ?

Ils échangent tous les deux un regard et Axelle articule, déterminée :

- Tout ce que nous faisons est loin d'être inutile. En tuant toujours plus de tyrans, les autres se découragent. Chaque action que nous menons est un pas de plus vers la liberté !

Je sais qu'Axelle a tout un stock d'arguments qui sont loin d'être mauvais, mais je ne reviendrai pas sûr ma décision.

- Pourquoi lutter ainsi ? Pourquoi ne pas trouver d'autres solutions ?

- Michael, les solutions que tu pourras trouver, si tu en trouves d'ailleurs, seront quoi qu'il arrive, beaucoup moins efficaces que celles que nous utilisons aujourd'hui.

Je grogne mais n'insiste pas plus. Je sais très bien que Karl n'est qu'une tête de mule. Mais si j'arrive à convaincre Axelle... Il me faut déjà savoir ce qui la motive à diriger une organisation pareille à celle-ci. Je pourrais ainsi essayer de trouver d'autres arguments pour contredire les siens.

- Pourquoi tu fais ça Axelle ? Pourquoi être à la tête d'un groupe de terroristes ? Qu'est ce qui t'a poussé à faire cela ?

Son visage se durcit soudain, mais elle se force tout de même à sourire :

- Tu veux vraiment savoir ? Je te préviens, ce n'est pas très gai.

Je hoche la tête et son sourire devient plus cruel, presque sadique :

- Je suis la fille d'un dictateur.

Cette seconde révélation sur mon amie m'étonne tout autant que la première. J'ouvre de grands yeux, et voyant mon désarroi, elle poursuit :

- Ma mère était très belle, charmante et serviable, d'après ce que l'on m'a raconté. Elle a directement tapé dans l'œil de mon dictateur de père qui a immédiatement voulu la séduire. Elle l'a repoussé, mais il a insisté. Il a été très offensé. Mon père était le genre de personne qui pensait que rien ni personne ne pouvait lui résister. Qu'il pouvait avoir sur le champ tout ce qu'il désirait. Ma mère n'a pas pu le rejeter bien longtemps. Au bout d'un moment, je suis née. Ma mère s'est toujours très bien occupée de moi, même si, bien évidement, elle n'avait jamais voulu de cet enfant. Mon père l'obligeait à rester près de lui et il s'occupait rarement de moi. Malgré tout, je l'ai aimé, comme une fille aime son père, jusqu'à ce que ma mère disparaisse subitement. J'avais une nurse, qui me chérissait et s'occupait tendrement de moi. Lorsque j'ai eu quinze ans, elle s'est décidée à m'avouer toute la vérité. Elle m'a dit que ma mère s'était un jour révoltée contre l'homme qui la séquestrait avec son enfant, et que dans leur querelle, il avait finit par la tuer. Elle était devenu odieuse, maigre, et avait tout fait pour s'enlaidir et déplaire au dictateur. Il a perdu son sang froid et l'a assassinée. Moi qui avait toujours cru que ma mère était partie seule parce qu'elle ne nous aimait plus, moi et mon père. Elle m'a aussi expliqué l'origine de ma naissance. Une naissance sans le consentement de ma mère, une naissance sans amour. Le soir même, une rage folle s'est emparée de moi, et je me suis introduite dans la chambre de mon père pendant qu'il dormait pour lui trancher la gorge. Je me suis ensuite enfuie sans que personne ne le remarque, et j'ai décidé moi-même de fonder une organisation de lutte contre le totalitarisme.

Double {Terminé} Where stories live. Discover now