Chapitre 57 : Michael

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     - Je suis ton chef idiot.

     J'ai soudain l'impression de recevoir un coup dans le ventre. Mon cerveau a du mal à comprendre le sens de sa phrase. Je cligne des paupières pour essayer d'éclaircir mes pensées, mais la situation est trop improbable pour que je la comprenne. J'ai l'impression d'être en plein dans un mauvais rêve duquel j'aimerais sortir, mais je n'y arrive pas. Le regard d'Axelle est neutre, presque froid. Eprouve-t-elle de la colère envers moi, du mépris ? J'ouvre la bouche pour dire quelque chose, mais la referme aussitôt. Mes poumons sont compressés, et ma gorge bloquée. Je fais un pas vers elle et elle se recule instinctivement. J'aimerais lui faire lâcher son arme, la prendre dans mes bras, lui faire oublier ce qu'il vient de se passer, rentrer avec elle, vivre normalement, fonder une famille, cesser de lutter, et se détendre enfin, mais elle ne semble pas prête à cela :

     - Je ne comprends pas...finis-je par balbutier.

     - Evidemment que tu ne comprends pas, réplique-t-elle, mais ce n'est pas très compliqué rassure toi.

     Je veux lui demander des explications mais elle ne me laisse pas le temps de parler :

     - Alors comme ça, tu voulais t'enfuir lâchement sans ne rien dire à personne ?

     J'ouvre une nouvelle fois la bouche, déconcerté, mais elle continue :

     - Je suis désolé, mais tu connais la règle, si tu t'engages, c'est pour la vie. Sinon, nous sommes obligés de te tuer, ou de te séquestrer pour être sûrs que tu ne révéleras rien à personne.

     Je serre les dents et jette pour la première fois un regard noir à la femme qui se trouve en face de moi. Je dis bien la femme, car comment être sûr qu'elle s'appelle bien Axelle ? Comment savoir si son caractère est bien le même qu'elle adoptait face à moi ? Non, c'est certain, cette femme je ne la connais pas. Je croyais la connaître bien sur, mais je me suis laissé avoir bêtement. Tout ce que je voulais c'était rencontrer une femme qui m'aimerait, et que j'aimerais telle qu'elle est. Elle m'a donné de faux espoirs, et je ne sais pas si je lui pardonnerai un jour.

     - Je vais te demander de bien vouloir me suivre. Nous allons rejoindre Karl et décider là-bas de ton sort.

     Elle me regarde en souriant et fais un petit signe avec sa main qui tient l'arme pour m'inciter à avancer devant elle.

     J'obéis, et commence à marcher en direction du grand immeuble en cessant de réfléchir :

     - Est-ce que...est ce que tu t'appelles bien Axelle ?

     Son visage me fait à présent penser immédiatement à celui de notre chef, même s'il était caché par un masque. Son sourire me fait encore plus penser au fait qu'il s'agit de la même personne. J'ai du mal à imaginer Axelle séduisant un dictateur et tirant sur des soldats, un poignard dans les mains. Cette pensée me parait tellement absurde, que j'ai presque envie de rire. Axelle qui pleure seule sur son balcon parce qu'elle a fait un cauchemar, qui se blottit dans mes bras en pleurant après avoir vu une femme couverte de sang lui secouer l'épaule et qui ne supporte pas de voir une tâche de sang nulle part.

     - Oui, je ne t'ai pas menti.

     - Ne crois pas que je te pardonnerai aussi facilement juste en m'ayant dit cela.

     - Je t'expliquerai tout je te le promets.

     - Lâche ton arme, lui ordonné-je froidement.

     Je jette un coup d'œil par-dessus mon épaule pour la voir s'esclaffer. Elle tient toujours fermement l'arme dans son poing et ne baisse pas sa vigilance une seule seconde. Il me serait difficile de me jeter sur elle pour la forcer à lâcher son pistolet pour pouvoir m'enfuir ensuite. Et puis je n'en ai pas envie. Le même désir qu'hier brûle dans ma poitrine. Le désir d'enfin tout savoir. L'ignorance m'a toujours profondément agacé.

     - Je pourrais, parce que je sais très bien que tu ne t'enfuiras pas, mais je préfère être prudente. Je ne sais pas de quoi tu es capable.

     Alors ça c'est la meilleure ! pensé-je, sans pour autant le dire à voix haute. Elle sait très bien de quoi je suis capable, puisqu'elle m'a espionné pendant des années et des années, et c'est plutôt moi qui devrais me méfier d'elle. Après tout, je ne la connais pas.

     Nous arrivons au pied du vieil immeuble. Grimpant rapidement les escaliers, nous arrivons en un rien de temps à la salle presque bondée tout en haut du bâtiment. Karl était surement en train de donner les consignes du jour, car il s'interrompt dans son discours en nous voyant arriver :

     - Eh bien Michael ce n'est pas trop tôt !

     Je soupire et il remarque alors l'arme et le visage découvert de sa supérieure. Il fronce les sourcils, se fraye un chemin parmi la foule qui nous observe attentivement, et se poste près d'Axelle qui range son arme derrière son dos :

     - Ca y est, vous avez arrêté de lui mentir.

     - Tu étais au courant ? m'étranglé-je en fixant Karl, hébété.

     Il me lance un regard méprisant, et je me rends compte alors que ma question est stupide. Bien sur qu'il devait être au courant puisqu'il lui a cédé la place. Il n'aurait jamais fait confiance à une femme masquée qu'il ne connaissait pas. Cependant, beaucoup d'autres questions me taraudent l'esprit.

     - Viens avec nous en bas, on sera plus tranquilles,marmonne la jeune femme derrière moi à l'adresse de Karl

Double {Terminé} Where stories live. Discover now